« Événement scandaleux », « grand n'importe quoi », « honte »… Les réactions des jeunes pleuvent ces dernières heures après la décision de l'agence régionale de santé (ARS) Île-de-France de relancer toute la procédure de choix de postes pour quelque 490 internes en médecine générale de la région francilienne (pour le semestre d'hiver 2019).
Cet arbitrage a été pris lundi 21 octobre, en début de soirée, à moins de quinze jours du début du semestre d'hiver 2019. Un événement rarissime qui intervient une semaine après le cri d'alarme lancé par une vingtaine de chefs de service de pédiatrie d'Île-de-France redoutant une « crise sanitaire » cet hiver en raison du manque d'internes de médecine générale aux urgences pédiatriques. « À la suite d'ouvertures de postes décidées sans concertation avec les représentants des services de pédiatrie d'Île-de-France, la répartition des internes de médecine générale dans les différents services de pédiatrie de la région s'est faite sans tenir compte des besoins des hôpitaux, notamment ceux les plus éloignés du centre de Paris », alertaient-ils dans un communiqué.
Un vice de forme pour une nouvelle répartition
Interrogé par « Le Monde », Aurélien Rousseau, le directeur général de l'ARS Ile-de-France assume la décision de refaire les choix : « On aurait eu un certain nombre de services d'urgences que nous n'aurions pas pu maintenir cet hiver, on allait vers une crise sanitaire ».
Pour justifier juridiquement sa décision de relancer la procédure, l'agence francilienne invoque « une atteinte au principe d'égalité », un vice de forme qui serait survenu lors de la première procédure de choix. « Un interne avait pu choisir un poste alors qu'il avait d'ores et déjà validé ses six semestres d'internat de médecine générale », affirme l'ARS avant de préciser que « la commission de répartition de médecine générale serait à nouveau convoquée dès ce mardi 22 octobre afin de proposer une nouvelle répartition des postes permettant que les hôpitaux de petite et grande couronne disposent d'un plus grand nombre d'internes en pédiatrie ». Un incroyable pataquès dont Agnès Buzyn, se serait bien passée...
Les internes « pas des pions »
Quoi qu'il en soit, les syndicats d'internes ont exprimé leur exaspération sur les réseaux sociaux. « Les internes ne sont pas des variables d'ajustement du système de santé mais bien des médecins en formation ! », s'offusque l'InterSyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (ISNAR-IMG). La structure demande à être reçue par Ségur pour évoquer cet « événement scandaleux ».
Nous demandons à être reçus de façon urgente au @MinSoliSante afin que de telles aberrations ne se reproduisent pas ! Nous apportons tout notre soutien au @SRPIMG et aux internes d'IDF pour cet évènement scandaleux.
— ISNAR-IMG (@ISNARIMG) October 21, 2019
« Nous sommes en formation, pas des pions ! », tempête aussi l'Intersyndicale nationale des internes (ISNI). Son ex-président, le Dr Jean-Baptiste Bonnet juge que l'argument juridique avancé par l'ARS est un faux prétexte pour répartir autrement les postes après les mauvais calculs initiaux.
Il faut avouer que l’argumentaire juridique d’@ARS_IDF relève du grand n’importe quoi !
— Jean-baptiste Bonnet (@jbb_Desplan) October 21, 2019
Avec des irrégularités de cet ordre on va pouvoir lancer le grand concours : « trouve un truc pour faire sauter les choix »
Le Syndicat national des jeunes médecins généralistes (SNJMG) n'est pas en reste. « Au-delà de la grossière ficelle justifiant l’annulation tant désirée des choix, l’ARS n’hésite pas à afficher son mépris des internes en avouant ouvertement avoir cherché le vice de forme pour obtenir l’annulation et en exposant benoitement son intention de profiter de l’occasion pour corriger largement les erreurs de répartition des internes dans les stages de pédiatrie ! »
Le Dr Jérôme Marty, président de l'Union française pour une médecine libre (UFML Syndicat), n'épargne pas les tutelles sanitaires. « La décision de relancer la procédure de choix pour masquer les responsabilités des politiques dont l’ARS est le relais est une honte », a-t-il tweeté.
Le mépris des internes en médecine générale porte un nom : ARS Ile de France
— DrMartyUFML-S (@Drmartyufml) October 21, 2019
La décision de relancer la procédure de choix pour masquer les responsabilités des politiques dont l’ARS est le relai est une honte
Les internes, avenir de la médecine ne sont ni ses pions ni ses valets https://t.co/QeKNCDHm9O
Buzyn « extrêmement en colère »
Avant que la procédure de choix de postes soit cassée et relancée, Agnès Buzyn au micro de « Public Sénat » s'était dite « assez agacée » face à cette « erreur » des enseignants en médecine générale qui « ont mis trop de postes d'internes dans le centre de Paris et pas assez dans la couronne ».
Dans un premier temps, l'ARS avait fait le choix d'offrir une prime de... 500 euros par mois aux internes qui acceptaient de se réorienter vers la grande couronne plutôt qu'à Paris intra-muros. Une hypothèse coûteuse qui a mis la ministre de la Santé « extrêmement en colère ». « Il y a des responsables et je demanderai des explications parce que franchement, nous mettre dans l'embarras alors que les urgences sont tellement en difficulté et que la pédiatrie manque de professionnels, ça tombe particulièrement mal », s'est exaspérée la locataire de Ségur.
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