LE QUOTIDIEN – Avec votre classement, vous pouviez prétendre à n’importe quelle spécialité. Pourquoi la médecine générale ?
JULIETTE LESAINT – J’ai fait médecine dans ce but ! Je me suis interrogée sur le choix d’une autre discipline mais je ne me suis pas reconnue dans les services de spécialité dans lesquels je suis passée en stage. À cause du caractère trop spécialisé de la médecine qu’on y pratique et de l’ambiance du CHU. Au final, j’ai fait 9 stages sur 10 en CHU, et un au CH de Chambéry. Je n’ai pas fait de stage long chez le médecin généraliste, uniquement les 10 demi-journées obligatoires de découverte. J’ai beaucoup hésité pendant ma 6e année entre choisir médecine générale ou médecine interne, la seule autre spécialité transversale qui m’attirait. Mais les sacrifices que cela représentait, la durée de l’internat, les nombreux stages à réaliser en CHU et l’incertitude de trouver un poste d’assistant et de PH m’ont fait renoncer.
Vivez-vous votre choix de la médecine générale comme un acte militant ?
Oui, un peu. Mon parcours m’a blasée de la grosse machine qu’est le CHU, où l’on soigne parfois des pathologies plus que des patients. J’ai longtemps voulu croire qu’on pouvait y exercer la médecine de manière humaine et finalement je pense qu’une fois dans le système, il est difficile de s’en écarter... Je préfère donc prendre une autre voie, on verra bien où elle me mènera. En tout cas, je suis fière d’être la première à avoir opté pour la médecine générale, ce qui veut bien dire que j’ai choisi ce qu’il me fallait !
Seulement 59 internes sur les 1 000 premiers aux ECN se sont tournés vers la médecine générale. Comment expliquez-vous le déficit de reconnaissance de cette spécialité ?
Il a toujours existé. Durant notre formation, nous passons très peu de temps en stage chez le praticien. Nous avons très peu de cours avec des médecins généralistes. Nous passons notre vie au CHU où nous sommes bombardés à longueur de journée de points de vue de spécialistes et où la médecine générale est très peu mise en valeur. Rien n’est fait pour redorer le blason de la médecine générale chez les étudiants, c’est dommage. Une anecdote : j’ai réalisé mon stage de découverte de 10 demi-journées grâce à une généraliste de ma commune qui a gentiment accepté de me prendre en stage. La fac m’avait oubliée dans sa liste. Or, mon année aurait été validée quand même si je n’avais pas souhaité faire ce stage. J’aurais donc pu ne jamais voir un médecin généraliste pendant mes 6 ans de formation !
Quels sont vos projets ? Comptez-vous vous installer à l’issue de votre cursus ou, comme beaucoup de vos confrères, prendre un peu de temps en effectuant des remplacements ?
J’ai choisi médecine générale pour faire ensuite un diplôme complémentaire (DESC) de gériatrie. C’est le compromis qui m’a paru le plus acceptable au vu de mes envies et de mon choix de vie, malgré la formation bien différente qu’aurait pu m’apporter la médecine interne. Je ne sais pas encore quel mode d’exercice je choisirai en tant que gériatre mais j’espère que cette spécialité va se développer en ville, idéalement en centre de santé pluridisciplinaire.
Juliette Lesaint est partie de Grenoble en tandem début septembre avec son compagnon pour rejoindre Athènes en traversant l'Italie et les Balkans. Elle nous a répondu lors d'une halte en Slovénie.
Les MSU, acteurs clés de l’encadrement des docteurs juniors
« L’accès au secteur 2 pour tous, meilleur moyen de préserver la convention », juge la nouvelle présidente de Jeunes Médecins
Jeu concours
Internes et jeunes généralistes, gagnez votre place pour le congrès CMGF 2025 et un abonnement au Quotidien !
« Non à une réforme bâclée » : grève des internes le 29 janvier contre la 4e année de médecine générale