« La Révolution silencieuse », « Nous les intranquilles »

Des gestes pour changer la vie

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Publié le 03/05/2018
Cinéma1-La Révolution silencieuse

Cinéma1-La Révolution silencieuse
Crédit photo : STUDIO CANAL-GMBH-J. TERJUNG

Ils ont 17-18 ans et vont passer leur bac. Seulement voilà, nous sommes en 1956 en République démocratique allemande. Et leur révolte adolescente va passer par une petite rébellion qui va modifier leur destin. Après l'excellent « Fritz Bauer, un héros allemand », sur le procureur de la Hesse qui a contribué à l'arrestation d'Eichmann, Lars Kraume, avec « la Révolution silencieuse », se penche sur une autre facette de l'Allemagne après le troisième Reich, cette fois côté Est.

C'est une histoire vraie qu'il nous raconte, d'après le livre d'un des protagonistes, Dietrich Garstka. Cette année-là, il n'y a pas encore de mur à Berlin et il est possible, sinon facile, d'aller à l'Ouest, par exemple pour voir un film. Et lorsqu'un lycéen de terminale découvre via une séquence d'actualités qu'à Budapest des manifestations pour la liberté sont réprimées dans le sang, il imagine de faire une minute de silence, en classe, en hommage aux victimes.

C'est le début des ennuis. La police politique veille et ne lésine pas sur les moyens, dont le chantage impliquant les familles, pour faire plier ces jeunes gens qui comprennent à peine ce qui leur arrive. D'autant moins que le passé de leurs parents pendant la guerre leur a souvent été caché et que pour ces derniers l'heure est toujours aux règlements de compte.

Si le réalisateur ne cède pas au manichéisme – il y a de la propagande et de dangereux mensonges des deux côtés –, il ne cache pas son empathie pour ces garçons et filles qui ont su se rebeller, comme on doit le faire à leur âge. Le spectateur aussi peut prendre fait et cause pour ces jeunes dont l'idéalisme est confronté à la peur et aux trahisons.

La psychiatrie par ceux qui la vivent

Le documentaire « Nous, les intranquilles » est né de la rencontre d'un cinéaste désireux d'évoquer un collectif œuvrant pour une société non-hiérarchique et solidaire et d'un centre psychiatrique centrant ses propositions sur la relation humaine. Ainsi ce « film collectif réalisé par Nicolas Contant » a-t-il été tourné au centre de jour Antonin Artaud de Reims en partie par les patients eux-mêmes.

Fondé il y a trois décennies par le psychiatre et psychanalyste Patrick Chemla, le centre Artaud semble un bel exemple des vertus de la psychiatrie institutionnelle et du soin relationnel. Les membres du collectif – beaucoup récusent l'étiquette de « malades » – en témoignent en se filmant lors de leurs activités diverses ou dans des vidéos créatives. On les voit préparer des repas, jardiner, se promener à la mer, fêter un anniversaire, parler de leur souffrance, en assemblée générale… Ou encore commenter des faits-divers ou le discours de Sarkozy sur la sécurisation des hôpitaux psychiatriques en 2008 (à la suite duquel a été créé le Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire, dont fait partie le Dr Chemla).

Au passage, le DSM, les soins sous contrainte, les lourds traitements médicamenteux, l'hôpital en prennent pour leur grade. On peut ne pas être d'accord, mais cet autoportrait collectif avec jeu d'images et de couleurs a le mérite de poser les termes du débat du côté de l'utopie plutôt que du misérabilisme.

Et aussi cette semaine

Dans « Comme des rois », Xabi Molia (« Huit fois debout ») fait de Kad Merad un petit artisan de l'arnaque qui tente de transmettre son savoir-faire à son fils (Kacy Mottet-Klein), lequel veut devenir acteur. Humour et empathie pour traiter de questions sociales.

Pour son premier long métrage, « Cornelius le meunier hurlant », Yann Le Quellec prend le risque du picaresque en adaptant un roman du Finlandais Arto Paasillina.

Axelle Laffont entraîne Virginie Ledoyen et Marie-Josée Croze dans une comédie, « MILF » (en anglais peu élégant, Mother I'd Like to Fuck), sur trois amies approchant la quarantaine que tentent de séduire des jeunes gens.

Dans « Otages à Entebbe », le Brésilien José Padilha revient sur le raid israélien en Ouganda pour libérer les passagers d'un vol Air-France détourné par des Palestiniens et des Allemands, en juillet 1976, en évoquant tous les protagonistes, passagers, membres du gouvernement israélien, terroristes, au-delà de l'action d'éclat elle-même.

Portrait d'une jeune femme un peu marginale (la prometteuse Emily Beecham), « Daphné », de Peter Mackie Burns, a reçu l'Hitchcock du meilleur scénario au festival du film britannique de Dinard. « Senses » du Japonais Ryusuke Hamaguchi (qui sera en compétition à Cannes pour « Asako I & II »), sur quatre amies, dont l'une disparaît, est présenté comme « la première série cinéma » (les deux premiers épisodes sortent cette semaine, les deux suivants le 9 mai et le dernier le 16 mai). Venu de Chine, « les Anges portent du blanc », de Vivan Qu, met en scène deux adolescentes agressées par un homme d'âge mûr.

Pour mémoire, on citera « Rampage - Hors de contrôle », d'après un jeu vidéo des années 1990, avec Dwayne Johnson et des animaux féroces, et « Action ou vérité », pour les amateurs d'épouvante.

À découvrir à Paris, au cinéma l'Arlequin, le cinéma nigérian (le deuxième plus productif au monde), avec la Nollywood Week, du 3 au 6 mai.

Renée Carton

Source : Le Quotidien du médecin: 9662