Un pas en avant, un pas en arrière et à peine votée, déjà suspendue. La ministre du Commerce et des PME Véronique Louwagie a reçu dès ce vendredi cinq organisations professionnelles après la suspension par Bercy de la baisse du seuil d'exemption de la TVA qui était initialement prévue dans le budget 2025. La concertation devrait se poursuivre « jusqu'à la fin février ».
Cette réforme très controversée inscrite dans le projet de loi de finances (article 10), consiste à abaisser le plafond de franchise de TVA de 37 500 à 25 000 euros dès le mois de mars. Plus précisément, elle prévoit de diminuer à 25 000 euros de chiffre d'affaires annuel le seuil en deçà duquel les microentreprises ne sont pas assujetties à la TVA, au lieu de 37 500 euros actuellement pour les prestations de services et 85 000 euros pour les activités de commerce. Une disposition qui concerne des centaines de milliers d’entrepreneurs.
À peine votée, la réforme avait provoqué un énorme tir de barrage des professions indépendantes, qui réclamaient un moratoire et une concertation d’urgence. Le gouvernement a donc accepté de retravailler son projet pendant quelques semaines, même s’il ne s’agit pas d’une abrogation.
Les contrats de collaboration concernés
Pour rappel, Bercy justifie l’abaissement du seuil de franchise en base de TVA par la nécessité de réduire « les distorsions de concurrence » entre professionnels qui exercent en franchise de TVA et ceux qui y sont soumis, soit parce qu’ils sont en dessus des seuils, soit parce qu’ils ont renoncé au régime de franchises.
Si les activités de soins (effectuées dans le cadre de l'exercice des professions médicales et paramédicales réglementées) ne sont pas concernées, les libéraux de santé sont tout de même impactés par cette réforme par ricochet. Selon MG France, « si rien n'est fait tous les médecins qui ont par exemple un collaborateur et auront perçu plus de 25 000 euros en 2025 seront assujettis à la TVA de 20 % sur ces sommes ». De quoi faire « capoter la plupart des contrats de collaboration » dont les généralistes ont souvent grand besoin, alertait jeudi le syndicat de généralistes. Seraient aussi incluses dans ces 25 000 euros « les indemnités URPS, ordinales, syndicales ou versées par une communauté professionnelle territoriale de santé ».
Modèle fragilisé
Avant de saluer le rétropédalage du gouvernement, l’Union nationale des professions libérales (Unapl, où figurent plusieurs syndicats de médecins) avait fait valoir de son côté que l’abaissement « brutal » du seuil de franchise de TVA aurait « des effets désastreux » pour les entrepreneurs libéraux, « en particulier ceux qui se lancent dans l’activité, les microentreprises, les professionnels exerçant à temps partiel et ceux exerçant en contrat de collaboration ».
Le vice-président santé de l’Unapl, François Blanchecotte, ne cache pas son inquiétude. « On pensait au départ que seuls les autoentrepreneurs étaient visés mais la mise en place d’un seuil unique concernerait beaucoup de professionnels médicaux et paramédicaux en risquant de fragiliser leur modèle économique ». Pour les médecins en contrat de collaboration, « le plafond de 25 000 euros serait vite dépassé pour les praticiens de secteur 2 », ajoute celui qui est aussi président du Syndicat des biologistes (SDB).
La Dr Sophie Bauer, présidente du Syndicat des médecins libéraux (SML), imagine un autre cas de figure pénalisant pour la profession si la réforme était adoptée, celui de « médecins en fin de carrière et qui veulent ralentir leur activité en prenant des collaborateurs libéraux ». « De quoi les faire déplaquer plus vite », tonne la chirurgienne.
En attendant l’issue de la concertation, l’Unapl réclame ce vendredi « la réalisation d’une étude d’impact approfondie avant toute réforme de la fiscalité applicable aux TPE et aux travailleurs indépendants ».
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