LE SORT DU DR Y a été scellé le 6 octobre. Ce jour-là, la première chambre civile de la Cour de Cassation a reconnu la responsabilité d’une ophtalmologiste dans l’affaire l’opposant à son ancien patient, Alain X.
L’histoire se passe dix ans plus tôt, en Haute-Normandie. Le 7 janvier 2002, Alain X, souffrant de diabète depuis 1993, se rend chez le Dr Y. Le praticien effectue un fond d’œil et examine l’acuité visuelle, qui se révèle normale de loin. Aucun signe de rétinopathie diabétique n’est détecté. Extrêmement prise par son travail, le Dr Y ne peut donner le prochain rendez-vous qu’en mai 2003, soit près de 17 mois plus tard.
En mai et novembre 2002, Alain X la recontacte : il souffre de troubles visuels et souhaite avancer son rendez-vous. Le Dr Y rejette sa demande et ne l’oriente pas vers un confrère. Elle sait pourtant, précise l’arrêt de la Cour, que M. X n’est pas un patient très rigoureux dans le suivi de sa santé. Il ne fait aucun régime et ne l’a consultée que quatre fois depuis le diagnostic de son diabète : en 1993, 1998, 2000, puis en janvier 2002. Pourtant, les recommandations prévoient un bilan ophtalmologique pratiqué dès le diagnostic puis une fois par an pour les diabétiques de type 2 non compliqué. Le Dr Walter Vorhauer, secrétaire général de l’Ordre, précise qu’il s’agit d’un « délai de recommandation standard, même si les règles ne sont pas des oukases. Chaque patient et chaque évolution du diabète diffèrent. Il faut prendre en compte l’aspect circonstanciel ».
Faute de surveillance.
Alain X consulte alors son médecin traitant, qui l’adresse à un autre spécialiste, lequel diagnostique le 27 février 2003 une rétinopathie diabétique œdémateuse proliférante bilatérale, compliquée d’une hémorragie du vitré à gauche.
L’histoire emprunte alors le terrain judiciaire. La MACSF, assureur du Dr Y, ayant refusé de faire une offre de prise en charge, l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (Oniam) prend le relais. La Commission régionale de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (CRCI) de Haute-Normandie émet un avis concluant à la responsabilité du praticien.
Le 14 mai 2010, la Cour de Versailles déclare le Dr Y responsable d’une faute de surveillance. L’expert judiciaire relève dans son rapport que le diabète mal équilibré a aggravé son cas, qui aurait dû alors être traité en urgence. « À ce moment-là, le praticien devait faire un effort d’organisation ou transmettre le dossier à un collègue, estime le Dr Vorhauer. Mais attention : il ne s’agit pas d’une non prise en urgence d’un patient, mais d’un problème de gestion de cabinet ». La prescription d’un traitement au laser précoce et d’une angiographie aurait évité des complications. La Cour de Cassation a considéré que le suivi du patient n’était ni satisfaisant ni conforme aux bonnes pratiques. Aux yeux de la loi, la surcharge de travail n’étant pas une excuse, l’assureur et sa cliente ont été condamnés à verser 3 000 euros à l’ONIAM et 2 000 euros à la CPAM du Havre.
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