CLASSIQUE - « Don Quichotte du Trocadéro », de José Montalvo

Cervantès métissé

Publié le 21/01/2013
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Crédit photo : P. BERGER

CE « DON QUICHOTTE au Trocadéro », un des spectacles les plus attendus de la saison de danse du Théâtre de Chaillot, est autant l’œuvre du comédien Patrice Thibaud que celle de José Montalvo. Parti d’une conversation entre les deux hommes sur le burlesque dans la danse, le projet a abouti à une véritable « déconstruction/reconstruction » du chef-d’œuvre de Léon Minkus et Marius Petipa. Il convoque tous les ingrédients qui ont fait le succès de José Montalvo depuis son premier spectacle, « Paradis », en 1977, lequel a fait le tour du monde, comme nombreux de ceux qui ont suivi. La vidéo et l’utilisation de danseurs et de formes de danse de tous les horizons possibles participent à un étourdissant métissage, mélange des genres et références.

Décalage.

Le plus réussi est le travail de décalage par rapport à l’œuvre de Petipa, ceci grâce au formidable apport du compositeur-arrangeur Sayem à la musique de Minkus. De fait, compte tenu de sa longueur, qu’on peut juger excessive (une heure vingt), le spectacle ne fonctionne vraiment à plein régime que quand ce substrat musical est présent. Certaines scènes, comme la grande variation d’entrée de Quitterie, qui pratique l’autodérision quant au style classico-romantique, la rencontre de Quitterie et Basile, dans laquelle Patrice Thibaud manipule les trois protagonistes (Quitterie, Basile et le Père) comme des marionnettes, avec une parodie de pantomime, sont étourdissantes et irrésistibles.

Mais la partie vidéo, qui est assez importante, ne s’intègre pas toujours bien au reste. Tout se passe comme si le spectacle cherchait à toucher deux publics, celui qui connaît son « Don Quichotte » et sait jouer avec les codes de la danse classique et un autre, plus vaste, qui se reconnaît davantage dans les jeux et les interférences de la vidéo. La vidéo utilise beaucoup le métro parisien, ce qui, à petite dose, quand l’illustration se rapporte à la danse, fonctionne très bien, mais cesse de passionner quand elle s’en éloigne trop, comme dans un assez long intermède sur les affiches devenant des tableaux vivants.

On retrouve avec plaisir les interprètes fétiches de José Montalvo, notamment Sharon Sultan, superbe danseuse de flamenco, Roberto Pani, dit Bobo, qui était du spectacle original « Paradis », ou l’ahurissant danseur de hip-hop Warrenne Adien, dit Desty Wa. Ainsi que de nouveaux, comme le Cubain Lazaro Curvo Costa, superbe danseur classique, et Sandra Mercky, qui alterne avec une versatilité stupéfiante les styles classique et jazz dans les variations de Petipa utilisées dans la pièce. Et on s’incline au plus bas devant la performance d’acteur, danseur, chanteur, de l’homme-orchestre de ce « Don Quichotte », Patrice Thibaud.

Théâtre de Chaillot, Salle Jean Vilar (tél. 01.53.65.30.00, www.theatre-chaillot.fr). Jusqu’au 8 février. Places de 13 à 33 euros.

OLIVIER BRUNEL

Source : Le Quotidien du Médecin: 9211