Courrier des lecteurs

Intérim médical : il ne faut pas mettre de l'huile sur le feu

Publié le 09/12/2019

Il y a quelques jours de cela, le Quotidien a mis en ligne (« Intérim médical à l'hôpital : le gouvernement veut durcir les contrôles », 21/11/19) un article concernant l’intérim médical et ses dérives. Notre ministre de la Santé trouve que les exigences tarifaires de ces « mercenaires » sont démesurées, et un amendement a été déposé pour réglementer les sommes demandées par ces confrères.

Mme Buzyn souhaite de cette manière rééquilibrer les comptes des hôpitaux, et espère ainsi moraliser les professionnels de santé « qui ne sont pas dans les clous ». Cependant, plutôt que de passer par la case du dialogue, elle a décidé de se montrer ferme (pour ce faire, elle n’a pas hésité de donner cette opinion aux journalistes de tous bords) ; donnant de ce fait peu de crédits aux intérimaires.

De plus, elle a décidé de poursuivre au niveau ordinal les représentants syndicaux qui avaient cartographié les hôpitaux qui refusaient des honoraires à la hauteur des espérances des vacataires. Mais notre ministre veut-elle réellement connaître la problématique actuelle, ou fait-elle semblant de ne pas la connaître ?

Force est de constater que dans ce petit jeu du chat et de la souris, Mme Buzyn oublie une donnée de très grande importance : les effectifs médicaux. Les sommes exigées peuvent paraître démesurées (les intéressés expliquent qu’elles tiennent compte de la précarité de leur fonction), mais elles doivent prendre en compte la célèbre équation de l’équilibre entre l’offre et la demande. Lorsque vous n’avez plus suffisamment d’un produit, les cours augmentent ; cela est identique dans le domaine de l’emploi.

Si notre chère ministre dénigre comme elle le fait ces praticiens, ils vont se tourner vers le privé. Il est possible que son comportement au sujet des intérimaires ait pour but de réduire l’offre de soins dans les hôpitaux au profit des établissements privés. Toujours est-il que ces critiques distillées dans différents médias généralistes ne sont pas très honorables, et jettent une nouvelle fois le discrédit sur la pratique professionnelle de l’ensemble de la communauté médicale (on n’en a pas besoin actuellement !).

De toute manière, on ne peut être que fier de savoir qu’avec nos impôts nous permettons à des préfets hors cadres de rester chez eux en étant grassement payés. Mais eux représentent la République, et ne peuvent en aucune manière être critiqués !

« Lorsqu’on possède une chose rare, on la garde précieusement » De Kock P.

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Dr Pierre Frances, Médecin généraliste, Banyuls-sur-mer (66)

Source : Le Quotidien du médecin