LA DERMOHYPODERMITE BACTÉRIENNE NON NÉCROSANTE
Anciennement appelée érysipèle, elle est essentiellement rencontrée chez l’adulte. Le germe le plus fréquent est un streptocoque et le principal risque à distance est la récidive.
→ La DBHNN se manifeste par un tableau septique brutal associant un malaise général (fièvre, frissons), suivi en moins de 24 h de l’apparition d’un placard inflammatoire unilatéral (photo 1) associé à une adénopathie locorégionale et parfois une trainée de lymphangite.
Devant un tableau non typique, il faudra savoir évoquer d’autres diagnostics tels qu’un eczéma aigu, une vasculite d’effort, une poussée de lymphœdème…
→ L’examen clinique s’attache à évaluer les signes locaux de gravité (lividités, taches cyaniques, crépitation sous-cutanée, hypo ou anesthésie locale, induration dépassant l’érythème, nécrose locale, douleur intense discordante, impotence fonctionnelle) et de rechercher une porte d’entrée (plaie, lymphœdème, intertrigo inter-orteil, lésion manipulée…).
Bien sûr, il faudra éliminer des signes généraux de sepsis, de choc toxinique et savoir réévaluer à 24 h/48 h d’initiation du traitement s’il y a une extension rapide des lésions ou une résistance au traitement. Il est conseillé de marquer au feutre les limites des lésions cutanées en datant et horodatant pour faciliter la surveillance.
→ Les principaux facteurs de risque sont un antécédent de DHBNN, un IMC > 30, un lymphœdème ou œdème chronique, une porte d’entrée cutanée et chez l’enfant, la varicelle.
→ Le traitement de la phase aiguë passe par une antibiothérapie générale durant 7 jours et le traitement de la porte d’entrée. Il ne faut pas y associer d’antibiothérapie locale, ni d’AINS (risque de passage vers une forme nécrosante). Penser à vérifier le statut vaccinal anti-tétanique.
→ Certaines situations nécessitent une hospitalisation : signes locaux ou systémiques de gravité, risque de décompensation d’une comorbidité, IMC > 40, âge > 75 ans si polypathologique, enfant < un an, évolution défavorable dans les 24 à 48 heures.
→ Un traitement préventif par benzathine-benzyl-pénicilline G ou Pénicilline V ou azithromycine est insaturé si le patient a eu deux épisodes dans l’année ou a des facteurs de risque non contrôlables, mais avec une durée actuellement non codifiée. Il est impératif de traiter les facteurs de risque et les portes d’entrée récidivantes telles l’intertrigo inter-orteil.
L’IMPÉTIGO
→ L’impétigo est une infection bactérienne superficielle (épiderme) et non folliculaire. C’est une maladie primitive bactérienne, essentiellement à staphylococcus aureus (SA), principalement pédiatrique avec un pic de fréquence estival. Elle est contagieuse par contact. On parle d’impétiginisation lorsque l’impétigo survient sur une autre maladie.
→ Cliniquement, l’impétigo débute par des lésions vésiculo-pustuleuses pouvant devenir bulleuses (photo 2) si le staphylocoque sécrète une toxine de type exfoliatine. Elles évoluent ensuite en croutes mélicériques (photo 3). Quand l’infection est plus profonde, dermique, on parle d’ecthyma.
→ Le prélèvement bactériologique n’est pas indiqué en cas de première poussée, de moins de six lésions ou d’une atteinte inférieure à 2 % de la surface corporelle. Par contre, le prélèvement bactériologique est nécessaire dans les cas contraires ou de récidive, si l’extension est rapide ou en présence d’ecthyma. Il doit être effectué avant la prise d’antibiotiques.
→ La recherche d’une protéinurie n’est pas nécessaire en France, car le principal germe est le staphylocoque.
Par contre, si l’impétigo survient après une varicelle ou un séjour en pays à faible niveau de ressources, elle est fortement conseillée, puisque le streptocoque est alors le plus fréquent.
→ Le traitement de l’impétigo repose sur une toilette avec de l’eau et du savon sans utiliser d’antiseptique. S’il est localisé, on associe de la mupirocine 2 à 3 fois par jour pendant 5 jours. S’il s’agit d’une forme grave d’impétigo, le traitement est une antibiothérapie systémique pendant sept jours associée à un corps gras neutre. Ne jamais associer dans ce cas une antibiothérapie locale qui potentialise l’émergence de résistance.
→ L’éviction des collectivités n’est pas obligatoire si les lésions sont protégeables du contact. Si elles ne le sont pas, on demande trois jours d’éviction après le début du traitement.
LE FURONCLE ET L'ANTHRAX
Le furoncle est une affection profonde et nécrosante du follicule pilo-sébacé, contrairement à la folliculite qui est superficielle. Le furoncle est une affection suppurative à SA qui produit quasi systématiquement la toxine de leucocidine de Panton-Valentine (LPV).
→ Il débute par une lésion papulo-nodulaire très inflammatoire, douloureuse. En 5 à 10 jours, le follicule pilosébacé se nécrose, c'est le bourbillon (photo 4) pour ensuite s’éliminer, laissant une cicatrice déprimée. Si plusieurs furoncles sont agglomérés, on parle d’anthrax.
→ Les principaux risques sont l’abcédation, la lymphangite, la DHBNN et la thrombophlébite pour les zones de drainage difficile (exemple : la staphylococcie maligne de la face).
→ Les principales situations à risque de complication sont les lésions de plus de 5 cm, multiples, l’âge inférieur à 1 an, l’immunodépression, la présence de comorbidités classiques et l’absence de réponse au traitement.
Le prélèvement bactériologique n’a son indication que dans les furoncles compliqués ou dans un contexte de voyage. Par contre, aucun intérêt à rechercher la LPV.
→ Le traitement du furoncle isolé repose sur le lavage à l’eau et au savon avec un pansement de protection. La guérison est spontanée après évacuation du bourbillon, qu’il est parfois nécessaire d’inciser pour évacuer. Le traitement des furoncles compliqués repose sur une hygiène rigoureuse (toilette, changement quotidien de linge …) et une antibiothérapie systémique par pristinamycine ou clindamycine pendant 5 jours. Pour les enfants, il est souhaitable de les orienter vers l'hôpital.
LA FURONCULOSE
La furonculose est une affection chronique correspondant à la présence récurrente de furoncles depuis des mois voire des années. Elle peut être idiopathique, mais des facteurs de risque sont connus, donc à rechercher : défaut d’hygiène, portage de SA ou contact avec une personne infectée par un SA-LPV+, déficit immunitaire, obésité, diabète, carence martiale…
Elle est douloureuse et laisse des cicatrices déprimées ayant un retentissement psychologique. Le prélèvement bactériologique du furoncle et des gites (nez principalement +/- gorge, périnée et anus) doit être systématique avant de débuter le traitement. Ce dernier est en deux phases : traitement de la poussée puis traitement préventif de décolonisation (tableau 1).
→ En présence de cas groupés de furonculose (plus de deux cas dans un même foyer ou une même collectivité), les mesures sont encore plus drastiques, à retrouver sur les recommandations du HCSP de 2014 sur le SAMR Co.
→ Pour la folliculite chronique, le sujet n’a pas été abordé par les dernières recommandations, mais les mesures recommandées pour la furonculose semblent raisonnablement applicables à cette pathologie.
Pour en savoir plus
Les antibiothérapies des infections cutanées bactériennes
Les détails des traitements antibiotiques des entités décrites ci dessous sont consultables sur la fiche résumée HAS sur le lien https://www.sfdermato.org/media/image/upload-editor/files/fiche_de_synt…
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