Comment l’initiative Rimèd a-t-elle pu voir le jour ?
ÉLODIE ANNE-AVELINE : Tout part d’un appel à manifestation d'intérêt publié en 2023 par l’agence régionale de santé, et remporté par l'association Alé Viré, pour soutenir l’accompagnement de projets novateurs ou d’autres initiatives visant à offrir aux médecins souhaitant s’installer en Martinique des services de qualité. Objectif : renforcer l’offre de soins du territoire, confronté à une démographie médicale déclinante, sur des densités déjà inférieures à la moyenne nationale [la Martinique compte 54,7 médecins spécialistes pour 100 000 habitants, versus 85,4 dans l’Hexagone, d’après les derniers chiffres de l’Institut statistique des professionnels de santé libéraux, NDLR].
C’est un dispositif innovant, puisqu'il s'agit de la première conciergerie des Outre-mer dans le domaine de la santé et intégralement financé par l'ARS. L’association a ainsi pu bénéficier d'une enveloppe budget allouée au développement de la conciergerie, répartie principalement sur trois grands projets que sont : la conciergerie physique, la conciergerie digitale, mais aussi le Guide Rimèd, projet déjà abouti, disponible en téléchargement sur le site conciergerierimed.com. C’est vraiment la bible de toutes les démarches que devront entamer les professionnels, qui offre une présentation des offres et services proposés en conciergerie, une valorisation du territoire et une boîte à outils avec toutes les astuces et contacts utiles pour effectuer les démarches.
Quelle est la réalité du terrain sur l’île ?
Du fait de la baisse de natalité, nous sommes le département le plus « vieux » de France. Le besoin en gériatre est important. Nous avons aussi des pathologies très spécifiques au territoire, notamment le diabète, les maladies cardiovasculaires et les affections rénales chroniques. C'est vrai que ce sont des spécialités assez importantes à avoir. Il y a également le zonage à prendre en compte. Pour autant, il n'y a aucune sélection au niveau des métiers. Quand on sait qu'il peut y avoir un an d'attente pour un rendez-vous en gynécologie, ophtalmologie ou ORL… Il y a des spécialités pour lesquelles il est assez compliqué de trouver un simple rendez-vous de consultation. Aussi, spécialistes ou généralistes, le besoin est quasiment le même.
De quelles natures sont les accompagnements ?
Il faut dire, déjà, que notre offre de services a été pensée aussi bien pour les étudiants hospitaliers et internes de médecine, en établissement ou en libéral, que pour les médecins hospitaliers et médecins libéraux. On parle d’un accompagnement aussi bien sur le plan professionnel que personnel, pouvant améliorer leurs conditions d’implantation, donc de la définition de leur projet jusqu’à leur prise de fonction (inscription à l'Ordre des médecins, obtention de la carte de professionnel de santé (CPS), aide au déménagement, inscription des enfants à l’école, etc.). Cela passe notamment par de la mise en relation avec les structures en capacité de les aider. Par exemple, souvent, ils rencontrent des difficultés à obtenir leur CPS ; étant donné que nous avons les bons contacts sur le réseau, la procédure peut être relancée, réactivée et finalisée en un appel.
Nous accompagnons également dans la recherche d’un cabinet médical, un espace de consultation ou tout autre type de local en lien avec nos partenaires immobiliers. Nous accompagnons dans l’analyse des besoins, l’établissement d’un budget, la recherche d’emplacement, jusqu’au conseil sur l’aménagement de l’espace.
Jusqu’à 100 000 euros peuvent être débloqués en moins de 24 heures par notre partenaire bancaire pour le financement de matériel médical, du local…
Qu’avez-vous réussi à mettre en place avec vos partenaires ?
Il est important de préciser que ces partenariats sont non exclusifs. L’ARS, en tant qu’institution, souhaite travailler avec le plus grand nombre d’entités. Pour cette première année, il a évidemment fallu assurer un réseau solide pour guider les candidats à l’installation. Et nous avons pu négocier avec ces partenariats un délai raisonnable. Tous s'engagent à répondre rapidement aux professionnels de santé. De même du côté du pôle mobilité, nous avons négocié des codes promotionnels pour avoir un tarif préférentiel sur la location de véhicule. Au niveau du déménagement, également, on peut avoir cet avantage. Il y a aussi une partie financière. Jusqu’à 100 000 euros peuvent être débloqués en moins de 24 heures par notre partenaire bancaire pour le financement de matériel médical, du local… sous forme de crédit, avec des facilités à taux zéro, des taux avantageux. Concernant les mobilités en famille, pour le conjoint qui ne travaille pas forcément dans le domaine médical, nous sommes en réseau avec France Travail et des cabinets de recrutement. Pour la garde d’enfant en bas âge, nous avons obtenu une place en crèche réservée avec notre partenaire, celui-ci disposant d’établissements situés un peu partout en Martinique.
Quel bilan dressez-vous un an après ce lancement, et quels sont vos objectifs ?
Positif ! Sur tous les professionnels que nous avons accompagnés – ils sont aujourd’hui au nombre de 195, contre 141 à date anniversaire du lancement –, la grande majorité (92 %) ont vu leurs démarches administratives solutionnées et abouties en moins de deux mois. Sur cette population, 54 % sont médecins ; le reste concerne les professions paramédicales, avec par exemple 22 % d’infirmiers. Si le dispositif était prévu pour une année d’expérimentation, il a été reconduit pour deux années supplémentaires. Et en 2025, nous souhaitons pouvoir doubler le chiffre de l'année 2024.
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