Les Gilets jaunes avaient peu mobilisé le monde de la santé. Les pouvoirs publics doivent aujourd’hui faire face à une fronde hospitalière. Depuis la mi-mars, une centaine de services d’urgence sont entrés en grève pour dénoncer la dégradation de leurs conditions de travail. Confrontées à une affluence chaque année grandissante – 21 millions de passages en 2016 – les urgences arrivent à saturation. Les annonces de la ministre de la Santé d’une énième mission pour penser les urgences de demain ou le versement de primes de coopération ou de dangerosité (portée à 100 euros), n’ont pas calmé la colère des personnels mobilisés qui réclament surtout davantage d’effectifs*.
Ce colmatage est loin d’être suffisant. « Il n’y a pas de mesures miracles qui permettraient d’éteindre le feu immédiatement », a reconnu Agnès Buzyn dans un entretien à Libération. La gestion en aval des lits hospitaliers demeure un problème. Le défi s’annonce aussi immense pour améliorer, en amont, l’accueil en ville. La situation est en effet bien plus complexe que ne l’a asséné la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye, selon qui « la médecine de ville n’est pas au rendez-vous ».
À l’heure où la médecine générale traverse une crise démographique sans précédent, le gouvernement table sur le recours aux CPTS et aux assistants médicaux pour améliorer l’organisation des soins de premiers recours. Buzyn compte aussi sur les maisons médicales de garde pour décharger les urgences. Mais outre le temps qu’elles prendront, ces réformes posent plusieurs questions. L’hôpital réorientera-t-il les patients vers ses structures de ville ? Les libéraux seront-ils en mesure de les accueillir ? Et quid du numéro unique de régulation sur lequel le gouvernement n’a pas tranché ?
Le temps presse. De nouveaux foyers de contestation pourraient voir le jour, comme à Lons-Le-Saunier où les gendarmes ont réquisitionné des soignants en pleine nuit, et à Lariboisière où des personnels hospitaliers se sont fait porter pâle. Le gouvernement pourrait être amené à prendre plus rapidement que prévu d’autres mesures en urgence.
*Mise à jour vendredi 14 juin : L'annonce par Agnès Buzyn, ce vendredi, d'une enveloppe de 70 millions d'euros pour permettre aux services de recruter des renforts cet été et de verser à environ 30 000 professionnels des urgences (hors médecins) d'une prime de 100 euros net mensuels, dès juillet, a été considérée comme une
« goutte d'eau » par des syndicalistes. Elle permettra peut-être de calmer temporairement la colère des urgentistes mais elle n'apporte aucune réponse structurelle au problème posé.
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