LES ÉTUDIANTS en médecine sont-ils moins bons, les correcteurs plus sévères ou les conditions d’admission trop draconiennes ? Une épidémie de redoublements a sévi cette année en 3e année de médecine dans plusieurs facultés de l’Hexagone sans que la communauté médicale ne parvienne formellement à identifier l’origine du mal. Chez sa principale victime, la faculté de médecine de Caen, 42 étudiants de 3e année sur les 190 que compte la promotion n’ont pu valider l’intégralité de leurs modules indispensables et seront donc contraints de « repiquer ».
La moyenne exigée dans chaque module.
Cette proportion de redoublants, supérieure à 20 %, est très inhabituelle et les avis divergent sur l’origine de ces résultats désastreux. Pour passer en année supérieure et franchir le cap de la licence, la réglementation n’autorise aucune note inférieure à 10 sur 20 dans quelque module que ce soit. Malgré deux séances de rattrapage, plus d’un étudiant de 3e année caennais sur 5 reste sur le carreau avec l’obligation de refaire une année, parfois pour valider un seul module.
Un peu groggy, les étudiants essaient de comprendre la situation. « Du fait de la réforme des premier et deuxième cycles des études médicales, il y a eu une forte hausse du nombre d’heures de cours et quasi exclusivement des cours magistraux », explique Gaëtan Zarforoushan, élu au conseil d’UFR de Caen. « Selon les candidats, les partiels ont été extrêmement durs cette année », poursuit l’étudiant.
Le numerus clausus en question.
Contacté par « le Quotidien », le doyen de l’UFR Jean-Louis Gérard reconnaît que le nombre de redoublements est « un peu plus élevé que d’habitude » mais il faut selon lui « dégonfler la baudruche » : « ce n’est pas une affaire d’État ».
A ces yeux, la raison de ces échecs est multifactorielle et la réforme des études médicales ne saurait être la seule à mettre sur le banc des accusés. La brutale hausse du numerus clausus enregistrée ces dernières années à Caen (de 93 en 2001 à 193 en 2013 en médecine) est davantage en cause. Tous les candidats reçus n’auraient peut-être pas un niveau optimum. L’investissement des carabins est également pointé du doigt. « Il faut que les étudiants travaillent un peu plus, explique Jean-Louis Gérard. Ce n’est pas parce que l’on a franchi la première année que l’on devient médecin ».
Facs sévères ?
Le doyen souligne que la dernière session de rattrapage devait initialement se dérouler en septembre mais qu’elle a été avancée en juin à la demande des étudiants qui souhaitaient être libérés avant de partir en vacances. Ce délai supplémentaire de révisions n’aurait peut-être pas été superflu.
Si elle est sous les feux des projecteurs, Caen n’est pas la seule faculté touchée par ce taux de redoublement élevé. Plusieurs facultés sont concernées. « Avec la réforme du diplôme de formation générale en sciences médicales (DFGSM), le taux de redoublement a explosé dans un tiers des facs, affirme pour sa part Mathieu Levaillant, président de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF), qui va procéder à une étude des résultats UFR par UFR. « Nous avons du mal à juger si les étudiants ont mal travaillé ou si les facultés ont été trop sévères », reconnaît Mathieu Levaillant.
26 triplants en L2 à Amiens.
À Amiens, le nombre de redoublants en 2e et 3e années est considérable depuis deux ans. Avant la dernière session de rattrapage de septembre, 109 étudiants de 3e année ont été ajournés (54 %) sur les 203 que compte la promotion. En 2e année, le taux d’étudiants au rattrapage atteint les 70 %, affirme Pierre Balla, de la corporation étudiante d’Amiens, qui a lui même triplé sa deuxième année après avoir franchi la P1 du premier coup. « L’an dernier, il y a eu 26 triplants en 2e année et 6 étudiants ont abandonné médecine », poursuit l’étudiant amiénois.
Le Pr Dominique Perrotin, président de la conférence des doyens, a été sensibilisé au problème. « L’impression générale est que les résultats sont un peu moins bons cette année », admet-il. Comme son confrère de Caen, le doyen penche lui aussi pour un abaissement du niveau des étudiants lié à la hausse du numerus clausus. Il souligne par ailleurs que de profondes disparités existent sur le nombre d’enseignants par UFR (le rapport est de 1 à 3), inégalités qui ont pu accentuer les écarts de performance. « Avant, des matières en 2e et 3e années pouvaient se compenser, ce n’est plus le cas », ajoute-t-il. À Tours, la moitié des étudiants de 2e année doit passer les rattrapages de septembre. « C’est effectivement important », concède le Pr Perrotin.
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