Dans le monde pré-Covid, en 2019, la ministre de la Santé d’alors, Agnès Buzyn, avait concocté la réorganisation de la carte sanitaire en imaginant deux piliers fondamentaux : la labellisation de 500 à 600 hôpitaux de proximité d'ici à 2022 et, en ville, le déploiement de 1 000 communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS).
Sept ans et une crise sanitaire plus tard, la France compte officiellement 315 hôpitaux de proximité, s’est félicité la direction générale de l’offre de soins (DGOS) lors du dernier congrès hospitalier SantExpo, qui s’est tenu fin mai à Paris. Les CPTS, ces regroupements de libéraux qui émergent en parallèle dans les territoires, sont 681.
85 %
C’est la part des hôpitaux de proximité qui sont publics, tandis que 13 % relèvent du privé non lucratif et le reste du privé lucratif
Trait d’union entre l’ambulatoire et le secteur hospitalier, les hôpitaux de proximité, pour l’essentiel de petits hôpitaux locaux, ont pour mission de coopérer étroitement avec la ville, d’assurer des prises en charge de médecine et des consultations spécialisées, avec accès à des plateaux techniques d’imagerie et de biologie médicale. Sauf dérogation, ils ne font ni chirurgie ni obstétrique. Ils peuvent en revanche remplir des missions supplémentaires : urgences, périnatalité, SMR (ex-SSR), soins palliatifs, etc. Tandis que 85 % d’entre eux sont publics, 13 % relèvent du privé non lucratif, et le reste du privé lucratif.
Davantage d’économies et d’efficacité
La création des hôpitaux de proximité marque une étape forte dans le décloisonnement entre la ville et l’hôpital. « Le parcours du patient est alors devenu central ; à l’époque, c’était un changement de paradigme », se souvient Sophie Guinoiseau, présidente de la Fédération nationale des établissements de santé de proximité. Miser sur les hôpitaux de proximité est aussi « une façon de s’organiser pour aller chercher des économies et de l’efficacité », loue le Dr Jean-François Moreul, président de la Fédération des CPTS.
Le parcours du patient est devenu central ; à l’époque, c’était un changement de paradigme
Sophie Guinoiseau, présidente de la Fédération nationale des établissements de santé de proximité
Pour démontrer que les échanges entre les professionnels libéraux et hospitaliers sont désormais incontournables, le généraliste donne l’exemple d’un projet d’évaluations gériatriques standardisées dans son département, le Maine-et-Loire. Après un patinage en règle, chacun des acteurs ayant l’habitude de « travailler dans son coin », le déclic est intervenu à la suite de la réécriture du contrat local de santé, un outil qui facilite les parcours de soins dans les zones rurales isolées et dans les quartiers urbains en difficulté. Petit à petit, chacun a pris sa place sur la chaîne : le domiciliaire pour le dépistage et le suivi des personnes, les maisons de santé du premier recours pour l’écriture du protocole, les hôpitaux de proximité pour l’évaluation. Le Dr Moreul estime qu’il faudra encore deux ou trois ans pour aboutir à un parcours consolidé.
Déconstruire les préjugés
Dans l’ADN des hôpitaux de proximité, l’exercice mixte est l’autre facteur déterminant qui favorise la coopération. « C’est le premier outil pour déconstruire les préjugés », plaide Sophie Guinoiseau. Dans l’établissement qu’elle dirige, à Doué-en-Anjou (Maine-et-Loire), la présidente de la CME est salariée de l’hôpital, exerce en ville et siège dans une CPTS.
À l’inverse, « le manque de temps, les tensions et le turnover au sein des équipes, la non-compréhension de qui fait quoi » n’aide pas à créer du lien entre la ville et l’hôpital, déplore Marion Bru, présidente de la Fédération nationale des acteurs de la coordination en santé. Curieusement, l’outil numérique fait également partie de sa liste : « Le mail ne crée pas de lien », regrette-t-elle.
Le fait aussi que la coopération ne soit qu’à peine abordée dans la formation initiale est une autre lacune qui dessert les hôpitaux de proximité : « Les jeunes médecins libéraux n’ont pas la coopération dans leur ADN », déplore ainsi le Dr Moreul.
Selon une enquête de la Fédération des CPTS rendue publique en mars, 50 % des conseils d’administration des communautés ont déjà intégré les hôpitaux de proximité et les élus. « Avec nos missions, nous n’avons pas d’autre choix que de nous ouvrir », conclut le médecin.
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