Qu’il soit lui-même coureur ou qu’il participe à l’encadrement médical de la course, depuis 12 ans le Dr Philippe Igigabel n’a pas manqué une seule édition du Marathon des Sables. Et n’eut été le Covid, ce généraliste de 66 ans était prêt cette année encore à s’aligner sur la ligne départ.
De son propre aveu, il n’a pourtant pas toujours eu le sport chevillé au corps. Basketteur pendant ses années universitaires, il a rapidement remisé le ballon au placard pour fonder une famille et se consacrer à son cabinet de Tiercé (à une vingtaine de kilomètres d’Angers), où il a exercé en groupe pendant plus de 36 ans.
Du basket au trail
« À cette époque j’ai levé le pied sur le sport collectif et je me contentais de trottiner un peu le week-end », se souvient-il. Mais à l’âge de 50 ans le coureur du dimanche se met en tête de faire son premier marathon et s’inscrit à celui de Paris avec un ami. À partir de là la machine est lancée et les défis se multiplient. Les 100 km succèdent aux marathons puis cèdent la place à des ultratrails « de plus en plus longs ». C’est en 2008, qu’il s’inscrit pour la première fois au Marathon des Sables. Avec ses 7 jours de course en autonomie dans le Sahara marocain, ce trail de près 250 km compte parmi les épreuves mythiques pour les aficionados.
Le Dr Igigabel ne sera pas déçu. Malgré les difficultés, les températures qui oscillent entre 30 et 50 degrés, le sac à dos qui flirte avec les 10 kg, etc. il est conquis par l’esprit d’aventure, d’amitié et de solidarité qui prévalent tout au long de la course. Il apprécie aussi la confrontation avec l’effort au long cours qui l’oblige à optimiser la gestion de sa fatigue, son hydratation, son alimentation, sa consommation de sel, etc. À ce titre, « le fait d’être médecin est certainement un petit plus, concède-t-il, mais cela ne fait pas tout ».
Parti initialement pour tenter l’expérience une fois dans sa vie, il va finalement enchaîner quatre éditions successives puis récidive à nouveau en 2018. « On devient facilement accro aux marathons des sables », reconnait-il.
De l’autre côté de la barrière avec les DocTrotters
Même s’il participe en amateur, la préparation de chaque course est exigeante et lui demande de jongler entre l’entraînement, la vie personnelle et son activité de médecin en milieu semi-rural. Mais en retour, l’expérience va lui apporter beaucoup y compris pour sa pratique de généraliste. « Cela m’a notamment aidé à mieux appréhender ma charge de travail au cabinet en m’apprenant à fractionner la difficulté. Lorsque l’on part sur des courses de ce type on ne se projette pas vers l’arrivée mais vers le prochain ravitaillement ou le prochain check point, un kilomètre après l’autre. C’est un peu la même chose lors d’une grosse journée de consultation : un patient après l’autre… ».
Sa connaissance des courses de l’extrême va aussi lui permettre des échanges "d’initiés" avec certains de ses patients qui partagent la même passion.
Fort de son expérience de terrain, il rejoint par ailleurs en 2012 les rangs de DocTrotter, la société qui assure l’assistance médicale du Marathon des sables. Médecins, infirmiers, podologues, etc. au total plusieurs dizaines de "Doc" sécurisent la course, gèrent les urgences, pansent les plaies et réconfortent les participants. L’occasion pour le Dr Igigabel de participer à nouveau à l’aventure mais en passant « de l’autre côté de la barrière ».
S’il doit parfois faire face à de véritables urgences, - depuis sa première participation, le Dr Igigabel a déjà été confronté à plusieurs arrêts cardio-vasculaires -, ce sont surtout les soins des pieds, «martyrisés par le sable et la chaleur », qui occupent une bonne partie de son activité de DocTrotter. « On gère aussi des coups de chaleur, des déshydratations et des fractures... de moral ».
Le Dr Igigabel se souvient notamment d’un coureur anglais qui, épuisé, voulait laisser tomber à quelques kilomètres seulement de la fin de l’étape du jour. « Après avoir essayé pendant une demi-heure de le convaincre j’ai fini par lui demander ce que ses parents penseraient de lui s’il abandonnait. Derrière ses lunettes j’ai vu des larmes couler mais il est reparti. C’était peut-être un peu dur sur le moment mais cela a fonctionné et il m’a remercié à l’arrivée deux jours plus tard ».
Car sur le Marathon des Sables, « tous les concurrents viennent pour finir ». A postériori beaucoup se demandent aussi comment ils ont fait pour y parvenir, sans que cela ne les dissuade pour autant de recommencer. « Tous les ans, il y a environ 30% de récidivistes », précise le Dr Igigabel qui sera lui-même au rendez-vous en avril prochain, côté coureurs cette fois-ci.
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