Traçage et reconnaissance faciale

Des technologies en question

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Publié le 30/06/2020
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Pendant que la technologie s’adapte aux dernières données de l’épidémie, les recherches sur l’intelligence artificielle sont rattrapées par l’actualité.
Déflouter grâce à une IA

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Crédit photo : DR

Alors que seulement un peu plus de 2 % des Français ont téléchargé StopCovid depuis un mois, l’application de traçage de contacts est accusée de transférer non seulement les informations des personnes qui restent en contact à moins d’1 mètre pendant plus de 15 minutes mais de toutes les personnes croisées par un utilisateur. Par ailleurs, en optant pour un modèle centralisé, la France s’est privée d’une interopérabilité avec la grande majorité des apps du continent…

D’autres aides pour voyager sereinement sont heureusement installées. Mise en ligne par l’Union européenne, Re-open EU, traduite dans 24 langues, fournit des informations en temps réel « sur les frontières, les moyens de transport disponibles, les restrictions de voyage, les mesures de santé publique et de sécurité ». La carte interactive du site IATA Travel Center offre les mêmes services. Et pour se déplacer en toutes circonstances, Google Maps s’est enrichi de fonctionnalités afin d’informer sur les points de contrôle, l’obligation de porter un masque ou encore le taux de fréquentation des transports en commun.

Qu’elle soit mise à la disposition du grand public ou utilisée par les instances supérieures, la technologie de reconnaissance faciale nous interpelle. Chacun peut ainsi aujourd’hui faire apparaître ou disparaître un visage : mis au point par des chercheurs de l’Université Duke (Caroline du Nord), l’algorithme PULSE est capable de reconstituer un portrait en très haute définition à partir d’une image de mauvaise qualité. À l’inverse, la messagerie chiffrée Signal vient d’ajouter un outil de floutage qui permet de cacher un visage en appuyant simplement sur une icône ou, manuellement, d’autres zones précises. Et avec le programme polonais PimEyes, il est possible, en téléchargeant une seule photo d’un individu, de trouver tous les autres clichés de cette personne sur l’ensemble du Web, mais aussi de dénicher les images d’une tierce personne.

S’appuyant sur de nombreuses études ayant montré que la technologie de reconnaissance faciale est sujette à des erreurs liées à l’âge, au genre et à la couleur du visage, IBM, Microsoft, Amazon, Google ont annoncé qu’ils ne fourniraient plus ce service tant que des règles et des garde-fous ne seraient pas mis en place. La France poursuit quant à elle son objectif de lancer une Carte Nationale d’Identité électronique (CNIe) en 2021 et s’apprête pour cela à relancer Alicem (Authentification en ligne certifiée sur Mobile), qui repose sur la reconnaissance faciale.

De son côté l’Union européenne accélère son projet de créer, à l’horizon 2022, un fichier unique des données biométriques (empreintes digitales et photos) des quelque 400 millions de ressortissants européens et non européens qui franchissent les frontières de l’espace Schengen, dans le but notamment de « gérer les frontières, la sécurité et les migrations ». Les entreprises IDEMIA et Sopra Steria ont été choisies pour constituer la base de données pour la France. Les enjeux étant le respect de la vie privée des personnes répertoriées dans le mégafichier ainsi que la sécurité de ce dernier au vu de ce qu’il renferme.

Mostefa Brahim

Source : Le Quotidien du médecin