ANTIQUITES
par FRANCOISE DEFLASSIEUX
Q U'ON ne s'y trompe pas, ces témoins de leurs temps n'en sont nullement les mal-aimés, puisque leurs têtes de file s'appellent Léger, Chagall, Villon, Braque, Lhote, et même Matisse dans les premières années. Cette aventure insolite est aussi celle d'un homme, Isis Kischka, revenu en 1945 des camps de la mort avec la ferme volonté de donner un sens à sa vie.
Le salon voit le jour en 1951, au musée d'Art moderne de la Ville de Paris, sur le thème du travail. Un problème tout à fait dans l'air du temps. La deuxième édition aura lieu seulement deux ans plus tard, dans l'élégant palais Galliéra, réhabilité pour cette occasion, et où le salon restera jusqu'en 1977. Cette fois, les peintres sont invités à réfléchir sur la figure imposée... du dimanche.
Les « Peintres témoins de leur temps » se retrouvent ensuite, chaque année, entre festivités et mondanités, limités chaque fois à 80 participants devant se plier au thème choisi dont le simple énoncé traduit les préoccupations de la France d'alors : la ville, le bonheur, la jeunesse, les richesses de la France, les conquêtes de la science...
Isis Kischka, le fondateur animateur, meurt en 1974 et le salon de l'année suivante lui sera évidemment dédié. Les artistes continuent à témoigner sans lui, mais le temps avait passé et n'était plus tout à fait le leur. Après le départ de Galliéra, le salon émigre au musée du Luxembourg, mais l'édition de 1982 sera aussi la dernière. En 1986, le Salon d'automne leur rend un dernier hommage et, l'année suivante, un court métrage leur est consacré.
De cette aventure de trente ans, il reste aujourd'hui 5 000 pièces d'archives qui sont passées depuis vingt ans de grenier en grenier avant d'être dispersées.
Sur les 1 200 numéros de la vente, un bon millier regroupent environ 3 000 uvres originales et quelque 500 artistes.
Le salon était toujours accompagné d'un gros catalogue pour lequel les peintres envoyaient à Kischka un dessin ou une aquarelle qui lui restait acquis. Une soixantaine de ces uvres portent le tampon de la Kermesse aux étoiles des années 1952-1953-1954, où les peintres allaient se produire en public au milieu des acteurs et des chanteurs.
Ces uvres originales sont précédées des archives proprement dites qui consistent en autographes, accompagnés parfois d'un petit croquis, en catalogues et affiches du salon, et en une quarantaine d'albums dans lesquels on a regroupé, par thème et par année, toutes sortes de photos, d'affiches, de coupures de presse et de documents divers sur ces années 1950-1960, aujourd'hui teintées du charme discret de la nostalgie.
De nombreux musées parisiens et régionaux sont intéressés et plusieurs préemptions sont annoncées, sans oublier les collectionneurs privés. Mais, coup de théâtre de dernière minute : le musée de Meudon, dans les greniers duquel étaient entreposées ces archives - et qui, soit dit en passant, ne s'en était jamais occupé - s'estime bénéficiaire d'une donation et voudrait aujourd'hui les récupérer. Alors que les héritiers Kischka affirment, eux, que la donation est restée à l'état d'intention pieuse et qu'il était urgent de sauver ces archives qui dépérissaient lamentablement dans l'oubli et la poussière.
Quel que soit le résultat de l'action intentée, l'organisation de cette vente aura eu le mérite de les en faire sortir, et Me Osenat affirme qu'il s'estimera heureux si son action débouche sur une exposition permanente, unique ou multiple, publique ou privée.
Fontainebleau, samedi 20 et dimanche 21 janvier, 10 h et 14 h, 5, rue Royale. Etude Osenat.
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