Les conditions de remplacement pendant l'internat vont-elles se durcir ? Les jeunes le redoutent désormais.
L'Intersyndicale nationale des internes (ISNI) a lancé une pétition à succès afin de faire pression sur l'Ordre des médecins, favorable au fait d'accorder l'autorisation de remplacement plus tardivement dans le cursus. Les juniors mobilisés, eux, réclament le maintien des conditions actuelles afin de répondre aux besoins.
1/4 [ Licences de rempla en péril - PÉTITION ]
— ISNI - InterSyndicale Nationale des Internes (@ISNItwit) December 13, 2020
L'ISNI lance une pétition pour condamner avec force la décision unilatérale du @MinSoliSante et @ordre_medecins de décaler la délivrance des licences de remplacement pour les #internes.
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Lobbying
Depuis plus de deux ans, l'Ordre, qui délivre le précieux sésame, les représentants des internes (ISNI et ISNAR-IMG), les enseignants ainsi que les conseils nationaux professionnels (CNP) de spécialité s'attellent à une révision des modalités d'accès au remplacement étudiant. Il s'agit de s'adapter à la réforme du troisième cycle (et aux nouvelles maquettes) et de donner un cadre aux 14 nouveaux DES.
« Un gros travail a été réalisé cette année avec les CNP qui connaissent très bien les formations, explique Gaétan Casanova, président de l'ISNI. Un premier projet de décret reçu le mois dernier était positif, il définissait des conditions différentes de délivrance en fonction des DES. Mais l'Ordre s'y est opposé il y a une dizaine de jours, sans aucune concertation. Nous sommes en colère. »
Après la phase 2
Le régime du remplacement étudiant est défini dans le code de la santé publique. Un interne de médecine générale a le droit de remplacer après trois semestres validés dont un stage chez le praticien de niveau 1. Les autres spécialités doivent attendre en moyenne la validation de cinq semestres (avec des spécificités).
Missionné par le gouvernement en 2019 pour avis sur l'évolution des conditions d'attribution des licences de remplacement, l'Ordre recommande de « fixer comme critère de remplacement la validation de la phase d’approfondissement (phase 2, NDLR) qui correspond à l’acquisition des compétences nécessaires », soit 6 à 8 semestres en fonction des DES. Et pour les internes de médecine générale, il préconise l'attribution de la licence seulement après la validation du stage ambulatoire en soins primaires en autonomie supervisée (SASPAS), soit après le 5e semestre.
Contacté par « Le Quotidien », le Pr Patrice Diot, président de la conférence des doyens, estime lui aussi que la fin de la phase d'approfondissement est pertinente. « On connaît bien les attendus pédagogiques de cette phase 2. Elle permet à l'interne d'acquérir plus de compétences approfondies de sa spécialité, il dispose de sa thèse de médecine et entre en phase 3 ou commence les prises de responsabilités. »
Motivations obscures
Mais pas de quoi convaincre les juniors : plus de 3 000 internes ont déjà signé la pétition en 48 h. Pour l'ISNI, « les motivations obscures du conseil de l’Ordre mettent en danger la bonne prise en charge des malades », peut-on lire. « Lors de la première vague épidémique du COVID-19 de nombreuses réanimations en France ont pu sauver la vie des patients grâce aux internes remplaçants. De nombreux médecins plus âgés ou à risque ont pu maintenir leur cabinet ouvert grâce aux internes remplaçants », ajoute l'Intersyndicale.
Reculer la date de délivrance priverait les patients d'un pool de jeunes médecins disponibles. « Les remplacements sont exercés partout en France, dans toutes les disciplines, dans le public comme dans le privé, pour permettre à la population française de pouvoir accéder à un médecin. C’est une obligation morale, et une obligation de santé publique », enchaîne l'ISNI. D'autant que la réforme du troisième cycle n'a pas bouleversé l'internat. « Il y a eu des changements, comme l'approche par compétences, mais dans le fond nous sommes formés de la même façon, voire mieux », souligne Gaétan Casanova.
Avant de se lancer
Mais tous les internes ne sont pas sur la même ligne. L'Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (ISNAR-IMG) n'est pas partenaire de la pétition et se positionne même en faveur d'une évolution des règles du jeu, expliquant avoir « besoin d'un certain nombre d'enseignements avant de se lancer ». Selon le syndicat, les internes de médecine générale entament certes des démarches de remplacement dès le 3e semestre mais ne l'appliquent réellement sur le terrain qu'après le SASPAS. Quelque 16 000 internes en médecine générale ont obtenu une licence de remplacement entre 2010 et 2018. Environ, 2 900 demandes ont été rédigées dès le troisième semestre.
Une nouvelle réunion au sujet des licences de remplacement est prévue ce mercredi 16 décembre entre les syndicats des jeunes médecins et l'Ordre. Contacté, ce dernier n'a pas souhaité réagir à cette polémique.
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