Alors que les praticiens ont l’obligation de prescrire en dénomination commune internationale (DCI) depuis le 1er janvier 2015, la revue « Que choisir » publie sur le sujet une enquête dont elle juge les résultats « affligeants ».
Dans sa dernière édition, la revue a analysé plus de 800 ordonnances anonymisées, collectées entre le 20 mai et le 29 juin 2015. 73 % provenaient d’un médecin généraliste et 27 % d’un spécialiste.
« Déni caractérisé de l’intérêt des patients »
Sur les 2 729 médicaments prescrits dans ces ordonnances, seuls 13 % d’entre eux étaient rédigés en DCI. 14 % étaient inscrits tout à la fois en DCI et en nom de marque (comme la loi le tolère), mais près des trois quarts (73 %) étaient rédigés en seul nom de marque. Une mauvaise habitude que la revue qualifie de « déni caractérisé de l’intérêt des patients ». Selon « Que choisir », les médecins spécialistes sont « les plus mauvais élèves », prescrivant 85 % de leurs médicaments en nom de marque. Le score tombe à 70 % pour les omnipraticiens.
L’analyse par ordonnance est tout aussi édifiante. Seules 18 % d’entre elles sont exclusivement rédigées en DCI (couplée ou non au nom de marque). 25 % mêlent lignes en DCI et lignes en nom de marque, et 57 % ne comportent aucune ligne en DCI.
La revue, qui rappelle que la prescription en DCI est un « moyen efficace de lutter contre le surdosage ou les interactions médicamenteuses en évitant le piège des noms de marque qui masquent les molécules présentes » s’adresse à Marisol Touraine. Elle demande à la ministre de la Santé de mettre en place des contrôles « pour identifier les médecins récalcitrants et leur rappeler instamment cette obligation légale », et lui suggère d’inscrire la prescription en DCI dans les critères de la ROSP. « Que choisir » regrette que l’obligation de prescrire en DCI ne soit actuellement assortie d’aucun contrôle ni sanction.
Des logiciels de prescription peu adaptés, selon les médecins
Ces résultats font réagir le Dr Jean-Paul Ortiz pour qui « le problème est mal posé par "Que choisir" ». Pour le patron de la CSMF, « il n’y a aucune réticence des médecins à prescrire en DCI, mais cette obligation est actuellement inapplicable ». Les logiciels d’aide à la prescription (LAP) ne proposent que rarement la transposition d’un nom de marque en DCI.
Jean-Paul Ortiz assure que les médecins n’ont pas le temps d’apprendre les noms en DCI, « trop longs et trop complexes à mémoriser », et que dans le même temps, les éditeurs rechignent à incorporer dans leurs LAP cette transposition en DCI, « car il s’agit d’une responsabilité légale qui incombe aux pharmaciens et non aux éditeurs ». Jean-Paul Ortiz estime qu’une réflexion commune sur ce sujet doit être menée par les praticiens, le ministère, les éditeurs et l’Ordre des pharmaciens.
De son côté, le Dr Antoine de Béco, président de la Société de formation thérapeutique du généraliste (SFTG) juge que la formation initiale aurait dû se faire en DCI depuis longtemps. « Aujourd’hui, ajoute-t-il, il faut avoir des outils qui soient opérants pour prescrire en DCI. »
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