À l’étude

Du zinc contre le Covid-19 ?

Publié le 29/05/2020
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Le zinc a un effet antiviral in vitro et il est impliqué dans l’immunité. D’où un engouement certain dans le cadre du Covid-19. Rien n’est démontré à ce jour, mais beaucoup d’éléments font penser que le zinc pourrait participer à lutter contre la pandémie en cours.
Une pratique courante aux États-Unis

Une pratique courante aux États-Unis
Crédit photo : Phanie

Les méta-analyses montrent que la prise d’un sel de zinc permet de limiter la durée et l’intensité des symptômes du rhume, infection provoquée souvent par un coronavirus banal. C’est bien démontré pour l’acétate de zinc, car les Zinc lozenges sont en rayon de tout drugstore américain. La dose active est supra-nutritionnelle, la protection étant observée pour 100 mg/j (besoins nutritionnels : 10-15 mg/j). J’ai donc adopté la pratique, courante aux États-Unis, de sucer des pastilles de zinc dès le début d’un common cold. On peut rêver : ce qui « marche » contre le rhume, pourrait-il diminuer l’incidence ou la gravité du Covid-19 ? Je ne suis pas seul à y avoir pensé, et le conseil d’acheter des cachets de zinc a fleuri chez les marchands de compléments alimentaires. Examinons les supports scientifiques de cette spéculation.

Une activité intracellulaire

In vitro, le zinc inhibe la réplication de plusieurs virus à ARN, le SARS-Cov-2 n’ayant jamais été testé. Mais l’addition de Zn2+ à des cellules en culture infectées par le SARS-Cov bloque l’ARN polymérase du virus, à condition d’ajouter de la pyrithione. C’est un chélatant qui favorise l’entrée du zinc dans les cellules, mais qui est toxique in vivo. Des chélatants naturels, quercétine (oignons) et épigallochathéchine gallate (thé vert) sont efficaces aussi, mais les doses nécessaires in vivo sont inconnues. Enfin la chloroquine est aussi un chélateur du zinc, ce qui pourrait expliquer son effet clinique.

Amélioration de l’immunité

Au niveau de l’organisme, les carences en zinc sont associées à une baisse de l’immunité et une augmentation de la fréquence des infections intestinales et pulmonaires. La correction de la carence par l’apport de zinc améliore l’immunité antivirale et antibactérienne ainsi que la clairance mucociliaire, et réduit l’inflammation pulmonaire. Enfin, la carence en zinc augmente (et l’apport de zinc diminue) la production de cytokines pro-inflammatoires dans le poumon, ces médiateurs impliqués dans les derniers stades du Covid-19. Cet effet est bien démontré dans des modèles classiques d’inflammation pulmonaire chez les rongeurs et passe par l’inhibition de la voie NF-kB.

Des essais empiriques

En l’absence de thérapeutique de référence, des médecins audacieux ont donné du zinc à leurs patients, sans publier ces essais empiriques. Un médecin d’un village de l’état de New York, Vladimir Zelenko, a proclamé sur Youtube avoir guéri ou protégé plusieurs centaines de personnes contre Covid-19 grâce à un traitement associant sulfate de zinc, hydroxychloroquine et azithromycine. Il suggère que le zinc tue le virus, la chloroquine faisant entrer le zinc dans les cellules. La presse américaine s’en est largement fait écho. En France aussi, des médecins ont associé Effizinc (30 mg/j), à un traitement antibiotique. O. Vansteenberghe, D. Gastaldi, et J.J. Erbstein disent avoir traité plusieurs centaines de patients avec de bons résultats.

Quelques revues scientifiques sur zinc et Covid-19 ont été publiées en avril 2020, étaient cette introduction. Trois essais cliniques incluant du zinc sont en cours, à Melbourne, Istanbul et Ventura en Californie.

Comme nutritionniste, je me demande si le Covid-19 est moins fréquent ou moins grave chez ceux qui ont un régime riche en zinc, ou prennent des suppléments de zinc : ceci pourrait être testé dans une cohorte.

Professeur émérite, Hygiène & NutritionHygiène anti-coronavirus et références de ce billet sur mon blog : http://fcorpet.free.fr/Denis/W/Covid19.html

Pr Denis Corpet

Source : lequotidiendumedecin.fr