L’importance du bilan étiologique

Prévenir les récidives des ulcères veineux

Publié le 15/04/2013
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Crédit photo : BSIP

L’hyperpression veineuse peut être liée à 3 mécanismes : le reflux superficiel, le reflux profond et la déficience de la pompe musculaire du mollet, qui sont volontiers associés. Le bilan étiologique initial est donc essentiel, notamment pour ne pas passer à côté d’un reflux veineux profond.

En effet, une thrombose veineuse profonde peut tout à fait passer inaperçue. La réalisation d’un écho-Doppler veineux doit ainsi être systématique ; cet examen permet d’attester la réalité du reflux au niveau des veines superficielles et/ou profondes. Le risque de récidive est accru en cas de reflux veineux profond (risque relatif = 2,4) et si ce reflux est sévère, le taux de récidive peut atteindre 40 % à un an et 60 % à 2 ans. L’écho-doppler artériel est réalisé s’il existe des arguments cliniques en faveur d’une artériopathie : abolition des pouls, ou index des pressions systoliques distales abaissé. L’existence d’une artériopathie associée favorise également les récidives.

La chirurgie

La prise en charge thérapeutique du reflux veineux superficiel est chirurgicale. La chirurgie, y compris a minima (crossectomie) permet de réduire le risque de récidive, comme cela a été bien démontré dans l’étude Eschar : à un an, le taux de récidive est de 16 % après chirurgie versus 30 % en cas de compression de classe II ; à deux ans, ces chiffres sont respectivement de 30 % et de 56 %. Les bénéfices de la chirurgie s’observent également chez les patients ayant un reflux profond associé.

Le reflux veineux profond, maladie postphlébitique, doit, lui, absolument bénéficier d’une compression. En effet, sans compression, le taux de récidive atteint 80 % à un an. Tout le problème en pratique est la mauvaise compliance, qui concerne deux patients sur trois. Il s’agit souvent d’une compression forte (de classe III, voire de classe IV en cas d’œdème), dont les enjeux doivent être bien expliqués au patient. En cas de difficultés pour enfiler chaussettes ou bas-cuisse, la superposition de deux compressions peut être proposée : une classe HI est d’abord enfilée, suivie d’une classe II glissée ensuite par-dessus. Il existe aussi des dispositifs d’aide à l’enfilage, mais aucun système actuel ne permet de résoudre tous les problèmes. Lorsque le patient vit en couple, le conjoint, s’il est valide, peut être sollicité. Parfois, lorsque la mise en place des bas ou chaussettes n’est pas possible, une compression par bandes double couche fixe, à renouveler tous les 3 jours, est indiquée.

La prescription doit se faire au cas par cas, en n’oubliant pas que la maladie veineuse est évolutive, et qu’une récidive peut survenir du fait de l’apparition d’un nouveau reflux ou d’une artériopathie. Ainsi, en cas de récidive d’un ulcère veineux, il importe de refaire un bilan étiologique. Le dépistage de l’artériopathie se fonde sur le calcul de l’indice de pression systolique (IPS =pression distale/pression en cas d’IPS ‹ = 0,9 ou› 1,3). Un IPS ‹ 0,6 fait contre-indiquer la compression, selon les recommandations de la Haute autorité de santé (2). Parfois, si la sévérité de la maladie veineuse profonde l’impose, un traitement chirurgical de l’artériopathie pourra être indiqué dans le seul but de permettre la compression.

L’ankylose de cheville

Après le reflux veineux, superficiel ou profond, et à côté de l’artériopathie, l’ankylose de cheville est un des facteurs de risque majeurs de récidive des ulcères. L’ankylose de cheville diminue les performances du retour veineux. L’angle de mobilité de la cheville doit être systématiquement précisé par l’examen clinique, une prise en charge kinésithérapeutique étant prescrite si besoin.

D’autres facteurs jouent également un rôle favorisant la récidive des ulcères veineux.

C’est notamment le cas de l’insuffisance cardiaque en poussée, source d’œdème et d’hyperpression veineuse. Chez les personnes âgées, l’insuffisance cardiaque est la première cause d’œdème des membres inférieurs, œdème conduisant à l’apparition de bulles, puis d’érosions, puis d’ulcères en raison d’une insuffisance veineuse sous-jacente. Ainsi un ulcère peut parfois révéler la maladie cardiaque.

C’est également le cas de l’eczéma, qui touche de très nombreux patients du fait d’une sensibilisation aux produits appliqués au niveau de l’ulcère. Ou encore de la polyarthrite rhumatoïde, qui favorise l’ulcère veineux par plusieurs mécanismes : vascularite rhumatoïde, artériopathie distale, déformation articulaire.

D’après un entretien avec le Dr Dr Isabelle Lazareth, service de médecine vasculaire, groupe hospitalier Paris Saint- Joseph , Paris.

(1)Barwell JR et al. Comparison of surgery and compression with compression alone in chronic venous ulceration (ESCHAR study): randomised controlled trial. Lancet 2004;363:1854-9..

(2)La compression médicale dans les affections veineuses chroniques. Fiche BUTS, HAS, décembre 2010.

Dr ISABELLE HOPPENOT

Source : Le Quotidien du Médecin: 9234