LA DÉCOUVERTE, voici plus de cinquante ans, de la dopamine dans le cerveau, de son rôle sur le contrôle des mouvements, a déclenché un immense espoir pour le traitement de la maladie de Parkinson, mais a également montré la complexité de cette pathologie. La mort de neurones dopaminergiques, l'arrêt de la production de la dopamine expliquent, pour l'essentiel, la maladie et son aggravation. Cette découverte a permis la mise au point d'un traitement symptomatique : la L-dopa transformée en dopamine permet de lutter contre les symptômes de la maladie. Si la correction du manque en dopamine, des symptômes, est réelle, la progression du processus pathologique continue. Et, malgré une augmentation des doses de L-dopa, les symptômes échappent au fil du temps au traitement. Le Pr Olivier Rascol précise que «la L-dopa ne reconstitue pas la transmission dopaminergique physiologique; il s'ensuit un dérèglement du système, avec reprise des mouvements involontaires. D'autres symptômes peuvent alors faire leur apparition (troubles de l'équilibre, problèmes intellectuels...) et ces symptômes sont indépendants du manque de dopamine».
Médicaments stabilisants.
La recherche s'oriente donc vers des médicaments capables de bloquer ou de ralentir la progression du processus pathologique en cherchant les mécanismes susceptibles d'expliquer la mort des neurones dopaminergiques. Les recherches actuelles du Pr Carlsson s'orientent sur des médicaments « stabilisants », fondés sur le fait qu'un effet on/off observé dans le système de la dopamine serait à l'origine de mouvements involontaires dérangeants que la dopa ne corrige pas. En protégeant ce mécanisme, en restaurant la stabilité du système, le Pr Carlsson espère qu' «une des molécules sur laquelle il travaille ne sera pas uniquement symptomatique, qu'elle pourrait également être protectrice et retarder le processus de dégradation neurologique». Le Pr Olivier Rascol estime que, «jusqu'à présent, l'efficacité de médicaments prometteurs, tel le riluzole, pour ralentir le cours évolutif de la maladie, sont mitigés et leurs effets neuroprotecteurs au long cours restent encore à prouver». Actuellement, «l'histoire naturelle de la maladie est encore ignorée, seul le suivi prospectif de larges populations de malades permettra de déterminer les éléments prédictifs de la maladie».
Greffes, facteurs de croissance et thérapie génique représentent d'autres voies de recherche dans le combat contre la maladie de Parkinson. L'implantation dans le striatum de cellules possédant un potentiel dopaminergique a suscité quelques espoirs dans les années 1980. Rapidement, ces greffes ont montré leurs limites, peu de bénéfices, des problèmes étiques et un risque biologique pour le malade. On a cru également à l'utilisation de facteurs de croissance (GDNF), infusés avec une pompe pour régénérer des cellules dopaminergiques. Les protéines ne diffusaient pas au-delà des zones d'infusion. Puis, plusieurs équipes ont pensé utiliser des cellules souches implantées dans le striatum pour utiliser des facteurs de croissance. Bien des questions se posent, quelles cellules souches utiliser ? Les foetales peuvent devenir des tumeurs si le processus n'est pas maîtrisé, provoquer des réactions immunologiques. «L'utilisation de cellules souches de l'individu (autogreffes) apparaît depuis 2007 bénéficier d'un potentiel de développement intéressant», souligne le Pr Emmanuel Brousolle. Enfin, la thérapie génique, après des débuts difficiles (problèmes techniques), semble prometteuse sur des modèles animaux. Une équipe de Créteil a récemment réalisé des essais sur des singes en transférant via des virus un gène modifié pour permettre la production de dopamine au niveau du striatum. Parallèlement, aux Etats-Unis, des essais de thérapie génique ont eu lieu, la cible étant le noyau sous thalamique pour en limiter l'hyperactivité.
La neurostimulation.
Autre espoir de traitement, la neurostimulation du noyau sous-thalamique offre de grands succès thérapeutiques pour lutter contre les symptômes de la maladie. «C'est, précise le Pr Yves Agid, une très belle histoire scientifique et une très belle réussite de la recherche française.» Grâce à cette méthode, qui demande une équipe pluridisciplinaire bien rodée, pour trouver la cible sans créer d'effets secondaires, on obtient 70 % d'amélioration des symptômes. Ces résultats remarquables ne sont obtenus que si les critères d'inclusion sont bons. Ce traitement ne peut concerner que des formes dopamine dépendantes pures, sans lésions non-dopaminergiques associées ; en l'occurrence, seuls 5 % des malades peuvent en bénéficier. Les risques sont les effets secondaires cognitifs ou psychiatriques (même si cette technique présente l'avantage d'être réversible, adaptable), les complications chirurgicales (1 à 2 % des cas).
D'après une conférence de presse organisée par Les laboratoires Boehringer-Ingelheim avec la participation des Prs Arvid Carlsson, prix Nobel de médecine 2000, Olivier Rascol (CHU de Toulouse), Emmanuel Brousolle (CHU de Lyon), Yves Agid (hôpital de la Salpêtrière, Paris) dans le cadre du 7e Forum international sur la maladie de Parkinson à Paris.
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