Il ne s'agit pas d'un simple épisode de la bataille contre le djihad. L'affaire a éclaté comme un coup de tonnerre au moment où le pouvoir s'engage dans de nouvelles réformes, comme celle des retraites, qui est très largement contestée et où Emmanuel Macron tente de donner une nouvelle orientation à sa politique d'immigration. Sujet brûlant qui mobilise les catholiques, la législation sur la PMA s'ajoute à plusieurs motifs de mécontentement. Si la crise des gilets jaunes semble s'apaiser, principalement parce que le Premier ministre et son équipe ont augmenté les dépenses sociales au détriment d'un équilibre budgétaire qui apparaissait pourtant comme leur principal objectif, un doute largement partagé par l'opinion a remplacé les revendications sociales ordinaires. D'une certaine manière, le pouvoir n'étant ni de droite ni de gauche, les Français s'interrogent sur le lieu de destination vers lequel il les conduit.
Trop de réformes tueront-elles la réforme ? La question est en tout cas posée à la fois sur la nécessité et le contenu des projets annoncés. En somme, les initiatives de droite inquiètent la gauche, et les initiatives de gauche alarment la droite. La PMA pour tous a donné lieu, le week end dernier, à une démonstration à la fois pacifique et efficace, preuve que le projet est loin de faire consensus. Il est donc licite de se demander si le sujet ne pouvait pas attendre : pressé comme il l'est de noyer les électeurs dans de multiples réflexions sur ce qui les attend, le gouvernement lui-même n'est pas absolument certain de ce qu'il veut. La réforme des retraites sera moins profonde que ce qui a été promis, car le président ne veut pas lui sacrifier les municipales.
Immigration et islam
Il a cru bon d'ouvrir un débat sans vote sur l'immigration, mais déjà ce débat était dépassé par l'attentat de la préfecture. L'auteur du quadruple crime était un Martiniquais. La vraie question, en conséquence, ne porte plus sur la qualité des immigrés que nous consentons à accueillir sur le territoire, mais sur l'influence qu'exercent les mosquées salafistes non seulement au sein de la population musulmane mais chez les convertis.
M. Macron, par ailleurs, souhaite mettre fin au laxisme en matière d'asile et d'accueil. Fort bien. Mais il sait qu'il faut tout refaire à l'échelle européenne et non pas à l'échelle nationale : les accords de Schengen, le traité de Dublin et diverses dispositions qui ne sont plus adaptées à la situation. Il est notamment inacceptable que l'immigration augmente en France alors qu'elle diminue dans le reste de l'Europe. Ce n'est pas en réduisant l'aide médicale d'État qu'il règlera le problème.
En outre, le pouvoir est le seul comptable des attentats. À lui de les empêcher, à lui d'en gérer les conséquences politiques quand ils se produisent. M. Castaner a reconnu des « failles » dans le dispositif de sécurité à la préfecture de Paris, mais sommé de démissionner par la droite et par l'extrême droite, il a refusé.
Cette fois, il aurait dû envisager de partir, parce que la coupe est pleine et parce qu'un attentat contre ceux qui assurent notre sécurité est à la fois une défaite française et une victoire du djihadisme, qu'il soit organisé ou individuel. Cette fois, l'accablante loghorrée déversée sur M. Castaner par les Républicains et par les Lepénistes (qui parlent de scandale d'État) reflète largement le sentiment de l'opinion. On n'a pas manqué, dans les occasions précédentes, de faire le tri entre la consternation sincère et l'opportunisme électoral des déclarations de ce genre. Mais, dans les vingt-quatre heures qui ont suivi l'attentat, le discours officiel, qui se voulait rassurant, relevait du lavage de cerveau. La carrière du ministre de l'Intérieur est moins importante que la crédibilité du gouvernement.