Sanctions, secteur II, revalorisations...

Dépassements : le cocktail explosif

Publié le 08/10/2012
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Crédit photo : S. Toubon

• Sanctions contre les dépassements abusifs : la CNAM souffle le chaud et le froid

Ce sujet a beaucoup évolué. Les partenaires ont abordé lors d’une première séance houleuse un « mécanisme de régulation des tarifications excessives » pouvant aller jusqu’au déconventionnement, entièrement piloté par la CNAM. L’assurance-maladie a recensé 600 praticiens pratiquant des tarifs à 300 % au-delà du tarif Sécu. Dans un second temps, l’UNCAM est revenue sur le dispositif de sanctions « unilatéral », qu’elle envisageait. La question du retour de l’Ordre « n’est pas taboue », a assuré le patron de la Sécu, qui fera « de nouvelles propositions écrites ». « Nous sommes d’accord pour que l’examen des dossiers soit réalisé au niveau régional et que l’Ordre puisse exprimer un avis qui ne doit pas être bloquant. Des procédures d’appel seront ouvertes aux professionnels qui pourraient être suspensives », a-t-il ajouté. Pour l’heure, les partenaires n’ont pas évoqué le seuil de dépassement (taux ou valeur) au-delà duquel serait déclenchée la procédure de sanctions. Le SML refuse « l’idée de critères chiffrés ».

• Un contrat d’accès aux soins (flou) pour le secteur II

L’assurance-maladie veut soumettre aux médecins de secteur II un contrat à adhésion volontaire de trois ans pour limiter les dépassements d’honoraires et élargir l’accès aux tarifs opposables pour les patients les plus modestes. Les praticiens signataires s’engageraient à ne pas demander de compléments d’honoraires aux 9 millions de patients bénéficiaires de la CMU-C, de l’AME, de l’ACS, et aux consultations en cas d’urgence. Les autres patients seraient mécaniquement mieux pris en charge par l’assurance-maladie par le biais de l’alignement des bases de remboursement sur celui du secteur I.

Pendant les trois ans de contrat, les médecins seraient tenus de geler leur taux moyen de dépassement. L’assurance-maladie prendrait en charge les cotisations sociales pour leurs actes à tarifs opposables. La CSMF souhaite que les anciens chefs de clinique bloqués en secteur I depuis 1990 et certains médecins de secteur I, selon des critères à définir, puissent opter pour ce nouveau secteur d’exercice.

Mais jusqu’à quel taux de dépassement moyen ce contrat sera-t-il proposé aux médecins ? « Il devra y avoir des limites », a précisé Frédéric van Roekeghem, directeur de l’assurance-maladie. De même se pose la question de l’ouverture de ce contrat aux jeunes installés qui ne disposent pas d’un taux de dépassement de référence. La CSMF a proposé qu’il soit tenu compte de leur environnement (taux de dépassement moyen des confrères, ndlr). Quid surtout des médecins de secteur II qui refuseraient le contrat ? La CNAM comme le gouvernement ont prévenu qu’ils devraient eux aussi faire des efforts de modération. Un point dur.

• Une revalorisation des tarifs opposables, mais pas tout de suite

L’assurance-maladie a rappelé les hausses de tarifs ayant bénéficié en 2012 aux spécialités cliniques : psychiatres (+6 %), pédiatres (+4,8 %), dermatologues (+5,6 %), endocrinologues (+4,7 %), gynécologues (+5,9 %). L’UNCAM a précisé que la rémunération sur objectifs de santé publique (P4P) allait représenter 3,9 % de l’ensemble des revenus des médecins traitants en 2013. Dans ce contexte, l’UNCAM propose de « réajuster à la baisse » sur trois ans les tarifs de 4 spécialités (cardiologie interventionnelle, gastroentérologie, médecine nucléaire et radiologie) pour revaloriser les tarifs de certains actes d’une dizaine d’autres disciplines (anesthésie, cardiologie, chirurgie, dermatologie, gynécologie, neurologie, ORL, pneumologie, rééducation fonctionnelle, rhumatologie...). « Les évolutions bénéficieraient aux médecins de secteur I et aux praticiens de secteur II qui s’engageraient dans le contrat d’accès aux soins », précise la CNAM. Les syndicats demandent que les valeurs cibles soient atteintes très rapidement et que le volet clinique de la CCAM (réforme de la grille des consultations) soit ouvert avant le 31 décembre 2012 comme le prévoit la convention.

Mais la marge de manœuvre dont disposent l’assurance-maladie et des organismes complémentaires n’est pas connue. Les masses financières seront dévoilées à la toute dernière réunion, parie un vieux routier des négociations. L’UNOCAM s’est dit prête à faire un « effort substantiel » sans préciser lequel.

 

Internes et chefs haussent le ton

Observateur des négociations, les internes et les chefs de clinique ont exprimé leur peur de voir restreint l’accès aux honoraires libres pour les futurs diplômés. Emanuel Loeb, nouveau président de l’Intersyndicat national des internes des hôpitaux ( ISNIH), a pris la parole en séance pour exprimer cette crainte d’une régulation à l’installation en secteur II. « L’ISNIH a tenté de mettre la négociation sous pression à partir d’éléments qui n’ont absolument pas été évoqués en séance et qui sont erronés. Quand on négocie, on négocie sans pression et ces méthodes ne me semblent pas adaptées », a répliqué Frédéric van Roekeghem.
 CHRISTOPHE GATTUSO

Source : Le Quotidien du Médecin: 9170