EN DIX ANS de formation, les médecins apprennent à devenir de bons techniciens mais pas des « chefs d’entreprise ». « Au cours de leur cursus, aucune heure n’est consacrée au management, même pour les futurs praticiens qui auront à gérer un cabinet médical, une maison de santé ou un pôle à l’hôpital, déplore Martin Blachier, interne en dernière année de santé publique à Paris. Les médecins qui ont des responsabilités ont dû apprendre sur le tas ».
Le jeune homme a suivi, lui, un master en management et en stratégie en santé à l’ESSEC. À la sortie, il a créé un cabinet de conseil. Depuis plusieurs semaines, il s’active, avec le Dr Jean-Marie Goehrs, un ancien directeur médical de laboratoire, consultant, à fonder une école de management en santé. « L’idée est de former les soignants au management d’équipes, à la gestion de crise, à l’organisation du travail, à l’efficience en santé », explique Martin Blachier.
L’école entend se démarquer des écoles de commerce ou encore de l’École des hautes études en santé publique (EHESP) à Rennes, « qui forme des gestionnaires qui vont diriger des établissements ».
La nouvelle entité proposerait des masters spécialisés aux médecins. Elle s’adresserait aussi aux chefs de projets en santé (biologistes, pharmaciens, infirmiers, cadres de santé...). Sélectionnés après entretien, les internes consacreraient une année supplémentaire à cette formation. Un semestre de stage compatible avec leur DES permettrait de valider le diplôme. Basée à proximité de Paris, l’école pourrait accueillir de 300 à 500 personnes. « Il faudrait que la formation soit le moins cher possible pour les internes, équivalente au coût d’une année universitaire, soit moins de 500 euros, explique Martin Blachier. L’idée est de faire financer cette école par des investisseurs publics (agences, ARS, assurance-maladie) et privés (laboratoires, assurances)».
Impulsion politique.
Les deux hommes ont reçu le soutien de l’Intersyndicat national des internes (ISNI), qui souhaite la formation d’une « nouvelle génération de médecins managers ». Ils ont présenté leur projet à des présidents d’universités, dans les ministères, ont même été reçus par à l’Élysée. « Tout le monde est intéressé mais le projet a du mal à être porté », concède Martin Blachier. « Il manque une impulsion politique forte au plus haut niveau de l’État », déplore le Dr Goehrs.
Nommé professeur associé en 2009 pour monter un DU dans le cadre du plan Alzheimer, Jean-Marie Goehrs souligne que la France est en carence de médecins managers. La création d’une école permettrait d’accélérer la prise de fonctions managériales grâce à la double compétence. « L’objectif serait de faire de cette formation un MD-MBA comme l’ont depuis des décennies nos collègues de l’autre côté de l’Atlantique, explique le Dr Goehrs. Un praticien hospitalier de 35 ou 40 ans pourrait suivre ce type de formation pour donner une autre orientation à sa carrière. »
À l’heure où la loi Fioraso prévoit de renforcer les cursus en anglais, une grande partie de la formation serait dispensée dans la langue de Shakespeare. L’ancien généraliste dit pouvoir compter sur une équipe d’une cinquantaine d’enseignants, qui partagent leur expérience dans la gestion de projets, l’apprentissage des relations sociales, de la comptabilité ou de la gestion. Même si le management n’est pas dans la culture des médecins, il existe une demande forte, affirme le Dr Goehrs. Les promoteurs espèrent profiter des investissements d’avenir pour concrétiser leur projet. Et faire émerger une génération de managers en santé.
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