En raison d’une adoption tardive de la loi Sécu 2025 (LFSS), la campagne tarifaire des établissements de santé n’a, encore une fois, pas été bouclée dans les temps. Un retard qui préoccupe la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), dont le président, Lamine Gharbi, redoute « une année 2025 plus difficile que 2024 ».
En l’absence des nouveaux tarifs hospitaliers, les cliniques ont dû stopper toute facturation depuis le 1er mars. Un arrêt brutal qui provoque des difficultés de trésorerie, même si ce risque peut être atténué par un dispositif d’avances mis en œuvre par l’Assurance-maladie.
Ces désagréments s’ajoutent aux difficultés financières qui « se sont amplifiées ». Le déficit du secteur s’élève à 800 millions d’euros pour les 450 cliniques déficitaires, soit 45 % des 1 000 établissements adhérents à la FHP selon une nouvelle étude réalisée par le cabinet Roland Berger. Pire, la part d’hôpitaux privés en déficit grimpe à 61 % parmi ceux dotés d’un service d’urgences, 80 % pour ceux qui accueillent des malades en réanimation. Rien à voir avec l’année 2021, quand « seulement » 26 % des cliniques étaient déficitaires.
Le secteur privé étouffé par l’inflation
Comment expliquer ce sombre tableau ? « On a été frappé ces dernières années, depuis le début du conflit en Ukraine, par une augmentation très importante de l’inflation. Et public, comme privé, nous avons été sous-financés », explique Christine Schibler, déléguée générale de la FHP. La fédération estime à un milliard d’euros la part de l’inflation non financée par l’État entre 2021 et 2024 !
La FHP se souvient de la campagne tarifaire 2024, pointée du doigt : l’augmentation des tarifs hospitaliers, significativement plus forte dans le public (+4,3 %) que dans le privé lucratif (+0,3 %) avait même provoqué une fronde des cliniques, soutenues par les médecins spécialistes libéraux qui, eux, négociaient leurs tarifs dans le cadre de la nouvelle convention médicale avec la Cnam. Ils avaient finalement levé, in extremis, leur mouvement de grève, début juin 2024, après des promesses de soutien financier : en particulier la suppression du coefficient de minoration des tarifs des hôpitaux privés, qui avait été conçu pour annuler l’avantage fiscal induit par le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE).
La FHP face au risque de mensonge de l’État
Mais aujourd'hui, « l'État pourrait ne pas respecter l'ensemble de ses engagements », a lâché Lamine Gharbi qui craint que la santé subisse un dommage collatéral de l’augmentation des dépenses militaires.
Par exemple, l’État ne tiendrait pas tout à fait parole concernant la suppression du coefficient de minoration qui efface l’avantage fiscal du CICE pour les cliniques. « Le diable se cache dans les détails, s’agace le président de la FHP. On nous a expliqué que, comme la campagne tarifaire se fait au 1er mars, cette suppression ne sera pas appliquée en janvier et février ». Ainsi, le gouvernement envisagerait de retrancher 43 millions d’euros aux 130 millions promis à travers cette mesure, qui avait été prise pour calmer la grogne des cliniques l’année dernière.
Le secteur privé attend aussi le soutien de l’État pour financer les revalorisations de salaires, comme le prévoit le fameux « avenant 33 » qui régit la convention collective des cliniques. « Si l’État ne verse pas 140 millions, on ne fera rien », prévient Lamine Gharbi. Si l’État tient parole, alors la FHP promet d’avancer de son côté 150 millions, au risque de diviser par deux le résultat net du secteur privé, « ce qui prouve notre engagement en faveur de nos collaborateurs », plaide-t-il. À ce stade, le gouvernement indique vouloir « faire un pas » mais pas à hauteur de 140 millions d’euros, regrette la fédération.
Alors que la campagne tarifaire 2025 n’est pas bouclée, la FHP pose ses conditions pour éviter une nouvelle déconvenue : à savoir la revalorisation des tarifs hospitaliers du privé de 1 % au moins, la récupération pleine du CICE, y compris sur les mois de janvier et février 2025, ainsi que l’appui financier de 140 millions pour les revalorisations salariales. Ce qui reviendrait, d’après les calculs du lobby des cliniques, à une hausse globale de l’enveloppe budgétaire du privé de 4,67 % pour 2025 (soit +709 millions d’euros).
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