Un médecin sur quatre a déjà eu des idées suicidaires, une enquête appelle les soignants à sortir du silence

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Publié le 05/12/2017
Suicide

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Crédit photo : VOISIN/PHANIE

Dans le cadre de son 3e colloque qui se tient lundi prochain à Paris, l’association Soins aux Professionnels de Santé (SPS) a réalisé une enquête consacrée au suicide des soignants. 710 professionnels, dont 472 médecins y ont répondu, et les chiffres confirment qu'un très grand nombre sont exposés aux idées suicidaires.

25 % des médecins déclarent ainsi avoir déjà eu des pensées suicidaires, dont l’origine était tout ou partie d’ordre professionnel. La proportion est un peu plus élevée chez les hommes (27 % contre 24 % chez les femmes), chez les jeunes (27 % pour les 20-45 ans), en milieu rural (39 % contre 18 % en région parisienne) et en libéral exclusif (28 %). Autre enseignement important de ce sondage : les praticiens restent souvent silencieux lorsqu'ils ont des idées suicidaires. 56 % des médecins expliquent ainsi n’en avoir parlé à personne. Cette proportion reste plus faible que chez les pharmaciens (68 %) et surtout les infirmières (71 %). Ceux qui parlent se tournent en majorité (52 %) vers leur famille, devant les psychiatres (38 %), les confrères (35 %) ou les amis (31 %). « S’ils n’osent pas en parler c’est aussi parce que c’est un mot tabou, explique le Dr Éric Henry, président de SPS. Avec cette étude, nous voulons lever ce tabou. Ce sujet doit rentrer dans les discussions au même titre que la dépression ou le burn-out. »

 

Le médecin traitant oublié des praticiens

Mais au-delà de leur cas personnel, les professionnels de santé sont parfois confrontés aux idées suicidaires de leurs confrères. 29 % des médecins connaissent des professionnels de santé à risque et 46 % des confrères ayant fait une tentative de suicide avec en moyenne 1,47 tentative ayant abouti au décès. Ces chiffres très élevés impactent les praticiens dans leur vie professionnelle. Après le suicide d’un confrère, 57 % d’entre eux remettent en question la confiance qu’ils ont en eux, 67 % revoient leur implication dans leur travail, 72 % leur organisation du travail et 53 % la qualité de leurs soins.

 

Quant aux conseils qu’ils pourraient apporter à ces confrères, les médecins n’ont pas forcément les mêmes réactions que les pharmaciens et infirmiers. Ils placent en premier l’appel à une plateforme d’écoute dédiée alors que pour les médecins ils recommandent la consultation auprès d’un psychiatre à 39 %. « C’est un réflexe professionnel, ils ont l’habitude d’orienter le patient vers la spécialité concernée alors qu’il n’y a pas forcément besoin de cette prise en charge lourde dès le départ. Il peut y avoir des intermédiaires », explique le Dr Éric Henry. La consultation auprès du médecin traitant n’apparaît même pas dans leur top 3 contrairement, aux autres professionnels qui le placent en deuxième position. Une preuve supplémentaire que les médecins habitués à se soigner seuls n’ont toujours pas le réflexe "médecin traitant". « Nous voulons faire émerger chez les soignants l'idée qu'ils peuvent aider leur voisin quand ils voient qu’il ne va pas bien », résume le Dr Henry.

 

Source : lequotidiendumedecin.fr