« Facturer des dépassements d’honoraires en dehors des horaires habituels, êtes-vous tentés ? » C’est la question posée aux lecteurs du « Quotidien » mercredi 2 mars. Vous avez été plus de 450 à y répondre (*), en l’espace de deux jours.
Verdict : les votants ont massivement répondu oui, à près de 80 %. 8 % seulement déclarent ne pas être tentés par cette pratique initiée et médiatisée par des médecins bretons il y a quelques semaines (lire aussi ce témoignage).
Las d’attendre une revalorisation du tarif de consultation, ces généralistes frondeurs cotent un DE en dehors de la tranche horaire 9h-17h. Le C est rehaussé de 3 à 10 euros, et modulé en fonction des ressources des patients.
La démarche s’inscrit aussi dans un contexte de ras-le-bol de la profession. Après 17h, « il n'y a que les libéraux et surtout les généralistes qui sont au travail faisant des journées à rallonge pour pouvoir payer taxes et charges. Comment peut-on continuer à rester dans cette servitude ? » râle un lecteur du « Quotidien », dans le cadre de notre sondage.
Liberté tarifaire
Il semble d’ailleurs que certains praticiens n’ont pas attendu cette initiative pour adopter une certaine liberté tarifaire, dans le respect du traditionnel « tact et mesure ». « Installé depuis 2009 en secteur I, je fais cela depuis le premier jour sans problème », confie le Dr T.. « Il ne faut pas hésiter à le faire en demandant 3 à 5 euros, le prix de quelques cigarettes, comme le font déjà certains médecins (radiologues et biologistes) pour frais de dossier ou archivage » témoigne encore ce médecin.
« Moi je demande, de longue date, une majoration de 5 euros pour les RDV (pour 5% du volume d’actes), avance un autre praticien en secteur I, un brin provocateur. Si le directeur de la sécu me reproche quoi que ce soit sur mes pratiques tarifaires, je passe à 10 euros de majoration ! »
La Sécu voit d’un mauvais œil ces pratiques qu’elle considère abusives notamment lorsqu’elles s’appuient sur des critères horaires.
Par le passé, elle a rappelé à l’ordre de nombreux praticiens... parfois avec succès comme en témoigne ce lecteur : « Je ne le fais plus depuis juin 2015. Depuis des années mes 5 % d'actes sur RDV étaient facturés 25 euros. Les consultations sans RDV étant bien sûr à 23 euros. Le directeur de la sécu, peu au courant des détails de la convention, m'a envoyé avant les vacances, une belle lettre de reproches. J'ai donc décidé de lui faire plaisir... en attendant une nouvelle convention, comportant moins d'ambiguïtés que l'ancienne. »
« Je suis dévoué, pas esclave »
Et les patients ? Ils n’y seraient pas opposés avancent les médecins interrogés par le « Quotidien »... d’autant plus que de nombreuses mutuelles prendraient en charge ces dépassements.
« Ils comprennent », affirme un lecteur, qui a fixé ses propres règles. Trouvant qu’une surfacturation élevée après 17h, « c’était un peu raide pour les patients qui travaillent sans forcément gagner beaucoup », il a modulé ses tarifs et repoussé le seuil à 19h. « Avant 19h, je prends 25 euros. Passé 19h, en petite ville de province, je prends 35 euros par consultation. Lorsque l'urgence n'en est pas une, les patients revoient leur exigence. Et lorsqu'ils peuvent se le permettre, ils le paient, tout simplement. Un service, ça se paie. Je suis dévoué, pas esclave. » Et si la caisse venait à lui interdire cette pratique ? « Je fermerais à 19h. Point barre », répond-il.
(*) Sondage non scientifique réalisé en ligne du 2 au 4 mars 2016, non représentatif de la population des médecins.
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences
Renoncement aux soins : une femme sur deux sacrifie son suivi gynécologique