Embolisation des artères prostatiques

Une nouvelle approche des HBP

Publié le 19/10/2015
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Après l’examen clinique (toucher rectal), l’évaluation de base du patient porteur d’un adénome prostatique, ou hyperplasie bénigne de la prostate (HBP) repose sur le PSA et l’échographie transrectale. La prise en charge est adaptée à la sévérité des symptômes. La première étape repose sur des conseils hygiénodiététiques (réduction des boissons le soir, arrêt des diurétiques), qui permettent parfois de retarder la mise en route d’un traitement médicamenteux, après avoir vérifié l’absence de retentissement sur le haut appareil urinaire. Ensuite, si le patient reste gêné, les recommandations françaises et internationales préconisent la mise en route d’un traitement alpha-bloquant de première intention, en l’absence de contre-indication (1). Divers autres traitements médicamenteux sont possibles, notamment l’adjonction d’un inhibiteur de la 5 alpha-reductase qui devient efficace après 6 à 9 mois de traitement.

RTUP : des complications fréquentes

Le traitement chirurgical est proposé en cas d’échec des traitements médicamenteux. Il consiste en une résection transurétrale (RTUP) si la prostate est d’un volume inférieur à 60/80 ml ou transvésicale dans le cas contraire. Les traitements considérés comme moins invasifs (résection bipolaire, vaporisation ou énucléation laser) sont une alternative à la chirurgie classique.

La RTUP est la technique de référence, pratiquée dans le monde entier depuis de nombreuses années permettant d’obtenir de très bons résultats. Elle entraîne rarement des complications graves, cependant des complications moins sévères mais invalidantes sont souvent constatées, dont la première est l’éjaculation rétrograde, observée chez 60 et 80 % des patients.

Une technique radiologie interventionnelle complexe

Depuis 5 ans, en se basant sur l’expérience des radiologues interventionnels acquise en embolisation pelvienne, deux équipes pionnières ont développé une nouvelle approche, l’embolisation des artères prostatiques. Celle-ci consiste, après un abord percutané de l’artère fémorale, à placer un microcathéter sous guidage par imagerie dans les artères prostatiques, droite et gauche, et à injecter des billes calibrées jusqu’à occlusion complète de ces artères. L’intervention est réalisée sous anesthésie locale, elle est non ou peu douloureuse, et peut être pratiquée en ambulatoire ou lors d’un séjour hospitalier très court.

Les résultats, évalués sur l’IPSS (lire encadré), montrent une efficacité voisine du traitement chirurgical, avec peu de complications rapportées (figure 1), notamment l’absence d’éjaculation rétrograde.

Il faut toutefois rester prudent sur sa diffusion, car c’est une technique de radiologie interventionnelle complexe – principalement en raison des variations anatomiques de naissance des artères prostatiques et du risque d’embolisation d’artères collatérales à risque (artères rectales, vésicales, caverneuses) – nécessitant parfois l’utilisation de l’imagerie 3D disponible dans les salles de radiologie interventionnelle modernes (figure 2) (2). Elle est encore insuffisamment évaluée, en particulier à long terme, mais les indications qui semblent se dégager aujourd’hui sont les rétentions aiguës d’urine après échec du traitement médical chez des patients ayant une contre-indication à la chirurgie, les patients présentant des symptômes obstructifs significatifs à sévères et chez qui la chirurgie est impossible (contre-indication ou refus du patient), les hématuries réfractaires notamment.

Elle ne peut être pratiquée qu’après une information complète du patient sur ses avantages et inconvénients, par rapport au traitement de référence chirurgical, et dans le cadre d’une discussion avec l’urologue référent, qui reste responsable de l’évaluation principale du patient et de son suivi.

Les résultats publiés notamment dans l’étude randomisée (3) montrent une efficacité voisine de la chirurgie avec un taux plus faible de complications, ce qui en fait une technique intéressante dans le traitement de l’HBP notamment en préservant mieux la sexualité par le maintien de l’éjaculation.

La société française de radiologie (SFR) et l’association française d’urologie (comité de troubles mictionnels de l’homme de l’AFU) ont déposé un projet de recherche commun au PHRC 2015 national, avec 7 équipes multidisciplinaires dans le but de permettre une évaluation appropriée de la technique avant que sa diffusion ne soit plus large en France.

*Service de Radiologie Interventionnelle et Urologie Hopital Européen Georges Pompidou

**Service d’Imagerie Médicale, CHU Henri Mondor

***Service de Radiologie, CHU de Bordeaux

(1) Descazeaud A et al. Prog Urol. 2012 Dec; 22(16):977-88

(2) Chiaradia M et al. J Vasc Interv Radiol. 2015 Mar;26(3):413-7

(3) Lebdai S et al. World J Urol 2015 Aug 15 epub

Marc Sapoval*, Hicham Kobeiter**, Grégory Amouyal*, Nicolas Grenier***, Nicolas Thiounn*

Source : Bilan spécialiste