Les jeunes ne veulent plus s’installer, ne vont pas là où il faudrait et on devrait leur forcer la main. Face à la crise de la démographie médicale, les jeunes et futurs médecins sont parfois accusés de tous les maux au point d’être considérés par certains élus comme des « ingrats corporatistes ». En pleine campagne des municipales et pour couper l'herbe sous le pied d'élus qui auraient des velléités de coercition, le syndicat des internes en médecine générale, l'Isnar-IMG, dégaine une enquête nationale pour tordre le cou à ses idées reçues. Dans le cadre d’un travail de thèse de deux internes de médecine générale de Toulouse, un questionnaire a permis de mesurer l’impact du diplôme d’études spécialisées de médecine générale sur l’installation des jeunes généralistes. L’Isnar-IMG a pu analyser les réponses de 1 448 IMG non thésés et 1 008 anciens IMG thésés des promotions entre 2010 et 2014.
Plébiscite pour le libéral
Premier constat, les futurs médecins ne sont pas réfractaires à l’installation. Plus de 80 % d’entre eux (82 % des IMG en dernière année, 83 % des non thésés) envisagent une installation en médecine générale et en ambulatoire, et 36 % prévoyaient de le faire dans les trois ans qui suivent la fin de leur internat. La plupart de ceux qui ne se voyaient pas ou pas encore installés en ambulatoire s'imaginaient davantage dans un exercice hospitalier exclusif (45 %) et 28 % souhaitaient d'abord passer par la case remplacement.
Les lieux d’installation envisagés démontrent aussi que les généralistes de demain ne sont pas allergiques à l’exercice en zone rurale. 20 % souhaitent y construire leur projet d’installation, c’est plus que ceux qui se voient en zone urbaine (17 %), mais l’option qui rencontre le plus de suffrages est l’exercice en zone semi-rurale (63 %). Concernant le type d’exercice, sans surprise, c’est un véritable plébiscite pour l’exercice groupé (95 %), en cabinet de groupe (54 %) et en MSP (41 %). Et contrairement aux idées reçues, la nouvelle génération ne jure pas que par le salariat puisque deux tiers de ceux qui ont un projet d’installation, penchent pour un exercice libéral exclusif (66 %) et 32 % pour un exercice mixte. Seuls 2 % sont attirés par le salariat exclusif.
Une découverte souvent bénéfique
Le grand enseignement de l’enquête est la mesure de l’impact des stages en ambulatoire sur les projets d’installation des futurs médecins. Si l’on considère tous les stages ambulatoires qui peuvent être réalisés au cours du DES, le taux de projet d’installation augmente en fonction du nombre de stages réalisés. Il varie de 69 % chez ceux qui avaient réalisé un seul stage à 89 % chez ceux en ayant réalisé trois. L’enquête montre une différence significative sur le délai du projet d’installation également. 29 % des répondants ayant réalisé un stage ambulatoire et souhaitant s’installer envisageaient de le faire dans les trois ans suivant le DES contre 42 % chez ceux qui en avaient réalisé trois.
Le stage en autonomie supervisé (Saspas), réalisé en moyenne par 65 % des IMG de l’enquête, a également un impact important sur l'installation. 89 % des répondants ayant effectué un Saspas au cours de leur cursus avaient un projet et pour 33 % l’installation était voulue dans les trois ans suivant la fin de l'internat. À l’inverse, seulement 69 % de ceux qui n’avaient pas fait de Saspas avaient un projet dont 21 % dans les trois ans. Sans surprise, les zones de stages et les types de structures dans lesquelles ils ont été effectués influencent aussi le projet d’installation. Par exemple 86 % des IMG qui avaient effectué trois stages en zone rurale avaient l’intention de s’y installer. « Cette enquête montre bien qu'au lieu de solutions miracles, il faut faire confiance à la formation. Elle va donner envie naturellement aux internes d'aller exercer dans ces territoires », souligne Marianne Cinot, présidente de l'Isnar-IMG.
Des stages accélérateurs d'installation
Au-delà des projets, l’enquête montre que parmi ceux qui ont effectivement suivi un stage au cours de leur DES, 26 % se sont installés, contre 43 % chez ceux en ayant suivi quatre. Dans le détail, le Saspas joue un rôle, les non installés étant plus nombreux (34 % contre 23 %) à ne pas avoir réalisé un stage en autonomie. Les stages en ambulatoire permettent aussi de réduire le délai d’installation. Et plus ils sont nombreux, mieux c’est. Parmi les installés, 53 % de ceux qui ont effectué plus de deux stages en ambulatoire se sont installés dans un délai inférieur à 14 mois, contre 37 % pour ceux qui en ont fait un ou deux. Faire découvrir aux IMG les territoires permet aussi de faire naître leur envie d’y exercer. En effet les IMG qui n’ont pas fait de stage en zone rurale sont peu (7 %) à s’y être installés, une proportion qui grimpe à 39 % après un stage dans ces territoires, et 43 % après deux stages. Une observation qui reste vraie pour n’importe quelle zone d’exercice.
« Les étudiants arrivent. Il n'y a pas de solution immédiate mais un faisceau de solutions à moyen terme », explique Marianne Cinot qui encourage notamment les élus locaux à faire découvrir leurs territoires aux étudiants et à encourager les médecins à devenir maîtres de stage. Au-delà des solutions déjà en place, l'Isnar-IMG appelle à continuer à développer le recrutement des maîtres de stage dans tous les territoires: « pour que les IMG qui ont un projet professionnel puissent le développer ». Elle demande aussi davantage de cours dans la formation universitaire sur la gestion administrative du cabinet, les démarches à l'installation. Enfin, pour continuer à développer l'offre de stages en ambulatoire, l'intersyndicale suggère de permettre aux IMG de se former auprès des sages-femmes libérales pour le stage santé de la femme. « Cela nous permettra de nous former à une pratique qui se rapproche davantage de ce que l'on pourra faire en tant que médecins généralistes que celle que l'on voit en gynécologie à l'hôpital », souligne Charlotte Bozec, première vice-présidente de l'Isnar-IMG.
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