Polyarthrite rhumatoïde

Nouvelles molécules, nouvelles recommandations

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Publié le 06/04/2017
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Crédit photo : PHANIE

L’actualisation 2 016 des recommandations de l'EULAR vient d’être publiée (1). Elle confirme la place du méthotrexate en 1re ligne et met à nouveau en avant l'intérêt de faibles doses de corticoïdes en adjuvant du méthotrexate. En cas d'insuffisance de réponse chez un patient sans facteur de mauvais pronostic on peut proposer une trithérapie associant méthotrexate, sulfasalazine et hydroxychloroquine, peu utilisée en France. Chez les patients ayant des facteurs de mauvais pronostic, les inhibiteurs de JAK font leur apparition en alternative aux biothérapies après échec du méthotrexate ou en cas de réponse inadéquate aux biothérapies. Deux inhibiteurs de JAK, le baricitinib et le tocifacitinib, ont reçu un avis favorable pour l’octroi de l’autorisation de mise sur le marché dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde (PR). Ils devraient être ommercialisés en France à l’horizon 2 018. Le rituximab reste une biothérapie de 2e intention du fait de son utilisation en perfusion IV, intéressante notamment chez des patients ayant des antécédents récents de lymphome, de tumeur maligne ou d’affection démyélinisante du SNC. "Dans tous les cas, on fait une première évaluation de l’amélioration apportée par le traitement de fond à 3 mois, mais on se donne jusqu'à 6 mois avant de changer le traitement si l'objectif de rémission ou de bas niveau d’activité n’est pas atteint" souligne le Pr Constantin.

Le baricitinib supérieur au placebo et à un anti-TNF

Les résultats de l'étude RA-BEAM ont récemment été publiés (2). Cette étude menée chez des patients atteints de PR active et potentiellement sévère, ayant une réponse inadéquate au méthotrexate, compare l’efficacité clinique et structurale du baricitinib, non seulement au placebo, mais aussi à un anti-TNF. Sur le critère principal, l'ACR20 à 12 semaines, le baricitinib s’avère supérieur au placebo (70 % vs 40 %), mais aussi légèrement supérieur à l'adalimumab (70 % vs 61 %), cette différence se maintenant à 6 mois et à un an. Même résultat pour la diminution du DAS28 à 3 mois, 6 mois ou un an, ainsi que pour le score fonctionnel HAQ-DI. La progression radiographique à 6 mois est très faible dans les 3 groupes, significativement moins importante sous barictinib ou adalimumab que sous placebo. Le nombre d'infections à 1 an est plus élevé sous baricitinib ou adalimumab que sous placebo, mais les infections graves restent numériquement faibles dans les 2 groupes (2 % à un an). Il n'y a pas de signal d'alerte en ce qui concerne les cancers, ni la survenue d'événements cardiovasculaires (CV) majeurs à 6 mois ou 1 an. Sur le versant biologique, on constate une légère baisse des PNN, une légère élévation modérée des transaminases sans incidence clinique et une augmentation du cholestérol. Le profil de téolrance du baricitinib s'avère donc similaire à celui des biothérapies. Au vu de ces résultats, le comité des médicaments à usage humain (CHMP) de l’agence européenne des médicaments (EMA) a rendu un avis favorable pour l’octroi de l’AMM du baricitinib dans le traitement de la PR, modérée à sévère, chez les patients adultes en échec d'au moins un traitement de fond, en monothérapie (comme dans l'étude RA-BEGIN) ou en association au méthotrexate.

Tocilizumab : une augmentation du cholestérol sans conséquences cardiovasculaires

Les résultats d’une étude multicentrique de phase 4 (étude ENTRACTE), comparant la tolérance CV du tocilizumab à celle de l’étanercept chez des patients atteints de PR, ont été présentés à l’occasion du dernier congrès américain de rhumatologie (ACR 2016, Washington, DC) (3). Cette étude était notamment justifiée par l’augmentation du cholestérol total, du LDL-CL et du HDL-CL, observée chez 15 à 25 % des patients traités par tocilizumab. "Le risque CV constitue une nouvelle préoccupation pour les rhumatologues qui ont dû s'adapter et l'évaluer avant et en cours de traitement" rappelle le Pr Constantin. "On sait que la PR multiplie par 1,5 le risque CV mais que ce risque est pratiquement normalisé sous traitement de fond efficace". Les 3 080 patients inclus avaient plus de 50 ans, une PR active, une réponse inadéquate à un traitement de fond synthétique et au moins un autre facteur de risque CV que la PR. Après randomisation, ils recevaient soit le tocilizumab IV, soit l'étanercept SC. À l’issue du premier mois de traitement, le LDL-CL augmentait de 12 % sous TCZ contre 1 % sous étanercept. En revanche, après 3,2 ans de suivi, on n’observait aucune différence significative entre les deux agents biologiques en termes de survenue d’événements CV majeurs (1,82 [1,46-2,24] évènements pour 100 patients année sous tocilizumab contre 1,70 [1,35-2,10] évènements pour 100 patients année sous étanercept, HR [IC95 %] = 1,05 [0,77-1,43]), ni sur la mortalité CV ou globale, ni sur les infarctus. On notait une augmentation non significative de l’incidence des AVC (26 sous tocilizumab contre 16 sous étanercept, HR [IC95 %] = 1,55 [0,83-2,90]) et des hospitalisations pour insuffisance cardiaque (12 sous tocilizumab contre 8 sous étanercept, HR [IC95 %] = 1,50 [0,61-3,67]), ainsi qu’une augmentation de l’incidence des perforations intestinales sous tocilizumab, comparativement à l’étanercept (8 sous tocilizumab contre 1 sous étanercept).

Les biosimilaires se diversifient dans la PR

On dispose à l’heure actuelle en France de trois biosimilaires de l’infliximab et d’un biosimilaire de l’étanercept. L’étude de phase III évaluant l’équivalence clinique d’un biosimilaire de l’étanercept, le SB4, chez des patients atteints de PR ayant une réponse inadéquate au méthotrexate a récemment été publiée. Les résultats à 6 mois montrent que le profil d’efficacité clinique, de tolérance, et d'immunogénicité de l’étanercept biosimilaire est superposable à celui de l’étanercept de référence (4), Cette équivalence d’efficacité clinique se maintient à 1 an, mais aussi à 2 ans lorsqu'on remplace l’étanercept de référence par son biosimilaire, comme le suggèrent les données préliminaires issues de la phase d'extension (5). Au vu de ces résultats, le biosimilaire de l’étanercept a obtenu les mêmes indications que l’étanercept de référence, pour un prix 15 % inférieur. 

D'après un entretien avec le Pr Arnaud Constantin, CHU Toulouse
(1) Smolen JS. et al. Ann Rheum Dis. 2 017 Mar 6. pii : annrheumdis-2016-210715. doi : 10.1 136/annrheumdis-2016-210715. [Epub ahead of print]
(2) Taylor PC. et al. N Engl J Med 201 ; 376 : 652-62.
(3)Giles JT. et al. Arthritis Rheumatol 2 016 ; 68 (suppl 10).
(4) Emery P. et al. Ann Rheum Dis 2 017 ; 76 : 51-7.
(5) Burness CB. et al. BioDrugs 2 016 ;30 :371-8.

Dr Maia Bovard-Gouffrant

Source : Bilan Spécialiste