Congrès de pneumologie de langue française

Les médecins face au difficile choix de l'inhalateur

Par
Publié le 03/03/2016
Article réservé aux abonnés

Quel système employer pour délivrer une thérapie inhalée ? Cette question a été longuement débattue lors d'un symposium organisé par Boeringher Ingelheim et Pfizer, à l'occasion du 20e congrès de pneumologie de langue française qui s'est tenu à Lille du 29 au 31 janvier dernier. L'efficacité d'une molécule inhalée est en effet indissociable de son mode d'administration : spray, poudre ou brumisateurs « Soft Mist », dont la pertinence dépend en grande partie de la capacité du patient à s'en servir.

Selon le Pr Patrice Diot, du service de pneumologie du CHRU de Tours, le choix d'un inhalateur doit répondre à 4 questions : « le patient est-il capable d'une bonne coordination ? Est-il capable d’accéder aux doses inhalées prescrites ? A-t-il un bon débit respiratoire ? »

Pour le Pr Patrick Berger, du CHU de Bordeaux, la taille des particules lors de leur nébulisation ne dépend en effet pas que du mode d'inhalation : « plus le débit inspiratoire de pointe est important, et le délai pour parvenir à ce débit inspiratoire de pointe est court, et plus les particules inhalées sont petites, ce qui lui permet de pénétrer plus profondément dans la partie distale des poumons. »

Un meilleur dépôt pulmonaire avec les inhalateurs « soft mist »

Les sprays ont l'avantage de présenter des tailles de particules stables, mais souffre en revanche d'un dépôt oropharyngé variable et d'un dépôt faible dans les voies aériennes. Les inhalateurs de poudre, qui ont eu un flux turbulent au lieu du flux laminaire comme celui des sprays, présentent eux l'avantage de ne pas nécessiter une bonne coordination entre la main et l'aspiration.

Les inhalateurs « Soft Mist » comme le Respimat, se caractérisent quant à eux par l'émission d'un nuage de principe actif sous forme de brumisat lent et prolongé. D'après une évaluation parue dans « Chest » en 1998 montre que le dépôt pulmonaire est de l'ordre de 39,2 % contre 11 % avec un spray. Ils ont en outre l'avantage de disposer de doses reproductibles d'être aussi transportables que des sprays tout en proposant une disponibilité des molécules aussi bonne que les systèmes poudre.

Au niveau de l'éducation thérapeutique, seule la pose de la cartouche demande un peu d'entraînement. « Il y a des toutefois des problèmes aux extrêmes de la vie, tempère le Pr Diot, avant 7 ans, tous les enfants ne sont pas capables de générer les 30 L par minute de débit respiratoire de pointe nécessaires. »

D'autres dispositifs sont en cours d'arrivée sur le marché, à l'image d'Ellipta ou de Nexthaler, un dispositif d'inhalation multidose autodéclenché par l'inspiration, permettant la délivrance du produit indépendamment du débit inspiratoire.

Comment évaluer les inhalateurs ?

Pour le prescripteur, l'absence d'évaluation des systèmes d'inhalation est problématique. Pour le Pr Patrick Berger, « la question de l'évaluation est d'autant plus d'actualité que, si les molécules sont généricables après 20 ans de brevet, ce n'est pas le cas des systèmes d'inhalation, explique-t-il, les autorités de santé ont donc des problèmes pour évaluer un générique qui arrive sur le marché dans un système d'inhalation différent de celui du princeps ». L'association d'une molécule équivalente avec un nouveau système d'inhalation est d'ailleurs appelé un « hybride ».

Il existe aussi des couples indissociables comme l'olodaterol (Striverdi Respimat, bronchodilatateur bêta2 agoniste indiqué dans la BPCO), « je suis obligé de le prescrire en Respimat, puisqu'il n'existe que dans ce système-là poursuit le Pr Berger, le problème, c'est quand on doit faire des combinaisons, comme prescrire deux bronchodilatateurs par exemple. On peut se retrouver avec deux modes d'inhalation pour un même patient, et donc deux fois plus d'éducation thérapeutique à faire. J'en viens à choisir une molécule en fonction du système d'inhalation unique, dont je me suis assuré que le patient a bien compris le fonctionnement. »

Le Pr Berger ne croit pas à une standardisation des systèmes de délivrance qui simplifierait le casse-tête. « Dans la mesure où la durée des brevets sur les médicaments est faible, le laboratoire peut trouver plus intéressant de breveter les systèmes d'inhalation et même coupler des systèmes d'inhalation brevetés avec des molécules qui ont été génériquées. »

Damien Coulomb

Source : Le Quotidien du médecin: 9476