De notre correspondante
à New York
« L a recherche, ces trente dernières années, a montré que le noyau suprachiasmatique (NSC) dans le cerveau représente le pacemaker primordial du rythme circadien chez les mammifères », déclare au « Quotidien » le principal auteur des travaux parus dans « Science », le Dr Steven McKnight (University of Texas Southwestern Medical Center, Dallas). « Le NSC est maintenu en phase avec le cycle lumière/obscurité grâce au signal électrique venant de la rétine. La sortie neuronale du NSC est principalement responsable du contrôle de l'éveil, de la faim et de toutes sortes de comportements. Le cycle circadien dans le NSC est contrôlé par un facteur de transcription, appelé Clock, qui s'active et s'inactive en fonction du cycle lumière/obscurité. Ce facteur de transcription a été découvert il y a quatre à cinq ans par l'équipe de Joe Takahashi). »
« A peu près en même temps, mes collègues et moi-même avons découvert un facteur de transcription très voisin, que nous appelons "protéine neuronale de domaine PAS 2 (NPAS2)" », poursuit le Dr McKnight. « Notre facteur de transcription n'est pas exprimé dans le NSC, mais dans des régions du cerveau qui traitent les informations sensorielles (toucher, douleur, froid, chaleur, odorat, vision, audition) et les comportements émotifs (peur, anxiété, etc.). Nous savons maintenant que le facteur de transcription NPAS2 a la même fonction dans le prosencéphale que Clock dans le NSC : il active et inactive les gènes en fonction du cycle lumière/obscurité. »
Une analogie avec le travail de nuit
« Normalement, les horloges du NSC et du prosencéphale sont parfaitement synchronisées. Parfois, cependant, elles se désynchronisent. Un exemple est fourni par la restriction d'alimentation chez les souris dans la journée. Si la nourriture n'est offerte que durant la journée, alors que ces animaux ont une activité nocturne, les souris s'adaptent, elles mangent dans la journée et font même tourner la roue dans la journée en anticipation de la nourriture. Nous voyons cela comme une analogie avec le travail de nuit pour les humains. Après un certain temps, les souris et les hommes peuvent s'adapter à la restriction alimentaire et au travail de nuit », explique-t-il.
« Dans l'étude publiée dans "Science", nous montrons que la restriction alimentaire chez la souris induit un ajustement du rythme moléculaire du prosencéphale, de façon qu'il s'active le jour plutôt que la nuit. Nous avons produit une souche de souris déficientes en gène NPAS2, par conséquent au système prosencéphale contrôlant le rythme circadien déficient. Ces souris mutantes sont incapables de s'ajuster à l'alimentation restreinte à la journée, ce qui nous permet de supposer que l'horloge du prosencéphale est précieuse pour la faculté d'adaptation du comportement. »
Par extrapolation, « si une personne était dépourvue de ce système, elle pourrait avoir des difficultés à s'adapter au travail de nuit », estime le Dr McKnight.
La sieste
L'équipe cherche maintenant à comprendre pourquoi les souris mutantes déficientes en NPAS2 ne font pas la sieste la nuit (l'équivalent de notre sieste dans l'après-midi). « Cela nous conduit à supposer que les deux systèmes contrôlant le rythme circadien (NSC et prosencéphale) fonctionnent ensemble, d'une manière ou d'une autre, pour nous donner deux périodes d'éveil (matin et soir) séparées par une pause. D'après nous, le NSC, entraîné par la lumière est notre horloge-réveil du matin, et notre horloge du prosencéphale, entraînée par les influx sensoriels, nous donne une résurgence de vigilance dans la soirée. Mais ce n'est qu'une spéculation. »
« Des rythmes circadiens robustes sont essentiels pour la santé mentale, souligne le Dr McKnight, les personnes atteintes de dépression ont peu d'énergie dans la journée, et souffrent d'insomnies terribles. Si nous savions comment garder ces rythmes, cela pourrait être bénéfique pour les personnes à risque de maladie dépressive. »
Sciencexpress, 4 juillet 2003.
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