A FIN d'améliorer le suivi du traitement de la tuberculose en France et de parvenir - à terme - à enrayer la maladie, Hôpital sans Frontière (HSF) a mis ses bénévoles au service des malades. Ils sont actuellement une trentaine à intervenir auprès des patients, les accompagnant tout au long de leur traitement.
« Plusieurs fois par semaine, nous rendons visite au malade pour préparer ses piluliers, s'assurer qu'il prend ses médicaments, programmer ses consultations à l'hôpital, témoigne l'un d'eux. Nous les accompagnons à l'hôpital, mais aussi à la Sécurité sociale, à la caisse d'allocations familiales, etc. » Ces « médiateurs de santé » font par ailleurs un travail de prévention auprès de l'entourage du malade, les incitant à accepter un dépistage de la maladie.
Mené en partenariat avec six hôpitaux de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (Saint-Antoine, Saint-Louis, Lariboisière, Tenon, Rothschild), le programme de HSF (400 000 F) démarre en région parisienne et a vocation à s'étendre à plusieurs grandes villes de France, dont Marseille. HSF intervient à l'appel des médecins hospitaliers exerçant dans le service des maladies infectieuses des hôpitaux partenaires.
Environ 15 000 nouveaux cas de tuberculose apparaissent chaque année en France, 40 % de ces cas étant concentrés dans la région parisienne et liés pour moitié à la précarité, selon le Pr Willy Rozenbaum, chef du service des maladies infectieuses et tropicales à l'hôpital Rothschild. Ces chiffres sont des estimations. Le Pr Rozenbaum souligne que plusieurs milliers d'autres ne seraient pas diagnostiqués. Les dernières données épidémiologiques sur la tuberculose en France concernent l'année 1997, durant laquelle 6 683 cas ont été déclarés en France métropolitaine, ce qui correspond à une incidence de 11 cas pour 100 000 habitants. En 1997, la tuberculose est donc en recul pour la quatrième année consécutive. L'Ile-de-France est en tête des régions touchées par la maladie : 26 cas pour 100 000 (49 pour 100 000 à Paris et 37 pour 100 000 en Seine-Saint-Denis).
Les populations les plus touchées par la tuberculose se caractérisent par de faibles revenus et l'absence de domicile fixe ou un hébergement précaire. HSF constate que « la dégradation des conditions socio-économiques, liée à la crise des années quatre-vingt, a développé des situations de grande précarité, favorisant le développement de la maladie ». Selon l'ONG, un autre facteur intervient : « l'arrivée de migrants issus d'Afrique du Nord et de l'Europe de l'Est, de même que l'expansion de l'infection par le VIH ». Vingt-six pour cent de l'ensemble des cas déclarés en 1997 concernent des étrangers, soit une incidence de 44 cas pour 100 000, contre 8 cas pour 100 000 pour les sujets de nationalité française.
Des études menées auprès de plusieurs hôpitaux parisiens et citées par HSF montrent qu'environ 20 % des personnes traitées ne respectent pas la durée de leur traitement. L'affection est combattue à l'aide d'antibiotiques, administrés durant six mois à un an. Le traitement est lourd : entre 5 et 15 comprimés à avaler chaque jour pendant deux mois, un peu moins ensuite.
Le Pr Rozenbaum se félicite de l'initiative de HSF. Il considère en effet que « le système hospitalier français n'est pas bien adapté au suivi de maladies telles que la tuberculose ». Pour HSF, la difficulté est désormais de trouver des bénévoles pour développer son programme et asseoir son action de prévention. « Nous incitons les gens à aller se faire dépister à l'hôpital, explique Jean-Pierre Demandre, directeur des missions à HSF. Mais on ne peut pas les contraindre. Or, la plupart ne veulent pas y aller car ils ont peur des résultats. Ils redoutent aussi les questions. C'est une maladie à déclaration obligatoire. »
Pas de recrudescence de la tuberculose, selon le Pr Jarlier
« Dans la seconde moitié du XIXe siècle, le monde s'est clivé en deux parties : les pays industrialisés et les autres. Dans les pays industrialisés, l'incidence de la maladie a commencé à diminuer et ce phénomène n'était pas lié à la médecine. On ne connaissait ni le bacille, ni le vaccin, ni les antibiotiques. Ce phénomène était le retentissement de la modification du mode de vie (augmentation du mètre carré disponible par personne, fin de la salle commune de vie dans le monde rural). On commençait à vivre en ville, en petite cellule », explique le Pr Vincent Jarlier, chef du service de bactériologie-hygiène hospitalière de la Pitié-Salpêtrière. Depuis, le nombre de cas de tuberculose a diminué de 90 %. Le Pr Jarlier estime que le nombre de cas par an est actuellement « de l'ordre de 10 000, dont 6 000 bactériologiquement documentés ». « Il n'y a pas de recrudescence de la maladie, précise-t-il. Le nombre de cas continue à diminuer, après un arrêt de la diminution momentané au moment le plus dur du SIDA. On a même observé un petit rebond à New York à ce moment-là. »
Il souligne par ailleurs que « la pauvreté n'est pas en soi un facteur de risque ». « C'est un facteur de promiscuité, rectifie-t-il. N'oublions pas que la tuberculose est une maladie contagieuse. »
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