C'est un courrier adressé le 18 novembre directement à Olivier Véran, intitulé « Loi Rist, rapport portant sur les écarts de rémunération entre les carrières médicales », qui agace prodigieusement certains syndicats de praticiens libéraux. Cosigné par le président de la Fédération hospitalière de France (FHF), Frédéric Valletoux, et par les principaux responsables des conférences hospitalières (doyens, DG de CHU, DG de CH, CME de CHU, de CH et de CHS) – ce courrier que « Le Quotidien » s'est procuré aborde les « maux » structurels d'un hôpital public « à la croisée des chemins », « traversé de tensions sociales fortes » mais fragilisé surtout… par des différentiels de traitement avec le secteur privé lucratif.
L'hôpital, « bouclier sanitaire des Français »
Cette missive de deux pages met en avant les atouts et les mérites d'un hôpital public « seul à accueillir sans distinction tous les patients 24 heures/24 et 7 J/7, garant des soins d'excellence », également « bouclier sanitaire des Français, avec une réactivité et une efficacité inouïe » pendant la crise sanitaire. Les signataires rappellent au ministre que plus de 80 % des patients Covid hospitalisés l'ont été à l'hôpital public, un « effort extraordinaire » qui s'est accompagné de déprogrammations « plus importantes que dans le secteur privé ».
Or, pour la FHF et les conférences, l'aggravation de la situation à l'hôpital public (30 % de postes de PH vacants, départs qui se multiplient) s'explique « pour une part significative » par une situation « d'iniquité forte vis-à-vis des acteurs privés ». Le courrier envoyé à Olivier Véran pointe en particulier « les écarts de rémunérations très importants, à travail égal » entre les praticiens exerçant dans les secteurs privé lucratif et public. « Des offres d'emploi dans le secteur privé, sous forme salariée, peuvent à titre d'exemple proposer à des gériatres des rémunérations mensuelles de 6 000 euros net pour quatre jours hebdomadaires, soit presque le double de rémunération d'un jeune PH à temps plein dans le secteur public », se désole la FHF. Des écarts de revenus qui peuvent être « bien supérieurs » en cardiologie, radiologie, psychiatrie ou anesthésie, peut-on lire.
Sujétions pesantes
La concurrence du secteur privé serait d'autant plus déloyale, ajoutent la FHF et les conférences, que certaines sujétions – gardes et astreintes – « pèsent sur les seuls médecins du secteur public et sont insuffisamment valorisées », ajoute le courrier.
Sur ces bases jugées inéquitables, la FHF exhorte le gouvernement à « objectiver pleinement » la situation dans le cadre du rapport prévu par la loi Rist d'avril 2021 portant justement sur les écarts de rémunération entre les carrières médicales public/privé. Et de réclamer que plusieurs points y soient traités : la rémunération des libéraux dans les cliniques, celle des praticiens salariés des cliniques lucratives, les missions, les compléments d'honoraires, les émoluments des hospitalo-universitaires ou encore la permanence des soins « sujet central de l'écart des contraintes ».
De quoi relancer une querelle public/privé que l'on croyait terminée ?
Ainsi formulé, le plaidoyer hospitalier exaspère en tout cas certains représentants de la médecine libérale ou du secteur privé. « De quoi se mêle la FHF ? ! », s'agace Jeunes Médecins (JM) qui a pris connaissance de cette missive « avec stupéfaction ». Le syndicat d'Emanuel Loeb y voit une « longue litanie visant à faire peser tous les malheurs de l'hôpital public sur la médecine libérale » et accuse la FHF d'adopter une « attitude de lobbyiste ». « Faut-il rappeler que la FHF a été signataire du Ségur dont tout le monde convient qu’il a été un échec ? », tacle JM.
Pas en reste, le Syndicat des médecins libéraux (SML) accuse aujourd'hui la FHF d'allumer des contre-feux « pour masquer l'échec du Ségur », de diviser la profession médicale et, pire, de « casser du sucre sur le dos des libéraux » auprès du ministère. « Tout ce qui est excessif n'est pas crédible », balaie le SML qui regrette une analyse « à charge ».
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