Les équipes de soins ouvertes ont-elles du plomb dans l'aile ? « Le 1er mars, il y a eu une ouverture de négociation conventionnelle sur l'équipe de soins coordonnée autour du patient (Escap). Depuis plus rien malgré nos propositions de rencontrer la Cnam », fustige le Dr William Joubert, président de l'Union nationale des professionnels de santé (UNPS*, qui réunit les libéraux de 12 professions).
Devant la presse, ce mercredi, le généraliste du Mans est remonté au créneau, accompagné de membres de son bureau, pour dénoncer le « silence assourdissant » des tutelles au sujet de ce nouveau mode collaboratif libéral simplifié au maximum. Fin décembre pourtant, l'Assurance-maladie avait promis l'ouverture de négociations « dès la fin janvier 2022 » d'un avenant à l'accord-cadre interprofessionnel (Acip) consacré à l'expérimentation de ces « équipes ouvertes ».
Pas de formalisme excessif
Promue depuis des années par l'UNPS, cette structuration « plus souple » et « plus simple » pourrait embarquer davantage de libéraux que les équipes de soins primaires (ESP) ou les maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), qui exigent un formalisme juridique assez lourd. Avec les Escap, « il n’y a pas de projet de santé à signer ni de SISA à créer (société interprofessionnelle de soins ambulatoires) », insiste le Dr Joubert.
De fait, c'est le soignant (médecin, pharmacien, infirmier…) qui identifie le besoin de coordination de tel ou tel patient, grâce à une grille individuelle d’inclusion basée sur divers critères (âge, pathologie, médicaments, chirurgie, mobilité, vulnérabilités, hospitalisation, nutrition, troubles sensoriels, fonctions cognitives, etc…). En utilisant un outil numérique développé par trois éditeurs de logiciels (Idomed, e-coordination et Entr'Actes), il fait ensuite appel aux autres libéraux de santé désignés par le patient pour créer cette équipe de soins (trois minimum dont le médecin traitant).
« Cathédrale administrative »
Dans le contexte de crise des urgences, « ces équipes auraient permis d'éviter de nombreux passages dans ces services, avance John Pinte, infirmier et vice-président de l'UNPS. On regrette que cela ne soit pas déjà mis en place ».
Pour l'organisation pluripro, le blocage n'est pas forcément lié au « financement du dispositif » mais plutôt à « un risque de remise en cause » des autres formes d'exercice coordonné que sont les ESP, les maisons de santé ou les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). « Ils craignent que la cathédrale administrative qu'ils ont voulu bâtir n'ait plus de sens », ironise Sébastien Guérard, vice-président de l'UNPS et président de la Fédération française des masseurs-kinésithérapeutes rééducateurs (FFMKR).
Cette nouvelle forme de travail en équipe est également promue par les maires des communes rurales. Gilles Noël, président de l'Association des maires ruraux de la Nièvre, rappelle que ces équipes de soins coordonnées autour du patient figurent en bonne place parmi les propositions de 35 organisations rassemblant soignants, patients et élus présentées lors de la campagne présidentielle. Le groupe avait ainsi retenu quatre mesures urgentes dont l'Escap, « une très bonne idée ». « C'est la première fois que je vois un système aussi sophistiqué, salue Gilles Noël. Quand les professionnels de santé travaillent ensemble, cela évite à la population d'aller voir le maire. »
* Organisation qui réunit douze professions de santé : audioprothésistes, biologistes responsables, chirurgiens-dentistes, masseurs-kinés, infirmiers, médecins, orthophonistes, orthoptistes, pédicures-podologues, pharmaciens titulaires d'officine, sages-femmes et transporteurs sanitaires
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