« Des comportements discriminatoires qui persistent, des différences de perception majeures entre les femmes et les hommes, une libération de la parole encore insuffisante ». Telles sont les conclusions alarmantes du sixième baromètre Ipsos pour l’association Donner des elles à la santé rendu public le 5 juin. L’enquête a sondé 500 médecins hospitaliers, hommes et femmes exerçant dans les hôpitaux publics et privés, interrogés par internet entre le 18 février et le 13 mars. Malgré la vague #MeTooHopital lancée il y a un an, les agressions et propos sexistes font encore trop souvent partie du quotidien.
Commentaires sur le physique ou la tenue, remarques désobligeantes sur les compétences professionnelles, questions sur la vie privée, gestes inappropriés, pressions pour obtenir des faveurs, images et messages sexuellement explicites… La part de femmes rapportant des comportements de harcèlement moral, sexuel ou d’agression sexuelle de la part d’hommes médecins au sein de l’hôpital, collègues ou supérieurs hiérarchiques sur les douze derniers mois a bondi à 53 %, soit 14 points de plus que dans le précédent baromètre.
Les discriminations sexistes sont toujours récurrentes à l’hôpital public et dans les établissements privés. Près d’une femme médecin sur trois déclare avoir été discriminée « sur son lieu de travail » au cours des douze derniers mois parce qu’elle était une femme. 78 % des femmes médecins déclarent même avoir subi des discriminations liées à leur sexe au cours de leur carrière. Un sentiment de discrimination qui ne diminue qu’à partir du clinicat et sur la suite de la carrière, mais tout en restant élevé.
Au cœur des enjeux de carrière des médecins âgés de moins de 45 ans, la problématique des congés maternité et paternité. La prise en compte de ces congés a des conséquences sur le ralentissement de la carrière professionnelle, « un item en progression de 10 points chez les femmes », indique le baromètre. Près d’une sur dix s’est vu refuser une promotion impliquant davantage de responsabilité au motif de son sexe. Pis, « une sur trois s’est vu conseiller de ne pas prendre de congé maternité sur une période donnée », souligne le baromètre.
Un impact fort sur la santé mentale
Malgré cette situation, la parole se libère peu – ou du moins pas assez. 56 % des victimes seulement ont osé parler à une personne, dont 36 % dans l’univers hospitalier. Moins d’une femme sur dix ose évoquer ces violences auprès de sa hiérarchie. Pourtant, les conséquences sont graves : 54 % des femmes concernées signalent un impact important sur leur santé, notamment sur le stress, le sommeil ou les émotions. Malgré cela, seules 2 % ont consulté un psychologue ou une psychiatre.

Le baromètre met aussi en lumière une divergence inquiétante entre la perception des femmes et celle de leurs collègues masculins. Là où les premières constatent une recrudescence des comportements discriminatoires, les seconds estiment qu’ils diminuent. Cet écart, parfois du simple au double, souligne l’ampleur du décalage vécu au sein même des équipes hospitalières.

Une mobilisation collective
Face à ces constats, Donner des elles à la santé appelle à « une mobilisation collective ». Elle accompagne déjà plus de 100 hôpitaux dans le lancement de leur démarche égalité (charte, indicateurs de suivi, mise en place d’actions, etc.). Début 2025, l’association a initié un programme de mentorat, qui permet de croiser les générations de médecins et travaillé sur l’organisation des carrières universitaires, la nomination aux postes à responsabilité et la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. L’organisation compte aussi élargir son action aux personnels paramédicaux, également concernés. Pour sa présidente, la Dr Marie-France Olieric, la démarche d’égalité femmes-hommes à l’hôpital doit se poursuivre « sans relâche ». « Il en va de l’efficacité de ce système, de la performance de nos établissements, de leur efficience et de leur attractivité » conclut-elle.
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