AU MOIS de décembre 2009, toute la France retenait son souffle. Johnny Halliday avait été admis en urgence, à l’hôpital Cedars-Sinaï de Los Angeles puis placé en coma artificiel. La tournée qui devait être la dernière d’une longue carrière était brutalement interrompue. Très vite, le Dr Stéphane Delajoux, qui l’avait opéré d’une hernie discale le 26 novembre à la clinique Monceau, à Paris, est mis en cause par l’entourage de la star. Finalement, le patient s’en sort mais l’enjeu financier est de taille. Deux experts, les Dr Bertrand Gachot (infectiologue) et du Pr Marc Tadié (neurochirurgien) sont nommés par la justice française pour déterminer les circonstances qui ont conduit à l’hospitalisation du chanteur.
Leurs conclusions, remises aux deux parties la semaine dernière, annoncent l’épilogue de l’affaire. L’expertise, rapporte l’AFP, conclut que « l’indication opératoire était justifiée et conforme aux règles de l’art » tout comme « la technique opératoire ». En revanche, soulignent les deux experts, « le suivi et la surveillance postopératoires n’ont pas été conformes aux règles de l’art et aux données acquises de la science à l’époque des faits ».
Hautement regrettable.
Le rapport indique bien que, « lors de la chirurgie, une brèche durale s’est produite », provoquant « une fuite du liquide céphalorachidien ». C’est cette fuite qui a provoqué l’infection et qui a justifié l’hospitalisation du patient dès son arrivée sur le sol américain. Pour les experts, une telle brèche est un « événement fréquent », surtout en cas d’interventions répétées, comme dans le cas de Johnny Halliday. La brèche de la dure-mère n’est pas, selon eux, une faute en soi. Toutefois, dans un tel cas, « il est recommandé de garder le patient au repos strict au lit pendant 48 heures pour favoriser la cicatrisation ». Le fait « de ne pas avoir prescrit un repos strict » et « d’avoir laissé le patient se lever le lendemain et sortir le surlendemain n’est donc pas conforme aux règles de l’art et a entraîné une perte de chance de voir la brèche se tarir que l’on peut estimer à 75 % ».
Les experts soulignent que le Dr Delajoux n’a fourni « aucun document permettant de prouver que M. Smet (le nom de Johnny Halliday) a été informé » et aucun document non plus n’a été fourni attestant qu’il a « prescrit une hospitalisation d’au moins 48 heures à cinq jours de surveillance » ou encore prouvant qu’il « quittait la clinique contre avis médical ». Un manque d’information « hautement regrettable ». À tout le moins, estiment-ils, « il fallait fournier au patient, en prévision de son départ aux États-Unis, un document écrit (...) mentionnant l’intervention réalisée et la complication survenue ».
Aux tribunaux de trancher.
Par la voix de son avocat, le Dr Delajoux affirme cependant être « pleinement satisfait » des conclusions confirmant que l’indication opératoire était justifiée et que l’intervention s’était déroulée dans les règles de l’art. « S’agissant du défaut d’information qui lui est reproché et de la perte de chance qu’il aurait engendrée, le Dr Delajoux le conteste », explique son avocat. « Cette question, souligne-t-il, ne pourra être tranchée que par les tribunaux lorsqu’ils seront saisis. » Il considère que « l’information donnée à son patient et à son entourage médical n’a pu en rien contribuer au moindre préjudice subi ».
Dans l’entourage de Johnny Halliday, Me Virginie Lapp indique que l’expertise judiciaire a mis en évidence des « fautes et manquements caractérisés directement et personnellement imputables au Dr Delajoux ».
Les conclusions sont suffisantes pour demander « que les responsables et leurs assureurs procèdent rapidement à l’indemnisation des préjudices découlant des dommages personnels subis et des souffrances endurées. » L’avocate affirme qu’il est « acquis que les conditions de l’engagement de la responsabilité civile professionnelle du chirurgien sont à l’évidence remplies » etannonce que son client compte « saisir l’Ordre des médecins d’une plainte à l’encontre du Dr Delajoux ». Me Lapp juge par ailleurs que le rapport permet « d’envisager la responsabilité de la clinique internationale du Parc Monceau ».
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