Poursuivie par sa CPAM, une généraliste rouvre son cabinet grâce au soutien de ses patients

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Publié le 09/05/2019
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Crédit photo : GARO/PHANIE

Convoquée fin mars par la CPAM des Côtes-d’Armor, pour un taux de prescriptions « atypique » d'arrêts maladie supérieur à la moyenne locale, le Dr Claire Bigorgne avait fermé les portes de son cabinet, dégoûtée par ce rendez-vous. La caisse lui reprochait précisément « une part d'indemnités journalières en accidents de travail supérieure à la moyenne des médecins du secteur et des arrêts maladie de plus de 45 jours ».

Dans la foulée, les patients de la généraliste de Kermaria-Sulard s’étaient mobilisés. Le 31 mars, près de 200 d’entre eux s‘étaient retrouvés sur la place du village afin de soutenir leur médecin. Plusieurs pétitions avaient également été lancées et totalisaient début mai près de 1 700 signatures.

Après 10 jours d’arrêt, elle rouvre son cabinet

Devant cette mobilisation, le Dr Bigorgne a décidé de retourner à son cabinet, après 10 jours d’arrêt. « Quand tous vos patients sont derrière vous, vous disent que vous n’avez rien fait de mal, que vous êtes un bon médecin et qu’il faut que vous reveniez car ils ont besoin de vous, vous n’avez pas le choix », confie-t-elle. La généraliste se montre très reconnaissante envers ses patients. « Ce qu’on ressent face à un tel soutien est indescriptible, dit le Dr Bigorgne. Finalement, la CPAM n’est pas sur le terrain mais mes patients le sont, avec moi. Il n’y a que ça qui compte. »

Toutefois, la généraliste explique ne pas reprendre avec « le même cœur » car cette réunion à la caisse primaire a « cassé quelque chose ». « Mais pour vos patients, vous avancez », explique le Dr Bigorgne.

« Il va falloir que la CPAM me fiche la paix »

Début avril, Claire Bigorgne confiait au « Quotidien du médecin » s’interroger sur la poursuite d'un exercice libéral. « Pour l’instant ce n’est plus le cas, affirme-t-elle. Mais il va falloir que la CPAM me fiche la paix. Parce que si je dois y retourner tous les trois mois car j’ai prescrit trop de ci pas assez de ça, je vais m’épuiser et en avoir ras le bol, comme beaucoup de mes confrères. »

Devant la mobilisation des patients et la résonance médiatique suscitées par la fermeture provisoire de son cabinet, la CPAM des Côtes-d’Armor semble avoir légèrement reculé. Alors que le rendez-vous de fin mars avait tout d’une mise sous objectif selon le Dr Bigorgne, la caisse l’a requalifié en entretien préalable avant mise sous objectif. « Si les papiers avaient été prêts ce jour-là, j’aurais dû les signer », assure pourtant la généraliste.

Sonnée, le Dr Bigorgne avait sollicité l'aide du « Collectif médical 22 », qui réunit des confrères dénonçant le nombre croissant de convocations de médecins par la CPAM des Côtes-d'Armor pour « délits statistiques » depuis quelques mois.

« A priori, il n'y a aucun recours possible, confie-t-elle. La caisse est toute-puissante même si elle n'est ni mon employeur, ni mon patron ! » Le taux de prescription d'IJ du Dr Bigorgne doit désormais rentrer dans la norme régionale d’ici à septembre. Sinon elle sera mise sous objectif avec une sanction financière à la clé.

D'ici peu, les différentes pétitions de soutien au Dr Bigorgne seront envoyées au ministère de la Santé et à l'Assurance maladie.


Source : lequotidiendumedecin.fr