Salarier un médecin ou un professionnel de santé en maison de santé pluriprofessionnelle ? Cette mesure sera bientôt rendue possible grâce à la publication d'une ordonnance qui devrait être prochainement présentée en conseil des ministres par Olivier Véran. Mais le projet inquiète fortement l'Union nationale des professionnels de santé (UNPS). Cette organisation, qui regroupe les syndicats représentatifs de 12 professions de santé libérales, craint principalement les évolutions réglementaires apportées à la société interprofessionnelle de soins ambulatoires (SISA), le statut juridique des MSP.
Selon l'UNPS, le nouveau cadre juridique permettrait à cette structure libérale d'exercice coordonné d'accueillir de nouveaux acteurs, de les salarier et de redistribuer, à ses membres et salariés, tous types de forfaits versés par l’Assurance-maladie.
Si elle ne remet pas en cause « la finalité de la réforme qui serait de permettre aux patients de bénéficier d’une prise en charge globale au sein des MSP », l'organisation estime que ce dispositif entraînerait « une différence de prise en charge du patient selon que le professionnel libéral choisi exerce en SISA ou en dehors de ce type de structure ». Elle pointe également le risque d'une « distorsion de concurrence entre les salariés et les associés de la SISA (qui sont libéraux, N.D.L.R.) » et, plus largement, « une désorganisation de l'offre de soins libérale ».
Une possibilité
Ces craintes sont loin d'être partagées par AVECSanté (anciennement Fédération française des maisons et pôles de santé). Contacté par le « Quotidien », le Dr Pascal Gendry, son président, rappelle que « le salariat n'est qu'une possibilité donnée pour renforcer l'équipe de la MSP, en offres médicales ou non médicales. Ce n'est pas obligatoire ». Il prend l'exemple d'une MSP labellisée où un médecin sur deux part à la retraite et un collaborateur veut être salarié. « Si on n'offre pas la possibilité à la SISA de le salarier, le risque est de le voir partir, fragilisant ainsi l'offre de soins sur le territoire », explique le généraliste de Renazé (Mayenne).
« Que veut-on pour les équipes de soins primaires de demain ? Que les sociétés privées prennent la main sur les maisons de santé ou laisser les libéraux garder la main ? », ajoute le Dr Gendry en faisant référence au groupe Ramsay Santé qui veut expérimenter quatre structures de soins primaires, à mi-chemin entre la maison de santé et l'hôpital de proximité en salariant des médecins.
Travailler dans de bonnes conditions
Membre de l'UNPS, les Généralistes-CSMF ne partage pas la position de l'Union. « Je m'aperçois que de plus en plus de généralistes préfèrent être salariés. Ce que je regrette. Mais je ne vois pas pourquoi notre SISA, qui est une entreprise de santé libérale, ne pourrait pas avoir la possibilité de proposer du salariat pour répondre aux demandes de soins de mon territoire », déclare le Dr Luc Duquesnel. Le président de la branche généralistes de la CSMF rappelle que les centres de santé, les conseils départementaux ou encore les régions ont fait déjà le choix de salarier les médecins pour lutter contre la désertification médicale.
De son côté, MG France se dit aussi surpris par la position de l'UNPS. « C'est une évolution nécessaire. Dans une dynamique de développement de l'exercice coordonné piloté par les libéraux, les structures doivent pouvoir disposer de collaborateurs salariés afin d'offrir plus de services aux patients et permettre aux professionnels de travailler dans de bonnes conditions », indique le Dr Jacques Battistoni, président de MG France.
Pas convaincue par ses explications, l'UNPS appelle le gouvernement à revoir sa copie.
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences
Renoncement aux soins : une femme sur deux sacrifie son suivi gynécologique