Les pneumopathies de vapotage mieux cernées

Publié le 13/11/2019
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Crédit photo : www.cdc.gov

Avec 60 cas rapportés, la plus grande cohorte de pneumopathies liées à l’e-cigarette vient d’être publiée dans The Lancet. Elle décrit plus précisément les contours cliniques de cette pathologie, nommée EVALI (E-cigarette, or vaping, product use associated lung injury). Notamment l’association des symptômes respiratoires et gastro-intestinaux.

Jusqu’à présent, la suspicion de pneumopathie liée au vapotage s’est établie sur des éléments cliniques, au premier rang desquels l’usage d’e-cigarettes dans les 90 jours précédents les symptômes, la présence d’infiltrats pulmonaires à la radiographie pulmonaire (97 % des cas) ou au scanner (100 % des cas) et l’absence de cause infectieuse caractérisée. Il n’y a pas de test spécifique. Les lésions pulmonaires de ces pneumopathies rassemblent des caractéristiques à la fois infectieuses et appartenant à d’autres pathologies pulmonaires.

La gent masculine surreprésentée

Selon cette étude prospective observationnelle multicentrique réalisée en Utah, 80 % les patients étaient majoritairement des hommes (80 %) âgés en moyenne de 27 ans. Un quart était asthmatique, l’asthme pouvant être un facteur favorisant. 18 % souffraient d’un pneumothorax ou d’un pneumomédiastin.

98 % des patients présentaient des symptômes respiratoires (dyspnée, toux, fièvre et tachycardie à l’admission). 90 % souffraient aussi de symptômes gastro-intestinaux, plus précisément des nausées et vomissements dans trois quarts des cas. L’association des symptômes respiratoires et gastro-intestinaux a déjà été relevée dans de nombreuses observations antérieures. Une sensation fébrile a été notée dans 75 % des cas, confirmée pour 57 % (n = 34) des patients, des frissons pour 48 % des patients, une asthénie (48 %).

78 % vapotaient du THC, 67 % de la nicotine. Près de la moitié utilisait à la fois nicotine et THC, ce qui sous-entend la difficulté d’incriminer une substance précisément.

Les corticoïdes, une piste thérapeutique sérieuse

55 % ont été admis en soins intensifs. 90 % ont reçu des antibiotiques, 90 % des corticoïdes qui a été perçu comme le traitement le plus efficace. 10 % ont été réhospitalisés dans les deux semaines après la sortie. Parmi les six patients ayant rechuté, trois (50 %) avaient recommencé à vapoter. Chez les 26 patients ayant bénéficié d’un suivi de deux semaines après la sortie, et malgré leur amélioration clinique et radiographique, il persistait des images résiduelles à la radiographie pulmonaires et des séquelles à l’EFR. Dans les deux cas où les patients sont décédés, la pneumopathie n’a pas été considérée comme la cause mais comme un facteur aggravant de l’état sous-jacent.

Pour les auteurs de ce travail descriptif, la meilleure connaissance de ces pneumopathies par les médecins et le grand public permet de les détecter plus tôt, de conseiller l’arrêt immédiat du vapotage dès les premiers symptômes et la mise rapide sous corticoïdes qui restent pour l’instant à valider. Chez des patients moins sévères répondant bien aux corticoïdes, il est possible d’éviter l’hospitalisation et des investigations invasives.

Les causes restent mystérieuses

À la lumière de la méthodologie de cette étude, il est important de centraliser les notifications dans un système d’information intégré (telecritical care) pour être plus réactif, proposer des recommandations diagnostiques et thérapeutiques actualisées et disposer d’une vision épidémiologique en temps réel. De plus, on ne peut pas s’appuyer sur le codage en CIM-10 considéré comme « inconsistant » à la fois pour la pneumopathie et pour le vapotage. En France, Santé Publique France a mis en place un dispositif de signalement des pneumopathies sévères liées au vapotage pour détecter l’éventuelle émergence d’une éventuelle épidémie.

Pour autant, les causes de ces pneumopathies ne sont pas connues vu la multiplicité des substances contenues dans une e-cigarette et son mésusage. La prédominance masculine est conforme à la surreprésentation des hommes dans la population des vapoteurs plutôt masculins et dans la tranche d’âge 18-34 ans.

 

Dr Muriel Gevrey

Source : lequotidiendumedecin.fr