Maladies chroniques du foie

Pour un diagnostic précoce

Publié le 25/10/2018
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cirrhose

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Crédit photo : Phanie

Ces quarante dernières années, des progrès majeurs dans la prise en charge des patients avec une cirrhose décompensée (réanimation, transplantation, hémorragie digestive) ont permis une amélioration du pronostic. Cependant, il semble aujourd’hui que seul un diagnostic précoce puisse influencer significativement le pronostic pour des patients atteints d’une hépatopathie chronique avancée compensée, terme utilisé pour répondre à la difficulté de faire la différence entre une fibrose sévère et une cirrhose parfaitement compensée (que l’on prenne comme référence l’analyse histologique ou les marqueurs non invasifs). Finalement, les pronostics de ces deux stades de la maladie sont très proches, et les prises en charge pourraient en être identiques.

Vers une amélioration du pronostic et de la survie

La médiane de survie d’une cirrhose au stade compensé est de plus de dix ans, alors qu’elle est de moins de deux ans au stade décompensé. Un diagnostic au stade précoce doit permettre une amélioration du pronostic par l’exclusion si possible de l’agent causal, la prévention de toutes les situations à risque de décompensation et la mise en place du dépistage précoce de l’hypertension portale et du carcinome hépatocellulaire (CHC) (1).

Le dépistage semestriel de ce dernier, quatrième cause de décès par cancer dans le monde, et dont environ 9 000 nouveaux cas sont recensés par an en France, permet d’améliorer la survie des patients en permettant un diagnostic à un stade précoce et curable (2). En effet, dans près d’un cas sur deux, le CHC est diagnostiqué à un stade avancé non curable, et la cirrhose découverte au même moment. Un travail français a d’ailleurs démontré le caractère « coût-efficace » du dépistage du CHC (3).

Une concertation nécessaire entre généralistes et spécialistes

Une autre étude présentée au cours du congrès de l’AFEF cet automne, menée sur plus de 118 000 patients, a montré que 10 % des patients qui consultaient en médecine générale avaient une consommation excessive d’alcool, et 1,4 % une hépatite virale. Après exclusion de ces deux groupes, 16 % des 102 000 restants présentaient une stéatose. Néanmoins, il faut retenir que seule une faible proportion d’entre eux va développer une hépatopathie chronique avancée. Si la consommation excessive d’alcool et les facteurs de risque métabolique sont autant de facteurs modifiables, et si les conseils s’appliquent à tous les stades, le diagnostic d’une hépatopathie chronique avancée est primordial pour que les explorations complémentaires soient réservées à ceux pour qui c’est utile.

Aujourd’hui, il existe des moyens non invasifs d’identifier les patients à risque d’hépatopathie chronique compensée avancée : les tests sanguins et l’élastométrie. Cette étape clé est simple, indolore et réalisable en routine. Spécialistes de médecine générale et d’hépato-gastroentérologie doivent se concerter afin de mettre en place les moyens d’identifier ces patients et d’organiser un parcours de soins clair pour ceux qui en relèvent.

Hépato-gastroentérologue à l’hôpital Purpan (CHU de Toulouse), secrétaire général de l’Afef

(1) EASL. EASL Clinical practice guidelines for the management of patients with decompensated cirrhosis. J Hepatol. 2018 Aug;69(2):406-60

(2) Cadier B et al. Early detection and curative treatment of hepatocellular carcinoma: A cost-effectiveness analysis in France and in the United States. Hepatology. 2017 Apr;65(4):1237-48

(3) Costentin CE et al. Compliance with hepatocellular carcinoma surveillance guidelines associated with increased lead-time adjusted survival of patients with compensated viral cirrhosis: A multi-center cohort study. Gastroenterology. 2018 Aug;155(2):431-42.e10

Pr Christophe Bureau

Source : Bilan Spécialiste