Plus de quinze ans après la création des premières maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), la dynamique du modèle interpro n'est plus à démontrer et les structures ne rechignent plus à se couler dans le moule de l'accord cadre interprofessionnel (ACI). Le « Quotidien » s'est procuré le dernier bilan dévoilé par l'Assurance-maladie, lors de la dernière commission paritaire nationale (CPN) cette semaine, qui le prouve.
Au 30 mai 2022, 1 597 MSP, sur les 2 018 recensées par la Direction générale de l'offre des soins (DGOS), ont en effet conclu un contrat avec leur Cpam dans le cadre de l'ACI En près de cinq ans, le nombre d’adhésion a plus que doublé. L'année dernière, ce sont 286 nouveaux contrats qui ont pris effet. Dans ce cadre, deux régions sortent du lot. L'Auvergne et l'Occitanie affichent un nombre de structures adhérentes supérieur aux autres.
Autre tendance importante du bilan : les équipes sont plus nombreuses à atteindre les prérequis de l'accord pour bénéficier de la rémunération versée par la Sécu. Sur les 1 515 structures ayant signé un contrat au 31 décembre 2021, 1 455 sont dans les clous, soit une hausse de 24 % par rapport à 2020.
Au total, chaque structure pluriprofessionnelle a touché une enveloppe de 62 039 euros contre 61 879 euros en 2020, soit une toute petite hausse de 0,3 %. Cela représente pour la Cnam une dotation financière de 90,3 millions d’euros en 2021 contre 72,4 millions d’euros en 2020, soit une augmentation de 25 %, compte tenu du nombre de structures à financer à financer.
1 053 patients par médecin traitant
Le bilan révèle aussi qu'en 2021, la patientèle moyenne d'une MSP se compose de 4309 adultes et 635 enfants, dont 10 % relevant de la complémentaire santé solidaire (ex CMU-C). Chaque généraliste est le patient traitant d'un moyenne 1 053 patients, contre 1 034 en 2020. « Cet écart peut s'expliquer par la hausse du nombre de généralistes associés dans les structures », peut-on lire dans le bilan. Au total, les équipes ont pris en charge plus de 7 millions de patients ayant déclaré un médecin traitant exerçant dans une MSP contre 5 millions en 2020, soit une hausse de 26 %. En moyenne, chaque structure rémunérée rassemble 15,2 professionnels de santé dont 4,5 généralistes. 10 % d'entre elles comptent plus de 32 soignants.
Les généralistes et les infirmiers sont les deux professions les plus représentées dans les structures sous contrat. « Malgré le Covid, la dynamique est à saluer. De plus en plus d'équipes atteignent les indicateurs fixés dans l'accord », commente le Dr Pascal Gendry, président d'AVECSanté (Avenir des équipes coordonnées), contacté par « Le Quotidien ».
Stabilité de l'atteinte des indicateurs
Pour prétendre à cette rémunération conventionnelle – proche de la Rosp des médecins libéraux – l'équipe pluripro doit atteindre divers indicateurs relatifs à trois axes : accès aux soins (horaires, missions de santé publique, etc.), travail en équipe (protocoles, coordination, revue de dossiers, stages, etc.) et utilisation d’un système d’information partagé. Selon la Cnam, la rémunération allouée par axe suit la même évolution qu'en 2020. Pas étonnant puisque l'ACI n'a pas été modifié en 2021, ni en nombre d'indicateurs, ni en nombre de points.
De fait, dans l'axe « accès aux soins », deux indicateurs (amplitude d'horaire et missions de santé publique) ont été les mieux atteints. 78 % des MSP ont réalisé au moins une mission de santé publique leur permettant de toucher en moyenne 5 349 euros pour cet indicateur. Autre exemple : pour l'indicateur « fonction de coordination », le bilan note que toutes les structures disposent d'une personne assurant cette fonction. L'atteinte de cet indicateur a permis à chaque MSP de toucher en moyenne plus de 16 317 euros et 1 149 euros pour la fonction externe. 92 % des MSP ont réalisé au moins un protocole pluriprofessionnel (2 593 euros versés pour cet indicateur). En moyenne, une équipe pluriprofessionnelle dispose de 3 protocoles validés et 4 942 protocoles ont été rédigés au total.
Concernant, l'axe « système d'information », le bilan note que 98 % des MSP disposent d'un SI labellisé de niveau standart. Le nombre de MSP ayant atteint cet indicateur est en hausse de 24 % par rapport à 2020, permettant à chaque équipe de toucher en moyenne plus de 22 590 euros. Par ailleurs, 48,8 % des MSP disposent d'un SI labellisé de niveau avancé (indicateur optionnel), soit une rémunération supplémentaire de 700 euros.
Entre 2020 et 2021, l'indicateur qui enregistre la plus forte hausse est le nombre de MSP rémunérées pour le second recours de niveau 1, calculé sur la base de professionnels vacataires, en forte hausse (+11 %).
Effort financier insuffisant
Pour 2022, cette dynamique devrait se poursuivre. La signature de l’avenant 1 à l'ACI-MSP signé en mai par 27 organisations représentatives des professionnels de santé dont trois syndicats de médecins libéraux (CSMF, MG France et FMF) comporte en effet plusieurs avancées permettant aux équipes pluripro de bénéficier de moyens financiers supplémentaires. En effet, la dotation financière allouée aux équipes va progresser de 25 % à 30 %, soit une aide moyenne d'environ 80 000 euros pour une équipe d'une quinzaine de professionnels. « C'est loin du compte pour permettre aux équipes de répondre aux défis des soins primaires, à la désertification médicale, au développement des pathologies chroniques, déplore le Dr Pascal Gendry. On pourrait espérer davantage de reconnaissance et de moyens. »
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