Une aide-soignante d’une maison de retraite près de Chambéry a été écrouée jeudi pour avoir empoisonné neuf de ses pensionnaires, dont six mortellement, expliquant avoir voulu « soulager leurs souffrances ». La suspecte, mise en examen pour six empoisonnements et trois tentatives d’empoisonnement sur personnes vulnérables, a été placée sous mandat de dépôt, conformément aux réquisitions du parquet.
Les six décès sont intervenus depuis octobre au sein de l’établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Le Césalet, à Jacob-Bellecombette (Savoie), qui dépend du centre hospitalier de Chambéry. Les victimes, originaires de la région, étaient des octogénaires « en bonne santé, avec les fragilités liées à leur âge », mais « elles n’étaient pas en fin de vie », a souligné la vice-procureure Dietlind Baudoin lors d’une conférence de presse.
L’aide-soignante, âgée de 30 ans et employée de l’EHPAD depuis l’été 2012, a reconnu devant la police judiciaire avoir administré « un cocktail de psychotropes » à neuf pensionnaires, dont trois ont survécu. Aucun autre cas d’empoisonnement n’est envisagé par les enquêteurs.
Placée en garde à vue mardi, la jeune femme était initialement soupçonnée d’avoir empoisonné une pensionnaire de 84 ans qui a sombré brutalement dans le coma le 27 novembre avant de mourir deux jours plus tard. Les médecins qui n’avaient retrouvé aucune cause médicale à la mort avaient demandé des analyses toxicologiques qui ont révélé un taux anormal de psychotropes. La direction du centre hospitalier de Chambéry avait alors alerté la justice. L’alerte est venue après « un cas particulièrement atypique » de décès d’une personne âgée que les médecins n’ont pas su expliquer, a indiqué le directeur de l’hôpital de Chambéry, Guy-Pierre Martin.
Des faits passibles de réclusion criminelle à perpétuité
Le cocktail de médicaments administré aux victimes semble toujours le même. Des expertises médicales et pharmacologiques sont en cours. Selon l’hôpital de Chambéry, aucun des produits retrouvés dans le sang de la vieille dame décédée le 29 novembre « ne faisait partie de la prescription pharmaceutique de cette résidente ». Après la découverte du premier empoisonnement, les médecins ont identifié « deux ou trois cas » similaires intervenus dans les semaines précédentes.
Bien notée par sa hiérarchie, la suspecte travaillait auparavant à l’unité de soin continu de l’hôpital de Chambéry. Les faits qui lui sont reprochés sont passibles de la réclusion criminelle à perpétuité. « Cette affaire est une affaire considérable qui provoque un très fort traumatisme dans l’établissement », a affirmé le directeur de l’hôpital. L’établissement déposera plainte dans les prochains jours, a-t-il annoncé.
L’affaire de l’aide-soignante de Chambéry, mise en examen jeudi pour empoisonnement sur personnes vulnérables, rappelle l’affaire Christine Malèvre, une infirmière de Mantes-la-Jolie (Yvelines) condamnée à douze ans de réclusion criminelle en 2003 pour l’assassinat de six patients. Dès le début de l’enquête, en 1998, l’infirmière alors âgée de 29 ans avait en revanche déclaré que ses actes relevaient de « l’euthanasie », de « l’aide à mourir » de malades incurables, au service de pneumologie et neurologie de l’hôpital François-Quesnay de Mantes-la-Jolie où elle exerçait depuis trois ans.
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