Les Français ont tout essayé, la droite, la gauche, un flirt non décisif avec l'extrême droite, l'alternative offerte par la République en marche et son « en même temps », rien n'y a fait. Ils sont toujours déçus. Les voilà qui, désespérément, tentent de se raccrocher à un parti susceptible de combler leurs vœux tout en apportant une autre façon de voir la vie : les écologistes. Lesquels ont le vent en poupe et parfois, triomphent avant l'heure, comme on a pu le constater avec les déclarations de leur chef de file, Yannick Jadot, qui n'a jamais douté qu'il serait président en 2022. Toute analyste politique a le droit de souligner un excès de confiance. Il faut néanmoins reconnaître que les propos de M. Jadot reposent maintenant sur son succès au premier tour des municipales, qui sera confirmé par le second.
De sorte que ceux qui menacent la macronie, ce n'est pas la droite Les Républicains, qui se contentera sans doute de conforter ses positions municipales, pas la gauche non plus qui n'est pas sortie de son apathie, pas l'extrême droite ni l'extrême gauche. C'est le parti écologiste les Verts. Ils ne sont pas tous des perdreaux de l'année, de sorte qu'ils savent se mouvoir dans le champ politique, passer quelques-unes de ces alliances scélérates que favorisent les campagnes des municipales. Toujours verts mais prêts désormais à conquérir le pouvoir en concluant avec d'autres partis des accords au cœur desquels ils risquent de perdre un peu de leur substance idéologique. C'est de bonne guerre, ils font ce que tout le monde fait, y compris la République en marche qui, souvent incapable de mener seule la lutte, s'associe tantôt avec la droite, tantôt avec la gauche et tente d'être partout par procuration mais sans créer ses propres bastions.
Daniel Cohn-Bendit, récemment, a regretté que la macronie ne s'allie pas plus souvent avec les Verts. Il semble oublier que ce n'est pas facile dans un contexte où le discours écologique s'est considérablement radicalisé au point de rejoindre celui de l'extrême gauche. M. Jadot est sûr de lui, mais Julien Bayou, le chef d'EELV, a prononcé contre le parti présidentiel des propos qu'un Mélenchon aurait pu revendiquer. L'un des reproches que l'on adresse le plus souvent à Emmanuel Macron, c'est sa dérive droitière, qui certes est contenue dans son action réformatrice mais résulte aussi, il ne faut pas l'oublier, des attaques excessives que lui lancent sans répit la gauche et l'extrême gauche avec d'autant plus d'outrance qu'elles n'ont pas la moindre chance de lui succéder.
Un sondage édifiant
M. Jadot a raison sur au moins un point, il représente une alternative dans un pays qui a usé la droite, la gauche et le macronisme. Il peut faire un score éblouissant aux municipales, il a encore beaucoup de chemin à faire pour conquérir le pouvoir. Un sondage Ifop-Fiducial paru lundi dernier montre que, dans la tête des Français, rien n'a vraiment changé depuis 2017. Au premier tour, Marine Le Pen et Emmanuel Macron seraient au coude-à-coude à 28 % (nette amélioration des scores qu'ils ont faits en 2017). M. Jadot obtiendrait 8 % des suffrages, ce qui signifie qu'il doit tripler son score pour franchir le cap du premier tour. M. Baroin (LR) recueillerait 12 % des voix, comme Xavier Bertrand (ex-LR). Au second tour : 55 % pour Macron, 45 % pour Le Pen. Intéressant sondage qui indique qu'en 2027, Mme Le Pen pourrait être élue président, puisqu'elle gagne 12 points en cinq ans. Et que la personnalité des candidats de la droite n'influe pas sur le résultat, ils sont largués par le duo infernal Macron-Le Pen, celui-là même que tous les partis rejettent en espérant, mais en vain, parvenir au second tour.
Des réformes explosives, une épidémie grave qui a ruiné notre économie, une situation internationale pleine de dangers et nous en sommes restés à l'implacable configuration de 2002, avec un Le Pen toujours dans la course. Que doit faire un républicain et démocrate sinon priver Marine Le Pen de son vote ?