Une œuvre de confinement ? Presque. Celle, silencieuse, de Giorgio Morandi, peintre et graveur, dans la collection de son ami Luigi Magnani, aujourd’hui dans la Fondation Magnani Rocca. Riche de 50 tableaux et gravures couvrant l’ensemble de son travail, elle est exposée au musée de Grenoble (museedegrenoble.fr, jusqu'au 14 mars).
Peindre est pour Morandi (1890-1964) ce que Kandinsky nomme « une nécessité intérieure ». Toute sa vie est à Bologne, avec sa mère et ses sœurs. Son univers est sa chambre, qui est aussi son atelier. Malgré un avis paternel négatif, il s’inscrit à l’Académie des Beaux-Arts de la ville, où il étudie Giotto et Masaccio. Il a une première expérience métaphysique, influencée par Chirico et Carrà, avant de devenir professeur. Toute sa vie il peint des natures mortes, tableaux de fleurs, quelques vues de sa fenêtre et de Grizzana, leur villégiature voisine. Avec de rares exceptions pour des autoportraits,
Giorgio Morandi consacre sa vie solitaire à l’immobilité obsédante des vases, pots, bouteilles, sucriers, faïences, qu’il met en scène de manière théâtrale sur sa table. Il les agence, les déplace, les aligne ou les superpose pour les peindre sur un fond dépouillé. Son travail méditatif est, sur la forme et la texture, dans l’esprit de Chardin. Avec une approche minimaliste et équilibrée et une peinture onctueuse et sensuelle, il invente « une autre réalité, pure et surréelle ». Il a « la certitude d’un autre présent, celui de la poésie ».
Le musée présente aussi une soixantaine d’œuvres de sa collection d’art italien du XXe siècle initiée dès 1919 par son conservateur Andry-Farcy, un des premiers à faire entrer l’art contemporain dans les musées français.
Autre œuvre silencieuse qui traverse le temps, les six vitrines monumentales d’Anselm Kiefer au Panthéon, qui évoquent, avec les barbelés, les plombs, le fumier, la réalité des combats de la Première Guerre mondiale. Une commande d’État qui évoque « Ceux de 1914 », le livre de récits de Maurice Genevoix publié en 1949.
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