Relations médecin-patient

Estime de soi : une image à restaurer

Publié le 12/05/2010
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Maladie, divorce, harcèlement au travail, dépression, chômage, autant de circonstances au cours desquelles l'estime de soi est mise à mal quand les patients viennent nous consulter. Comment les aider à restaurer cette mauvaise image d'eux-mêmes ? Le point avec le Pr Philippe Jaury, professeur associé en médecine générale à l'université Paris-Descartes.

Mr D, 35 ans, est victime d'un harcèlement psychologique dans son travail de banquier pour

le pousser à démissionner. Malgré une carrière plutôt brillante jusqu'à présent, il doute de lui

et de ses compétences professionnelles...

Une écoute de la souffrance psychologique

« Face à un patient qui a perdu l'estime de lui-même, la première étape pour l'aider, c'est d'écouter sa souffrance », explique le Pr Philippe Jaury, professeur associé et responsable du Diplôme Universitaire de « Psychothérapies et Médecine Générale » à l'Université Paris-Descartes*. Une écoute pour accueillir et reconnaître sa souffrance mais aussi en évaluer le niveau de réalité ou de fantasmes. « Quand on connaît bien la personnalité d'un patient, on peut rapidement savoir si ce dont il se plaint est objectif ou dramatisé », poursuit le Pr Jaury. Il est utile aussi de rechercher un état dépressif caractérisé qui peut être réactionnel aux circonstances traversées et au cours duquel l'autodépréciation est souvent présente. Si le diagnostic se confirme, un traitement antidépresseur associé à un soutien psychothérapique

aidera le patient à retrouver l'estime de lui-même.

Un temps de réflexion

La consultation médicale est aussi l'occasion pour le patient de prendre le temps de la réflexion dans un lieu où le médecin lui propose un espace thérapeutique d'expression (cf encadré). Depuis combien de temps dure cette situation conflictuelle ? Fait-elle suite à un autre événement ? Quelles sont les solutions envisagées ? Autant de questions qui vont aider le patient à se repérer à un moment où son image est chancelante pour s'ouvrir vers la recherche de solutions. Les questions posées peuvent aussi l'aider à faire la part entre ce qui lui appartient et ce qui lui a été imposé dans les circonstances traversées. Par exemple, on peut lui faire remarquer qu'il n'est pas forcément responsable des comportements de celui ou celle qui le tyrannise. Bref de prendre sa part de responsabilité mais aussi se déculpabiliser par rapport à ce qu'il est en train de subir.

Renforcer les assises narcissiques

« Faire le bilan de ses réussites et de ses renoncements en montrant que ceux-ci lui ont permis de rebondir et de s'améliorer est une attitude thérapeutique qui aidera à renforcer les assises narcissiques du patient », souligne le Pr Jaury. Une attitude thérapeutique qui permet de recadrer positivement le parcours du patient à partir d'éléments de réalité et de mettre en perspective ce qu'il est en train de vivre. C'est aussi l'occasion de l'aider à envisager un changement qui peut représenter un défi et un progrès personnel. Enfin, il faut l'inviter aussi à se protéger mieux en prenant de la distance avec les sources de sa souffrance, quitte à lui proposer concrètement un arrêt de travail pour l'aider à mieux se retrouver.

*Diplôme Universitaire « Psychothérapies et Médecine Générale », Université Paris-Descartes. Tél. : 01.56.09.33.71,

 

Courriel : philippe.jaury@parisdescartes.fr

Dr Jean-Pierre Rageau

Source : lequotidiendumedecin.fr