Lumineuses études

Fiat Lux !

Par
Publié le 17/10/2016
Article réservé aux abonnés

Bien sûr, si on va tout de suite chercher du côté des mythes et des croyances, on sera heureux de découvrir que des civilisations très anciennes comme la Chine et le Japon posaient la grave question de savoir qui, du soleil ou de la lumière, était là le premier ? Par tempérament personnel, nous avons choisi de nous ancrer dans l'étude de Serge Haroche, prix Nobel de physique 2012, sur la révolution lumineuse dans notre vision du monde.

Tout le monde sait que Descartes a dit « Je pense, donc je suis », mais bien peu savent qu'il est l'auteur de la loi de la réfraction « sin i = n x sin r », i désignant l'angle incident et r l'angle réfracté d'un pinceau lumineux tombant sur un miroir ou un étang. Le philosophe français est tributaire des découvertes d'optique et de mécanique qui marquent le début du XVIIe siècle, une période où naissent deux fameuses controverses : la lumière est-elle une onde ou un flux de particules ? À quelle vitesse se propage-t-elle ? En ce qui concerne la première de ces questions, les savants ont donné raison au Hollandais Huyghens contre l'Anglais Newton : la lumière est une onde. Mais de quelle nature est cette onde ? En sautant deux siècles, en combinant la masse et l'énergie, Albert Einstein arrive à l'idée que « les rayons lumineux doivent être courbés dans un champ de gravitation, révélant la courbure de l'espace-temps lui-même ».

Dommages

Il est un autre domaine ayant trait à la lumière, celui de la réceptivité visuelle, étudié particulièrement par José-Alain Sahel, ophtalmologiste, pionnier de la recherche sur les prothèses visuelles. Nos lecteurs savent que cette réceptivité se déroule au niveau de cellules photoréceptrices, 130 millions de bâtonnets répartis sur la surface de la rétine. « Il est ironique de constater que c'est la lumière elle-même qui peut entraîner des dommages », dit le Pr Sahel, qui relie la cécité à la perte des « contrastes fins » dans la captation des objets.

Le clair-obscur

Et c'est encore la lumière que ce livre installe au centre avec l'histoire du clair-obscur, telle que, de Léonard de Vinci à Rembrandt, la peinture l'exprime. De fait, l'étude de Pascale Hemery, peintre et graveur sur bois, part de l'autoportrait de Nicolas Poussin, qui « offre une soigneuse combinaison des ombres aux lumières », tout en constatant que le temps a parfois altéré les teintes originelles. L'artiste se fait chimiste pour retrouver les mélanges et pigments utilisés à certaines époques. Ici se mêlent comme souvent le talent représentatif, la science et la technique, un mot qui, en grec ancien (technè), désignait l'art.

On pardonnera à l'auteur de ces lignes quelques à-peu-près en matière de sciences ; lui, hélas, n'est pas une lumière…

« Lumière, Lumières », sous la direction de John Scheid, Odile Jacob, 228 p., 25,90 €

André Masse-Stamberger

Source : Le Quotidien du médecin: 9526