Ces derniers temps, je me pose beaucoup de questions en rapport avec l’actualité qui a trait à notre spécialité. Je me demande si, dans dix ans, les médecins généralistes tels que nous les connaissons aujourd’hui existeront toujours. De quoi notre avenir sera-t-il fait ?
Comme la plupart de mes co-internes (sinon quasiment tou·te·s), je suis inquiète. Je scrute les débats qui agitent internet à propos de la prochaine convention avec la Cnam et de l’échec cuisant des négociations (les propositions faites confinent à l’insulte), je lis les différentes polémiques autour des infirmièr·e·s en pratique avancée, j’écoute le point de vue des patient·e·s… et je déplore le fait que tout se cristallise autour de la majoration du tarif de la consultation. C’est en réalité bien plus complexe…
À lire mes consœurs et confrères, un réel malaise ébranle notre profession. Le médecin de famille est-il appelé à disparaître ? Quelles évolutions allons-nous devoir faire, et cela se fera-t-il de façon contrainte et forcée ? Quelle place pour notre liberté, après tant d’années parfois si difficiles, dans un contexte où nous sommes abreuvé·e·s de coercitions (notamment à l’installation) ? Encore une fois, les internes naviguent à vue. Et le cap de novembre 2023 comme début d’une nouvelle vie semble bien incertain. Certain·e·s envisagent déjà une reconversion, d’autres regardent si l’herbe n’est pas plus verte ailleurs…
La situation était déjà difficilement tenable, avec toujours moins de moyens pour soigner toujours plus de personnes, et une politique de santé publique parfois aberrante et souvent aux abonnés absents (cf. la tribune de L’Express du 5 janvier 2023, signée par 200 médecins généralistes, qui liste sept propositions afin de redonner du temps médical dans cette période de désertification). Nous, en tant que jeune génération, sommes tenus responsable de cette pénurie médicale alors qu’il s’agit du résultat de choix politiques parfois faits bien avant que nous entrions à la faculté de médecine !
Il paraît que nous avons le titre de « spécialiste » en médecine générale. Fort bien, je suis ravie de pouvoir inscrire à l’avenir ce titre sur mes ordonnanciers. En revanche, je me demande pourquoi ma consultation a une valeur pécuniaire moindre que pour celle d’un autre spécialiste, par exemple en cardiologie ou en endocrinologie. Nous sommes pourtant un maillon essentiel du réseau de soins, nous avons – à mon humble avis – des compétences qui nous sont propres, dont ne disposent pas les autres spécialités. En tant que généralistes, nous sommes à l’avant-garde de la prévention en santé publique, nous pouvons faire du repérage précoce dans certaines pathologies, faire du suivi sur le long terme (et bien souvent à travers plusieurs générations !), coordonner les différent·e·s spécialistes participant aux soins, participer aux dépistages systématiques, faire partie de réseaux de veille épidémiologiques (réseau Sentinelles par exemple)… En somme, tout ce qui contribue à l’état de santé global de la population. Et comme le dit si bien l’Organisation mondiale de la santé : « La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ».
Alors, qu’attendons-nous encore pour prendre en main notre destinée et nous rendre compte du potentiel inestimable de notre spécialité si atypique ?
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