Pneumopathies d’hypersensibilité chroniques

Quand la fibrose s'en mêle

Publié le 05/04/2018
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Crédit photo : VALEYRE

Selon une classification proposée récemment, une pneumopathie d’hypersensibilité (PHS) est dite chronique lorsque les symptômes évoluent depuis plus de 6 mois (1). Il en existe trois formes : la PHS chronique se manifestant sous forme de BPCO-emphysème, qui se voit exclusivement au cours des poumons de fermier, la PHS chronique inflammatoire, dont l’aspect radiologique est identique à celui de la PHS subaiguë, et la PHS chronique fibrosante.

C’est cette dernière qui pose le plus de problèmes, tant au niveau du diagnostic (lire page précédente) que du traitement (2). Elle doit être évoquée devant toute pneumopathie interstitielle diffuse (PID) chronique, dont elle est une des causes les plus fréquentes.

Sur le plan diagnostique, l’exposition allergénique est souvent insidieuse. Elle est d’ailleurs méconnue dans près de 50 % des cas, pour lesquels le diagnostic s’appuie sur des arguments radiologiques, biologiques et/ou histologiques. Les sérologies ont une sensibilité moindre. À titre d’exemple, dans le poumon d’éleveur d’oiseaux, la sensibilité de la sérologie est de 30 à 70 % pour sa forme chronique, et de 75 à 100 % pour sa forme aiguë.

L’aspect tomodensitométrique est très variable. La PHS chronique fibrosante peut mimer tout type de PID fibrosante, notamment une fibrose pulmonaire idiopathique (FPI) ou une pneumopathie interstitielle non spécifique (PINS). Les éléments radiologiques qui doivent orienter vers une PHS sont la prédominance des lésions dans les lobes supérieurs, la présence de lobules clairs, un piégeage à l’expiration, et enfin la présence de nodules flous péribronchiolaires.

Le résultat du lavage broncho-alvéolaire, qui montre typiquement une lymphocytose alvéolaire dans la PHS, est souvent mis en défaut. Sur le plan histologique, la triade classique prédominance péribronchiolaire, granulomes mal formés, discret infiltrat interstitiel n’est pas facilement reconnaissable. Comme avec la radiologie, l’aspect peut être celui d’une FPI ou d’une PINS fibrosante. Il est important de rechercher des arguments pour une PHS : lésions qui prédominent dans les lobes supérieurs, au niveau centrolobulaire, et la présence d’ébauches de granulomes.

Le traitement de la PHS chronique fibrosante pose le problème, pour une éviction efficace, de l’identification de l’antigène. En l’absence d’exposition retrouvée, il peut être utile de demander au patient un éloignement de son environnement habituel d’une durée de quelques semaines pour évaluer l’évolution des symptômes et de la fonction respiratoire.

Corticothérapie et immunomodulateurs

Il n’y a pas d’étude prospective sur le traitement médicamenteux, reposant essentiellement sur la corticothérapie, associée à des immunomodulateurs. Le rôle des traitements antifibrosants est actuellement à l’étude (lire page suivante). Le recours à la transplantation pulmonaire doit être évoqué chez les patients les plus sévèrement atteints.

Le pronostic de la PHS chronique fibrosante est plus péjoratif que celui des PHS aiguë et subaiguë. La médiane de survie est évaluée à sept ans en cas de fibrose radiologique, pouvant même être comparable à celle de la FPI, environ trois ans, en cas d’aspect histologique de pneumopathie interstitielle commune.

Service de pneumologie et centre de compétences des maladies pulmonaires rares, hôpital Tenon (Paris)

(1) Vasakova M et al. Hypersensitivity pneumonitis: perspectives in diagnosis and management. Am J Respir Crit Care Med. 2017; 196:680-689

(2) Salisbury ML et al. Diagnosis and treatment of fibrotic hypersensitivity pneumonia. Where we stand and where we need to go. Am J Respir Crit Care Med. 2017; 196:690-699

Dr Jean-Marc Naccache
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Source : Bilan Spécialiste