En mai 2000, un rapport de l'AFSSA rédigé à la demande des ministères de la Santé, de l'Agriculture et de la Consommation, avait proposé une série de mesures destinées à améliorer la maîtrise des risques de listériose : surveillance des élevages, système de collecte et de centralisation des souches, dates limites de consommations et information des consommateurs (« le Quotidien » du 2 mai 2000).
A l'époque, les aliments faisaient l'objet d'une classification en cinq catégories, en fonction du risque. Les critères devaient être revus. C'est chose faite avec un nouveau rapport, également fruit des travaux de la commission spécialisée microbiologie de l'AFSSA, présidée par le Pr Jean-Pierre Flandrois (université de Lyon-Sud).
Trois catégories
Subsistent désormais trois catégories d'aliments :
- Les aliments sûrs : comme leurs caractéristiques ne permettent pas la croissance de Listeria monocytogenes, ces aliments sont considérés comme ne présentant aucun risque, à condition naturellement que leur niveau de contamination initiale soit conforme au seuil réglementaire. Exemples : les biscuits secs, les cornichons au vinaigre, les produits congelés ou les confitures.
- Les aliments sensibles : la bactérie peut y croître dès lors qu'ils sont contaminés et que leur conservation n'est pas effectuée dans des conditions appropriées. Entre autres : les rillettes vendues à la coupe.
- Les aliments à risque maîtrisé : soumis à des mesures de maîtrise microbiologique adaptées ou ou à des traitements listéricides dont l'efficacité a été démontrée pour des niveaux de contamination habituellement détectée avant traitement, ils ont par exemple été chauffés à cur pendant deux minutes à 65 °C ou ont subi une ionisation à 5 kGy. Dans cette catégorie, les laits UHT ou les plats cuisinés en conserve.
Le rapport de l'AFSSA souligne que, pour rester exempts de Listeria monocytogenes au stade de la consommation, ces aliments doit être servis selon les recommandations portées à la connaissance du consommateur, par exemple par un système d'étiquetage qui doit détailler les conditions de cuisson ou le délai de consommation après ouverture. En l'absence de telles recommandations, le mode de consommation habituel doit comporter une étape listéricide. « En distinguant ces différentes catégories, nous n'enfonçons nullement des portes ouvertes, souligne le Pr Flandrois, car beaucoup de gens préparent des aliments sensibles sans respecter le mode de cuisson convenable et sans s'être soucié de respecter un bon mode de conservation. »
Informé, le consommateur doit être aussi formé. « L'étiquetage à lui seul ne peut pas tout faire, explique le président de la commission microbiologie de l'AFSSA. C'est là qu'intervient le médecin qui signale les risques aux patients exposés que sont la femme enceinte ou le sujet immunodéprimé. »
Le rapport de l'AFSSA ne propose pas de listes des produits alimentaires selon la classification du risque Listeria. Une telle entreprise en aurait retardé de plusieurs années la publication, tant le sujet est complexe. Car, le même aliment, selon les cas, peut relever d'une catégorie ou d'une autre : le pâté en conserve dans son emballage fermé peut a priori permettre la croissance de Listeria monocytogenes, mais il est reconnu exempt de ce pathogène du fait du traitement thermique qu'il a subi au cours du processus de fabrication. Tant que son conditionnement demeure étanche, il peut être considéré comme aliment à risque maîtrisé.
Au stade de la consommation, en revanche, il sera considéré comme un aliment sensible, dans la mesure où il peut subir une contamination par le consommateur après ouverture et où il ne nécessite aucune cuisson avant consommation.
De même, la soupe fraîche, composée d'un mélange d'eau de produits végétaux et/ou animaux ayant subi un traitement de pasteurisation et un traitement thermique qui ne détruit que partiellement la flore d'altération ; au stade de l'achat, et conservée à 4 °C, elle sera considérée comme un aliment à risque maîtrisé ; mais au stade de la consommation, elle deviendra un aliment sensible, car elle pourra subir une contamination croisée de la part du consommateur.
Ne pas jeter l'opprobre
Un répertoire aussi exhaustif que possible des produits présenterait en outre le risque de jeter l'opprobre sur un certain nombre de produits dépourvus de dangerosité dès lors que la bonne procédure a été observée pour la conservation et la préparation.
Quoi qu'il en soit, les industriels et les distributeurs disposent, avec cette classification qui, espèrent ses auteurs, pourrait servir de modèle sur le plan européen, d'un nouvel outil qui parachève l'ensemble du dispositif contre le risque de listériose.
Un dispositif auquel on doit d'être sorti de la zone de turbulence épidémique : le nombre de nouveaux cas de listériose en France est passé de 1 000 par an environ dans les années 1980 à moins de 300 aujourd'hui. Des cas sporadiques dans leur presque totalité : en 2001 seulement quatre cas groupés ont été rapportés.
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