Service d'accès aux soins, c'est flou : les généralistes fixent leurs lignes rouges avant les expérimentations

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Publié le 31/08/2020
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Crédit photo : PHANIE

Annoncée à l'issue du Ségur de la santé, l'expérimentation du futur service d'accès aux soins (SAS), plateforme promise par Agnès Buzyn pour réguler en amont les appels des Français, sera lancée début 2021. Le déploiement de ce dispositif devra s'appuyer sur une régulation médicale téléphonique accessible par une porte d'entrée unique et une plateforme numérique, selon une instruction détaillée de la DGOS (Direction générale de l'offre de soins, ministère de la Santé).

L'organisation du SAS reposera sur un front office, chargé du premier tri et de l'orientation de l'appel, et un back-office, correspondant au traitement de l'appel par la filière adaptée. Elle s'appuie sur des protocoles, élaborés conjointement par les médecins hospitaliers et de ville. Mais avant de généraliser, des territoires préfigurateurs du SAS seront identifiés à l'automne pour tester des organisations mixtes ville/hôpital.

Ne pas casser la PDS qui fonctionne

Voilà pour le cadre, reste à fixer les modalités. Et c'est là que pointent déjà les inquiétudes des praticiens libéraux, concernés au premier chef puisqu'ils s'engageront dans la réponse aux demandes de soins non programmés dans la journée.  

Les quatre syndicats représentatifs des médecins généralistes (MG France, Les Généralistes-CSMF, SML et FMF) alertent les agences régionales de santé (ARS) sur plusieurs points qui conditionnent à leurs yeux le succès de l'expérimentation.

Primo, le SAS devra s'articuler avec la permanence des soins ambulatoires (PDS-A) qui fonctionne en soirée et le week-end aux heures de fermeture des cabinets. Or, selon le Dr Jacques Battistoni, président de MG France, l'instruction de la DGOS « mélange » la PDS-A des libéraux (organisée dans les territoires de 20 heures à 8 heures) et les soins non programmés en journée de 8 heures à 20 heures. « On doit articuler ces deux dispositifs sans volonté de tout remettre à plat car on risque de déstabiliser les organisations de PDS-A existantes qui fonctionnent bien », ajoute-t-il.

Une com' essentielle vers les usagers 

De surcroît, insistent les syndicats, le SAS « devra s’appuyer sur une plateforme de régulation des appels (avec numéro dédié) pilotée par les médecins libéraux, associant des opérateurs de soins non programmés et des médecins généralistes d’astreinte, exerçant en dehors du Centre 15 ». De fait, en matière de régulation des soins non programmés, les syndicats ont toujours refusé une régulation unique ville/hôpital centralisée et pilotée par les Centres 15. Ils bataillent en faveur d'une filière spécifique aux soins de ville, « distincte des urgences médicales, connue de la population et s’appuyant sur le 116 117 ». « On ne veut pas que le SAMU gère tout, en mettant l’organisation au sein de la salle de régulation des appels avec un opérateur salarié qui prendra les ordres du Centre 15 », commente le Dr Battistoni.

Pour y voir clair, la communication sur le bon usage du système de soins est jugée « primordiale » par la profession, « l’appel au médecin traitant devant rester le premier réflexe en cas de demandes de soins, la régulation des appels le passage obligé pour obtenir un rendez-vous grâce au SAS »

Gouvernance paritaire

Dans la même ordre d'idée, les syndicats défendent l'indépendance des médecins libéraux dans le cadre de la gouvernance du SAS. Cette gouvernance devra être « paritaire » pour les outils communs aux SAMU/Centres 15 et aux associations de médecins libéraux : plateforme de réception des appels et système d’information. « Dès lors que le permanencier du SAMU constate que l’appel relève des soins non programmés, il doit basculer immédiatement vers l’organisation libérale », prévient le patron de MG France.

Pour les syndicats, la crise sanitaire, marquée par l’engorgement des Centres 15, a montré « l’intérêt majeur » d’une organisation spécifique aux soins non programmés et les risques de confusion des rôles. « Expérimenter sur des bases confuses, alertent-ils, serait le meilleur moyen de faire échouer le dispositif. » 


Source : lequotidiendumedecin.fr